tag:blogger.com,1999:blog-27864440114234659592024-03-06T15:09:37.387+01:00Inné et acquis, corps et esprit, sciencesCe blog se chargera de discuter les notions d'inné, d'acquis, de normal, de pathologique, de corps, d'esprit, et les raisonnements logiques et éthiques les plus fréquents à leur sujet. On y critiquera la psychanalyse et on y traitera également de bioéthique le cas échéant.Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.comBlogger149125tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-89156250087318674772023-02-03T08:56:00.000+01:002023-02-03T08:56:00.467+01:00Disposer de son corps : un droit encore à conquérir, Daniel Borrillo, 2019<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguOzpxrrZSAZbyaLGRmDtT_RfBNgIPGo-Bzb0eM3yCz9D6VUOqu0g1cpOeSMXWrFJP2GUbsAq2JVvV11L1820nnv6yXsXQ4YxMzB6gBuBkGmPPdLejq08B5E3QTdwnNKAEoZfpkmeypjQCUQv_fVHhJ73T73KzFSrCLieJ5ic8tBST7OjLdUrd6w/s607/disposer-de-son-corps-un-droit-encore-a-conquerir-9782845977617.webp" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="607" data-original-width="400" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguOzpxrrZSAZbyaLGRmDtT_RfBNgIPGo-Bzb0eM3yCz9D6VUOqu0g1cpOeSMXWrFJP2GUbsAq2JVvV11L1820nnv6yXsXQ4YxMzB6gBuBkGmPPdLejq08B5E3QTdwnNKAEoZfpkmeypjQCUQv_fVHhJ73T73KzFSrCLieJ5ic8tBST7OjLdUrd6w/s320/disposer-de-son-corps-un-droit-encore-a-conquerir-9782845977617.webp" width="211" /></a></div><br /><i><br /></i><p></p><p>Daniel Borrillo est un auteur dont j'avais déjà parlé dans de précédents articles (tous regroupés <a href="https://ineakis.blogspot.com/search/label/Daniel%20Borrillo">ici</a>). J'avais d'abord évoqué favorablement son livre sur la bioéthique, avant de m'éloigner de cet auteur à cause de sa relative malhonnêteté intellectuelle sur certains points (notamment par rapport à Irène Théry) ainsi que de son obsession anonymiste concernant les questions de PMA et d'accouchement sous X.</p><p>Son dernier livre,<i> Disposer de son corps : un droit encore à conquérir</i> est sorti en 2019 aux éditions Textuel, au sein de la collection Idées-débats.</p><p>Tout d'abord, que l'on soit d'accord ou non avec son auteur sur chaque point discuté, il s'agit d'un livre tout à fait digne d'intérêt. Une foule de thèmes y sont abordés, les uns à la suite des autres : les libertés vestimentaires, sexuelles et reproductives, par exemple. </p><p>Pour résumer mon point de vue global : la libre disposition de son corps est évidemment un thème très important (je rejoins d'ailleurs Borrillo sur de nombreuses questions) et on ne peut nier ici qu'il a fait un formidable travail d'envergure, mais je crains que cette thématique ne soit chez lui qu'une espèce de dogme, disjoint de certaines réalités (j'y reviendrai).</p><p>Je n'ai pas grand chose à redire concernant les deux premières parties. Sans doute, et d'autant plus particulièrement dans un contexte français, Daniel Borrillo exprime-t-il souvent des opinions controversées sur certaines questions, et il le sait ; mais, n'étant pas un expert, il serait probablement trop long et fastidieux (voire possiblement hors sujet) d'exposer ici mes éventuelles réticences ou divergences, qui portent d'ailleurs souvent davantage sur la forme que sur le fond de ses propos, tant il y a de thématiques abordées dans un espace de pages aussi réduit. Sur beaucoup de sujets, en réalité, ce livre est une redite de <a href="https://ineakis.blogspot.com/2012/10/bioethique-daniel-borrillo.html">son précédent ouvrage sur la bioéthique</a>, datant d'il y a plus de dix ans maintenant.</p><p>Je me concentrerais donc davantage sur la troisième partie, portant sur la procréation.</p><p>Ma première divergence avec Daniel Borrillo porte sur la notion de <i>« filiation basée sur la volonté »</i>. J'y suis moi-même favorable dans l'absolu, le problème étant que Borrillo élargit considérablement ce qu'il entend par <i>« filiation »</i>, y incluant par exemple l'accès aux origines personnelles, faisant ainsi paradoxalement les mêmes erreurs que les sympathisants LMPT.</p><p>En particulier, j'ai une interprétation assez différente de la notion de <i>« volonté »</i> : lorsque Daniel Borrillo parle de <i>« volonté »</i>, en effet, il parle toujours de celle des adultes ou des parents d'intention, jamais de celle de leurs enfants. C'est ce qui introduit une certaine incohérence dans son raisonnement.</p><p>En matière de droits de l'enfant, le projet de Borrillo est proprement désastreux. Il propose en effet de généraliser des principes qui vont à l'encontre du droit international (abandon, accouchement sous X y compris pour les hommes, adoption plénière...) dans un objectif soi-disant émancipateur, sans prendre en compte qu'il y a un rapport de domination intrinsèque entre d'un côté les adultes et les parents et leurs enfants de l'autre. Comme disait Henri de Lacordaire, <i>« entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit »</i>.</p><p>Sur la GPA, d'un côté, Borrillo a raison de dénoncer le consensus qui règne en France contre cette pratique, mais de l'autre, il se montre implicitement favorable à la GPA commerciale, dont l'éthique peut être discutée.</p><p>Pour Borrillo, la gratuité dans les arrangements procréatifs (y compris la PMA <i>« classique »</i>) est en effet à remettre en cause parce que celle-ci créerait une pénurie. Le fait que le paiement puisse être un facteur d'exploitation de certaines personnes par d'autres n'est pas pris en compte dans son analyse.</p><p>J'aimerais aussi revenir sur sa vision de l'accès aux origines. Cette question n'est abordée que brièvement dans le livre. Borrillo prétend que la levée de l'anonymat relèverait uniquement d'une logique de <i>« prééminence de la filiation hétérosexuelle »</i> et de <i>« différence des sexes »</i> (je simplifie). Sans doute Borrillo ne doit-il connaître ni n'avoir jamais croisé aucune personne conçue par don qui recherchait son géniteur. Sinon comment penser une seule seconde que, si ces personnes se battent pour l'accès à leurs antécédents médicaux et à leur identité personnelle, ce serait uniquement pour emmerder les homosexuels ? On objectera que la levée de l'anonymat peut parfois servir de cache-sexe pour défendre des positions homophobes derrière, sauf que personne ne le nie (les concerné-e-s sont les premières personnes à dénoncer cette instrumentalisation). En l'occurrence, rien n'indique dans l'avis du CCNE que la levée de l'anonymat était réclamée pour des raisons homophobes ; celui-ci semblait simplement mieux informé sur la question que Borrillo lui-même.[1]</p><p>Borrillo ne parle pas non plus du consensus qui entoure la levée de l'anonymat en France, homosexuels et hétérosexuels confondus. Qu'est-ce qui est le plus assimilationniste, au fond, la levée de l'anonymat, ou cultiver le fantasme d'avoir des enfants à soi et rien qu'à soi ?</p><p>Ultimement, à cause de ce gros point noir sur la procréation, Daniel Borrillo ne défend pas une vision cohérente de la libre disposition de son corps, qui serait basée sur l'idée que notre liberté s'arrête là où commence celle des autres, même lorsque ceux-ci n'existent pas encore (mais où on part du principe qu'ils vont exister). Borrillo est donc plutôt quelqu'un que je qualifierais volontiers de <i>« social-libertarien »</i> et pour certaines questions, notamment l'accès aux origines, on y retrouve la même négation libertarienne des droits-créances.</p><p>Pour terminer, pour quelqu'un qui prétend défendre la liberté de disposer de son corps, on ne trouve pas un mot dans son livre sur les mutilations génitales lorsque celles-ci ne concernent pas les personnes intersexes (même ces dernières ne sont abordées que brièvement).</p><p>---</p><p>[1]On peut retrouver l'avis du CCNE <a href="https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/2021-02/avis_129_vf.pdf">ici</a>. Parmi les raisons invoquées pour justifier la levée de l'anonymat, on retrouve notamment l'idée que celui-ci est revendiqué par des personnes conçues par don, et que les tests ADN récréatifs largement pratiqués aujourd'hui rendent illusoire la possibilité de le garantir.</p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-30406847107477019272023-02-02T16:22:00.004+01:002023-02-03T13:48:17.476+01:00Donor Conceived Guide, COLAGE, 2022<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjP1mYaZYOnOdPD1DONw92OVMwCz8ff6IH6mqiR72ptlvazCbwK15RnYslDpH4uaG5d_90hOkCTwRjFnJEEVP6R8ECGyE6LXtjm7_OWL1VFSzRGI0anL_OP9tBFRnhoJRrLTAXObuz0MEchl3ZUBw9Q0UIejvEIpNhQ0QiEksq-zBDzNicQA4uDoQ/s1080/Donor-Conceived-A-Guide-for-People-with-LGBTQ-Parents-Born-via-Donor-Insemination-Egg-Donation-Surrogacy-andor-IVF-1080-%C3%97-1080-px-2.png" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1080" data-original-width="1080" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjP1mYaZYOnOdPD1DONw92OVMwCz8ff6IH6mqiR72ptlvazCbwK15RnYslDpH4uaG5d_90hOkCTwRjFnJEEVP6R8ECGyE6LXtjm7_OWL1VFSzRGI0anL_OP9tBFRnhoJRrLTAXObuz0MEchl3ZUBw9Q0UIejvEIpNhQ0QiEksq-zBDzNicQA4uDoQ/s320/Donor-Conceived-A-Guide-for-People-with-LGBTQ-Parents-Born-via-Donor-Insemination-Egg-Donation-Surrogacy-andor-IVF-1080-%C3%97-1080-px-2.png" width="320" /></a></div><br /><p>Le <i><a href="https://colage.org/wp-content/uploads/2023/02/Donor-Conceived-Guide.pdf">Donor Conceived Guide</a> </i>est un guide en anglais disponible gratuitement sur le site de <i><a href="https://colage.org/">COLAGE</a></i>, une association américaine qui rassemble des personnes élevées par des parents LGBTQ+ et qui défend leurs intérêts. Ce guide est à destination des personnes conçues par don (ou par GPA) étant ou ayant été élevées par des parents LGBTQ+.</p><p>Il s'agit d'une mise à jour d'un précédent guide du même genre qui datait de 2010, et qui était devenu obsolète pour diverses raisons.</p><p>Passée l'introduction qui précise à qui s'adresse ce guide et qui clarifie certains éléments de terminologie, les autres chapitres abordent respectivement la situation des enfants avec donneurs connus, (semi-)anonymes, nés par GPA, puis le fait de parler de sa famille à d'autres personnes, puis deux derniers chapitres portant sur des ressources additionnelles.</p><p>Ce que je trouve particulièrement intéressant, dans ce guide, c'est qu'il s'adresse spécifiquement aux personnes conçues par don issues de familles homoparentales, et pas aux personnes conçues par don en général. En effet, on s'aperçoit que les premiers ont souvent une perspective différente de celle des personnes élevées par un père et une mère.</p><p>Je pense que si vous êtes LGBTQ+ et que vous voulez avoir des enfants, c'est un guide à lire absolument, pour comprendre leur perspective. Peut-être que vous ne vous reconnaissez pas dans les témoignages des personnes conçues par don issues de familles hétéroparentales. C'est normal. C'est pourquoi cette publication, entre autres, vient remettre les points sur les i.</p><p>Entre autres, on y découvre - mais vu les études sur le sujet, ce n'était un mystère pour personne - qu'il y a des personnes conçues par don élevées par des parents LGBT qui recherchent leur géniteur ; il est donc loin d'être automatique que celles-ci <i>« le vivent bien »</i>.</p><p>Néanmoins, il existe des différences notables avec la façon dont les <i>« enfants PMA d'hétéros »</i> abordent la question. Notamment, les <i>« enfants PMA d'homos »</i> se montrent plus sensibles à l'homophobie systémique, et cela influence leur façon d'envisager le contact avec leur donneur.</p><p>Vous avez peur que vos enfants considèrent leur donneur comme un parent ? Qu'ils soient déçu par le fait d'avoir des parents LGBT, et que le donneur lui permette d'avoir une famille <i>« normale »</i>, hétéro ? Que le donneur soit homophobe ? Ne vous inquiétez pas : si jamais vous avez des appréhensions, vos enfants le sauront. La meilleure solution, c'est d'abord d'en parler avec eux, au lieu de croire que l'anonymat résoudrait d'un coup tous les problèmes. Je le répète : vos enfants n'ont aucune obligation de vous protéger, et s'ils veulent contacter leurs donneurs, c'est leur décision, et vous ne pourrez rien y faire (et oui, la liberté de disposer de son corps, ça marche dans les deux sens).</p><p>L'appréhension quant au fait que le donneur puisse être homophobe est quelque chose que j'avais déjà vu auparavant, sur les réseaux sociaux, mais c'est quelque chose auquel je ne prêtais guère d'attention jusque là, notamment parce qu'en contexte français avec justement la levée de l'anonymat et la dernière loi bioéthique plus généralement, je me disais (peut-être naïvement) qu'il fallait être masochiste pour être homophobe et permettre à des couples de femmes d'avoir des enfants, en sachant que ceux-ci pourraient nous contacter plus tard.</p><p>Si ce guide montre quelque chose, c'est qu'il s'agit en réalité d'une inquiétude exprimée non seulement par les parents, mais aussi par les enfants eux-mêmes.</p><p>Mais je pense avant tout que le vrai problème avec les éventuels donneurs homophobes, ce n'est pas tant la levée de l'anonymat en tant que telle que l'homophobie en elle-même ! Peut-être que s'il y avait moins d'homophobie, les <i>« enfants PMA d'homos »</i> auraient moins d'appréhensions à vouloir contacter leur donneur.</p><p>C'est ce qui me fait dire qu'un anti-anonymiste cohérent se doit de lutter contre l'homophobie et la bionormativité, y compris systémique. De façon générale, les personnes conçues par don, dans leur ensemble, ne devraient pas avoir à payer pour les conséquences de l'homophobie et de la bionormativité.</p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-36719744656078541762023-02-01T23:18:00.010+01:002023-02-03T09:17:14.451+01:00S'il suffisait qu'on s'aime, Daphné et Julie Guillot, 2022<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjANkipiTfT57nNmntMmjRgAHZpCNjFRayr3vTiD1yN0UwF4u3RHVLAgFWKAGBLrKMDEZhE71oxb3hx1mMuzTNyODSU-bFozIzgkixR7ghpThobUU7YLZKlR2xFr7sv1vqwyhTx0iqS_kUgfRoKFfL3BAex7E8TQum2votFD12v1An-0vhH3I8k-w/s567/S-il-suffisait-qu-on-s-aime-Chronique-des-annees-PMA-pour-toutes.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="567" data-original-width="400" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjANkipiTfT57nNmntMmjRgAHZpCNjFRayr3vTiD1yN0UwF4u3RHVLAgFWKAGBLrKMDEZhE71oxb3hx1mMuzTNyODSU-bFozIzgkixR7ghpThobUU7YLZKlR2xFr7sv1vqwyhTx0iqS_kUgfRoKFfL3BAex7E8TQum2votFD12v1An-0vhH3I8k-w/s320/S-il-suffisait-qu-on-s-aime-Chronique-des-annees-PMA-pour-toutes.jpg" width="226" /></a></div><p><i style="font-style: italic;">S'il suffisait qu'on s'aime, chronique des années PMA </i>est une bande dessinée française, écrite par Daphné Guillot et dessinée par Julie Guillot, et parue au format <i style="font-style: italic;">« roman graphique » </i>en octobre 2022 aux éditions Steinkis.</p><p>Cette BD aborde la question de la lutte pour l'accès à la PMA du point de vue d'un couple de jeunes femmes. Globalement, celle-ci est très émouvante et touchante, notamment dans sa description des diverses violences, outrances et horreurs homophobes qui ont accompagné et émaillé la lutte pour le mariage pour tous, puis pour la PMA. On a à faire ici à un point de vue à la fois personnel et militant.</p><p></p><p>Dans l'ensemble, la BD est agréable à lire et, malgré quelques scènes érotiques par ci par là, elle n'a pas le côté trash ou moqueur que l'on voit parfois dans certaines productions abordant ce thème, et c'est tant mieux, je pense (j'y reviendrai).</p><p>S'il y avait un bémol à apporter, ce serait plutôt sur la question de l'accès aux origines. En effet, celle-ci n'est abordée que brièvement, et de façon plutôt ambigüe : d'un côté, en conclusion de la BD, les autrices ne voient pas la levée de l'anonymat comme un reproche à adresser à la loi de 2021 (ce qui semble témoigner, et c'est une bonne chose, d'une certaine normalisation de la levée de l'anonymat, ce qui était l'un des objectifs recherchés de cette loi), et elles ne font preuve d'aucune animosité particulière envers les personnes conçues par don qui recherchent leur géniteur ; on appréciera même un réel effort dans l'écriture pour adopter une posture compréhensive à leur égard (en tout cas, cela tranche le climat malsain qu'on a pu avoir sur Twitter, à une certaine époque).</p><p>De l'autre côté, cependant, il faut rappeler que les autrices ont fini par avoir accès à la PMA en Espagne, pays où l'anonymat des donneurs est imposé, et il y a tout un passage un peu dérangeant au milieu de la BD pour justifier ce choix final : en effet, on voit d'autres personnes faire pression sur les autrices pour qu'elles aillent aux Pays-Bas, en raison de meilleures garanties en termes d'accès aux origines dans ce pays. Les autrices prétendent ensuite que cela dépendrait en réalité du bon vouloir du donneur (ce qui reste à vérifier, en fonction de l'époque à laquelle la scène est censée se dérouler).</p><p>Ce qui permet d'embrayer sur les mouvements pour l'accès aux origines des personnes conçues par don. C'est ainsi que, malgré une certaine volonté de remettre les choses dans leur contexte, on assiste à une vision réductrice et déformée de leurs revendications : les autrices considèrent par exemple que ces personnes auraient du mal à différencier <i>« père »</i> et <i>« géniteur »,</i> alors qu'elles font au contraire très bien cette distinction, y compris dans l'extrait cité dans la BD (bien mieux que certaines lesbiennes radicales, d'ailleurs). Elles leur reprochent aussi d'avoir été plus médiatisés que les lesbiennes pro-PMA (ce dont je n'ai pas l'impression). On note au passage une certaine ignorance des débats autour de l'article 7 de la convention des droits de l'enfant.</p><p>Les autrices reprochent ensuite de ne pas assez parler des enfants qui vivent bien leur mode de conception, mais sur une question telle que celle-ci, cela relève d'une erreur de raisonnement assez fréquente, un biais de confirmation pourrait-on dire. Si, dans l'Histoire, pour n'importe quelle institution archaïque, on n'avait écouté que l'avis des personnes qui la vivent bien, on n'aurait pas fait beaucoup de progrès. Si, pour prendre un exemple récent, dans un débat sur la réforme des retraites, on dirait regretter ne pas assez entendre l'avis des personnes qui veulent travailler jusqu'à 64 ans, ce serait presque du foutage de gueule. </p><p>Et, s'il y a bel et bien des personnes conçues par don qui s'opposent à la levée de l'anonymat, parfois après être devenues parents à leur tour, celles-ci sont nettement minoritaires, et cela ne constitue de toute façon pas un argument en faveur de l'anonymat (c'est ainsi que dans le monde, il y a tant d'autres pratiques oppressives qui se perpétuent de génération en génération). </p><p>Elles reprochent aussi de ne pas assez parler du don d'ovocytes (ce qui est faux, puisqu'on en parle, c'est juste plus difficile d'en parler dans un contexte de l'ouverture de la PMA pour toutes les femmes). </p><p>Tout cette séquence se termine par une double page qui souligne qu'on a longtemps surestimé le rôle du père, ou du mâle, dans la procréation. C'est bien sûr vrai, mais cela ne justifie pas de passer d'un extrême à l'autre. Le spermatozoïde transmet des caractéristiques biologiques importantes, ce qui fait que la connaissance de l'identité du donneur peut être importante pour l'enfant, aussi bien pour des raisons de santé que pour des raisons de formation de son identité personnelle, et ce devrait être à lui seul de décider si celle-ci est importante ou pas. En quelque sorte, l'anonymat fait des parents d'intention les propriétaires de l'identité de leur enfant. C'est pourquoi, s'il est pris trop au sérieux et que l'on s'y accroche de façon dogmatique, celui-ci ne peut à terme déboucher que sur la réinvention d'un modèle familial autoritaire. On peut de toute façon facilement le contourner aujourd'hui, avec l'avènement des tests ADN récréatifs.</p><p>Tout ce passage interroge sur les stratégies que les anti-anonymistes devraient suivre pour défendre leurs idées dans l'espace public. J'y vois deux leçons principales à en tirer :</p><p>- Ce serait une grossière erreur que de penser qu'un argumentaire reliant l'accès aux origines aux droits de l'enfant convaincrait immédiatement n'importe qui, surtout des personnes qui se sont vues refuser leur accès à la parentalité <i>précisément</i> au nom d'une certaine vision de ces mêmes droits : en effet, certaines d'entre elles risquent de voir cela davantage comme une ènième injonction moralisatrice que comme une sincère volonté de protéger les droits de l'enfant. Quand la droite et les réactionnaires ont passé leur temps à crier au loup, et ce de façon particulièrement hypocrite par ailleurs, voilà en définitive le résultat final. </p><p>- Certaines lesbiennes ont du mal à se reconnaître dans les témoignages des personnes conçues par don issues de familles hétéroparentales, à cause de la trop grande différence de situation vis-à-vis de la leur. Or, en France, on manque cruellement de témoignages de personnes nées dans des familles homoparentales et qui recherchent leur géniteur. Jusque là, outre bien sûr l'interdit légal qui pesait sur la PMA hétéro, il y avait justement une bonne raison à cette situation : la vague d'homophobie qui a suivi accompagné les débats sur le mariage pour tous et la PMA. Sans doute certaines personnes se taisent-elles de peur de voir leurs propos être mal interprétés, déformés et instrumentalisés contre leurs parents. Peut-être les mêmes se taisent-elles aussi de peur, pour paraphraser Sartre, de ne pas <i>« désespérer [le Gouinistan] »</i>.</p><p>Face à cette situation, il me semble important de rappeler que l'anonymat est contraire aux valeurs que le mouvement LGBT a historiquement défendues. Si l'on se bat pour l'autodétermination des homosexuel-le-s, des bisexuel-le-s, des transgenres, des intersexes, pourquoi la refuser pour les personnes conçues par don ? Les personnes <i>« qui le vivent bien »</i> ne doivent pas être les arbres qui cachent la forêt : quand on s'engage dans un tel parcours, on ne sait pas sur quel type d'enfant on va tomber, à la fin, et certains d'entre eux sont très curieux, par rapport aux donneurs, et pas forcément par volonté d'être <i>« comme les autres »</i>.</p><p>De plus, la bibliographie de la BD comporte de nombreuses sources anonymistes (<a href="https://ineakis.blogspot.com/2016/12/le-retour-de-la-revanche-de-daniel.html">Daniel Borrillo</a>, par exemple). Les autrices sont aussi favorables au droit commun pour toutes, ce qui ne favorise pas la divulgation du secret chez les enfants nés dans des couples hétéros et se heurte à certains obstacles juridiques.</p><p>Néanmoins, je le répète encore une fois, et indépendamment de nos divergences portant sur certains points, il s'agit d'une démarche courageuse qu'on ne peut que saluer, et qui force le respect.</p><p>Que retenir de plus ? Principalement, que les lois trop restrictives et discriminatoires en matière d'accès à la PMA sont contre-productives, si on peut si facilement les contourner. Autrement, le livre se termine par une énonciation des manquements de la dernière loi Bioéthique (<a href="https://ineakis.blogspot.com/2020/07/sur-la-ropa.html">ROPA</a>, GPA, intersexes, droits des personnes transgenres...). Je pense qu'un anti-anonymiste cohérent, s'il veut couper l'herbe sous le pied des anonymistes, devrait soutenir toutes ces réformes (de façon vigilante bien sûr, dans le cas de la GPA).</p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-84766978579004231602022-12-10T18:16:00.002+01:002022-12-10T18:28:06.215+01:00Définition de la gauche et de la droite : cas d'école<p><span style="color: #050505; font-family: times;">J'ai
déjà écrit <a href="https://ineakis.blogspot.com/2013/07/la-difference-entre-la-gauche-et-la.html">plusieurs</a> <a href="https://ineakis.blogspot.com/2014/05/lecologie-politique-est-elle-un-courant.html">articles</a> sur ce blog portant sur la
définition de la gauche et de la droite. Plus récemment, parmi les milieux sceptiques et zététiciens que je connais et que je fréquente, une définition semble s'être imposée par rapport aux autres, celle défendue par le vidéaste <i>Tzitzimitl</i>. </span><span style="font-family: times; text-align: justify;">Dans mes milieux, tout le monde ou presque la connaît :</span></p><p><span style="color: #050505; font-family: times;"><i>« - On est de gauche quand on veut changer le monde, créer une société nouvelle qu'on croit meilleure.</i></span></p><p><span style="color: #050505; font-family: times;"><i>- On est de droite quand on accepte le monde tel qu'il est, ou qu'on souhaite le faire revenir à un état passé. »</i></span></p><p><span style="color: #050505; font-family: times;">Cette
définition n'a pourtant rien de novateur et correspond même en grande partie à la
définition <i>« historique »</i> de ces deux termes, celle qu'on trouve le plus fréquemment dans les dictionnaires. </span><span style="color: #050505; font-family: times;">Elle m'avait toujours dérangé de par ses failles évidentes, que j'exposerai après.
La vidéo suivante a au moins le mérite de remettre les points sur
les i :</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="font-family: times;"><br />
</span></p>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><iframe allowfullscreen="" class="BLOG_video_class" height="266" src="https://www.youtube.com/embed/hoQ1DiF-fJE" width="320" youtube-src-id="hoQ1DiF-fJE"></iframe></div><br /><p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="color: #050505; font-family: times; text-align: left;">Pour
résumer brièvement les critiques à son encontre :</span></p>
<p style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="color: #050505;"><span style="font-family: times; font-size: small;">- il s'agit d'une définition qui est simple en apparence, mais qui nécessite en pratique de
nombreux ajustements et interprétations pour coller à la
définition de ce qu'on entend habituellement, aujourd'hui, par
<i>« gauche »</i> et par <i>« droite »</i> respectivement.</span></span></p>
<p style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="color: #050505;"><span style="font-family: times; font-size: small;">- avec un peu de mauvaise foi, on pourrait facilement prétendre que toute
idée qui n'aurait jamais été préalablement mise en pratique
serait automatiquement de gauche. Inversement, on pourrait considérer que toute idée qui aurait
déjà été mise en pratique dans le passé serait automatiquement de droite.</span></span></p>
<p style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="color: #050505;"><span style="font-family: times; font-size: small;">- cette définition peut facilement sous-entendre une vision fortement linéaire du progrès humain,
idée qui est aujourd'hui vivement discréditée.</span></span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="font-family: times;"><span style="color: #050505;"><span style="font-size: small;">En
fait, ce qui me dérange dans la définition de <i>Tzitzimitl</i>, malgré
son caractère en apparence flatteur pour la gauche, c'est son côté
<i>« balle dans le pied »</i>, que l'on aperçoit davantage et plus clairement lorsque l'on se pose les questions suivantes, liées à toute une série de situations qui mettent cette définition à rude épreuve :</span></span></span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="font-family: times;"><span style="color: #050505;"><span style="font-size: small;">- Est-ce
que les Nazis des années 1930 étaient de gauche parce qu'ils
proposaient de mettre en place un système radicalement nouveau ? Certes, ils puisaient souvent leur inspiration dans un passé mythifié (et parfois très lointain), mais ils s'appuyaient aussi sur des théories et des concepts (racisme <i>« scientifique »</i>, eugénisme, etc...) relativement nouveaux à l'époque (quelques décennies tout au plus), et pour lesquels le clivage gauche-droite n'était pas toujours très clair.</span></span></span></p><p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times;"><span style="color: #050505;"><span style="font-size: small;">- Est-ce que les néolibéraux et les libertariens ont le droit de se
revendiquer de gauche, grâce à leur vague progressisme sociétal
et parce qu'ils considèrent que leur projet incarne l'avenir, sans
référence explicite à un modèle passé ? </span></span></span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times;"><span style="color: #050505;"><span style="font-size: small;"><i>Tzitzimitl</i> prétend que
les libéraux voudraient revenir à la société du 19ème siècle,
sauf que c'est une idée qui, en pratique, est totalement absente de
leur rhétorique ; en réalité, ils considèrent que la société de
l'époque était beaucoup trop protectionniste et pas assez libérale,
par exemple.</span></span></span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times;"><span style="color: #050505;"><span style="font-size: small;">- est-ce que les <i>« laïcards »</i> xénophobes ont le
droit de se dire de gauche sous prétexte qu'ils prétendent avant
tout s'opposer à des conservatismes étrangers ? </span></span></span></p><p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times;"><span style="color: #050505;"><span style="font-size: small;">- est-ce que les
personnes qui défendaient la pédophilie dans les années 1970
étaient vraiment de gauche ? </span></span></span></p><p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times;"><span style="color: #050505;"><span style="font-size: small;"><a href="https://www.amazon.fr/Lenfant-interdit-Comment-p%C3%A9dophilie-scandaleuse/dp/2200286430">En pratique, il y en avait aussi qui étaient de droite, même selon cette définition</a>. </span></span>
</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="color: #050505; font-family: times; text-align: left;">- d'après
la définition de <i>Tzitzimitl</i>, les staliniens (<a href="https://rationalwiki.org/wiki/Stalin_apologetics#Tankies" style="font-style: normal;">et, plus généralement, toutes les personnes qui défendent des régimes communistes autoritaires existant ou ayant existé</a>) devraient être considérés comme de droite, parce qu'en pratique ils ne proposent de créer un modèle radicalement nouveau, mais juste de défendre un régime existant ou de revenir à un genre de régime ayant déjà existé. Mais si, dans ce cas, les
staliniens sont de droite (ce qu'eux-mêmes réfutent, justement à
cause de leur vision linéaire du progrès), pourquoi leurs positions
sont-elles à ce point aussi divergentes et aussi diamétralement opposées à celles du <i>« reste »</i> de la
droite, sur autant de sujets ?</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="color: #050505; font-family: times; text-align: left;">- le
sionisme a-t-il jamais été de gauche ? La définition du <i>Tzitzimitl</i> suggère que oui. Plus généralement, la définition de <i>Tzitzimitl</i> donne raison à l'idée selon laquelle le colonialisme aurait d'abord été une idée de gauche, par exemple.</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="color: #050505; font-family: times; text-align: left;">- joker : qui était de gauche et qui était de droite en Amérique au 19ème siècle ?</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">Personnellement, je pense qu'une définition basée sur le rapport à la notion d'égalité est beaucoup plus utile qu'une définition basée sur le rapport au passé et à l'avenir : la gauche est plus égalitaire que la droite, c'est tout.</p>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="font-family: times;">Plus largement, il est possible de ne pas définir la gauche et la droite de façon totalement symétrique. On peut considérer que la gauche est plus égalitaire et la droite plus conservatrice, par exemple, mais</span><span style="color: #050505; font-family: times; text-align: left;"> cela laisse aussi de la place pour des positions qui ne sont en
fait ni de gauche ni de droite. </span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="color: #050505; font-family: times; text-align: left;">Cela ne concerne que rarement les personnes qui se revendiquent
comme n'étant <i>« ni de gauche, ni de droite »</i>, d'ailleurs (en général et en pratique, on les trouve beaucoup plus souvent
à droite qu'à gauche de l'échiquier politique), mais plutôt des personnes qui se
revendiquent parfois de gauche, voire d'extrême-gauche, mais qui
défendent en réalité un renversement de la hiérarchie plutôt que
des positions réellement égalitaires, ou des positions communautaristes/relativistes qui
peuvent être difficilement défendues avec une <i>« vraie »</i> rhétorique de gauche, ou encore ce qu'on pourrait appeler des <i>« voies
de garage »</i> de l'Histoire (voire plusieurs de ces choses-là à
la fois).</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">Si
on applique la définition de la gauche basée sur le rapport à
l'égalité aux exemples ci-dessus, on obtient les résultats suivants :</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; text-align: justify; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- les
Nazis étaient de droite, et même d'extrême-droite, en raison de leur point de vue sur les inégalités raciales ;</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; text-align: justify; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- les
néolibéraux et les libertariens sont de droite, à cause de leur
vision des inégalités socio-économiques. Leur relatif libéralisme
en matière de questions de société, lorsque celui-ci existe,
découle de la stricte application de principes purement
idéologiques, pas vraiment d'une quelconque vision égalitaire,
quoi qu'ils en disent et en pensent eux-mêmes.</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; text-align: justify; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- les <i>« laïcards »</i> xénophobes sont de droite. Leur progressisme
de façade n'est qu'un prétexte pour défendre des hiérarchies
selon l'origine ethnique des individus.</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; text-align: justify; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- défendre
la pédophilie n'est en général ni de droite, ni de gauche. Cette
idée a déjà été défendue par des gens de droite, même à l'époque, et elle fait
courir un risque de domination bien trop grand pour qu'on la considère
pleinement comme de gauche ; mais en même temps, on ne peut pas dire
malgré tout qu'elle préserve l'ordre établi, donc ce n'est pas de droite. Selon la définition
de <i>Tzitzimitl</i>, cela dépendrait principalement de si la personne en
question trouve son inspiration dans l'avenir ou le passé lointain pour cette défendre cette idée,
mais cela est, avouons-le, un peu bizarre ou bancal, et souligne le problème intrinsèque qu'il y a avec cette définition.</span></p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm; orphans: 2; text-align: justify; widows: 2;"><span style="text-align: left;"><span style="font-family: times;">Aujourd'hui, la droite est souvent bien plus favorable que la gauche à des mesures particulièrement répressives en matière d'actes pédophiles, et pointe souvent la mollesse, voire les errements passés de la gauche dans ce domaine-là. Dans le même temps, la lutte contre la pédophilie est devenue un thème anticlérical, et les gens de gauche pointent souvent l'hypocrisie des gens de droite et d'extrême-droite en la matière.</span></span></p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm; orphans: 2; text-align: justify; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- les
staliniens et les<i> <a href="https://rationalwiki.org/wiki/Stalin_apologetics#Tankies">« tankies »</a></i> ne sont ni de droite,
ni de gauche. Disons que suivant les époques et les pays, on peut
les classer globalement à gauche, malgré tout (et en tant que
personne de gauche, ça me fait du mal d'avoir à l'admettre), mais dans certains cas, parfois (notamment dans certains pays ex-communistes), ce positionnement ne reflète plus qu'une simple convention
historique. Le stalinisme moderne se caractérise notamment par une
vision manichéenne et plus ou moins complotiste de la politique étrangère et internationale, vision qui en soi n'est pas intrinsèquement de gauche. Malheureusement, celle-ci a pu influencer dans une certaine mesure des partis aujourd'hui</span><span style="font-family: times; text-align: left;"> </span><span style="font-family: times; text-align: left;">devenus</span><span style="font-family: times; text-align: left;"> politiquement très puissants tels que LFI, par exemple, en France.</span></p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm; orphans: 2; text-align: justify; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- le
sionisme a débuté comme une idée <i>« ni droite, ni gauche »</i> défendue principalement par des gens de gauche (Proust le cite au côté de
l'antimilitarisme, du saint-simonisme et du végétarisme comme
idées associées à la défense des homosexuels), puis il est ensuite
passé à droite, globalement. De façon plus générale, le
colonialisme a d'abord été défendu par des gens de gauche avant
de passer à droite, mais ce n'était pas un hasard vu le contexte intellectuel de l'époque et les arguments mobilisés par chaque camp. Ce qui ne signifie pas qu'en soi, intrinsèquement, le colonialisme ait jamais été une idée de gauche.</span></p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm; orphans: 2; text-align: justify; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- joker
: aux États-Unis, au 19ème siècle, les deux partis n'étaient pas
séparés par un axe gauche-droite au sens où on l'entend
aujourd'hui. Le parti démocrate était globalement soutenu par les
classes inférieures (blanches), mais il avait aussi un rapport très <i>« réactif »</i> à la politique - là où le parti républicain et ses prédécesseurs
étaient au contraire beaucoup plus <i>« proactifs »</i> - et défendait
l'esclavage au nom d'arguments à la fois conservateurs et communautaristes/relativistes. Le parti est </span><span style="font-family: times; text-align: left;">peu à peu devenu plus progressiste par la suite, mais il lui a fallu du
temps avant d'en arriver là. Le parti républicain était quant à lui globalement plus progressiste à
l'origine, mais certains de ses sympathisants, déjà à l'époque, s'opposaient à
l'esclavage davantage parce que celui-ci représentait un frein à
la modernité et un risque de délitement des institutions que pour
des raisons vraiment égalitaristes. Il était soutenu par les
classes supérieures et a progressivement dévié vers la droite
ensuite, au point d'atterrir aujourd'hui à l'extrême-droite, et de
représenter ainsi, à peu de chose près, l'exacte antithèse de ce qu'il
fut jadis.</span></p>
<ul>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
</p>
</ul>
<p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="text-align: left;"><span style="font-family: times;">Pour terminer en beauté, prenons
une cause qui me tient à cœur, puisque je me suis déjà beaucoup
engueulé à ce sujet, notamment sur Twitter : la levée de
l'anonymat dans la PMA, que nous appellerons <i>« anti-anonymisme »</i> par la suite, pour simplifier.</span></span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">Cette
cause est un cas particulier, un cas d'école, pourrait-on dire.
Personnellement, d'après ma définition de la gauche et de la
droite, je considère cette cause comme étant fondamentalement de
gauche puisqu'elle vise à réduire certaines inégalités entre les individus, mais il est vrai qu'elle peut rassembler au-delà des clivages et être facilement être défendue avec des arguments de droite, voire
instrumentalisée par la droite, notamment à l'encontre des
personnes LGBT.</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; font-style: normal; text-align: left;">C'est
sous ces derniers prétextes que certaines lesbiennes radicales que j'ai pu côtoyer considèrent cette cause comme étant intrinsèquement de droite, voire d'extrême-droite. </span><span style="font-family: times; font-style: normal; text-align: left;">Ces personnes, qui défendent des positions anonymistes en matière de PMA, vont se considérer comme de gauche
selon une définition similaire à celle donnée par </span><i style="font-family: times; text-align: left;">Tzitzimitl </i><span style="font-family: times; text-align: left;">: elles considèrent en effet sincèrement qu'elles veulent changer les choses et créer une société meilleure. Par opposition, selon elles, les anti-anonymistes sont nécessairement de droite, voire d'extrême-droite. C</span><span style="font-family: times;">e qui est paradoxal, même (et surtout) selon la définition-même de <i>Tzitzimitl</i>, vu que les </span><span style="font-family: times; text-align: left;">anti-anonymistes proposent justement de mettre en place un système entièrement nouveau, qui n'a jamais été mis en place en France auparavant !</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">De plus, une définition similaire à celle de <i>Tzitzimitl</i> leur permet de justifier leur misandrie, leur hétérophobie, et parfois même leur biphobie et leur communautarisme. Beaucoup d'entre elles ne cherchent pas à créer une société réellement plus égalitaire, mais simplement à renverser les hiérarchies existantes.</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="font-family: times;">En fait, leur vision très personnelle de l'axe gauche-droite relève également d'une vision assez <i>« linéaire »</i> du progrès, aujourd'hui discréditée.</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: times; font-size: small;">Mais,
si l'on y réfléchit un peu, est-ce que c'est vraiment de gauche que
de défendre des rapports familiaux hiérarchiques et autoritaires, ou des inégalités
entre les enfants dans l'accès à leurs antécédents médicaux ou à
leurs origines biologiques ? La réponse est non, bien évidemment.</span></span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">En réalité, si
l'on analyse en détail les arguments qu'elles utilisent sur les réseaux sociaux, on s'aperçoit vite que pour les plus sérieux d'entre eux, ils rentrent tous dans au moins une des catégories suivantes :</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- les arguments <i>« pessimistes »</i> : l'anonymat est alors vu comme une sorte de <i>« mal nécessaire »</i>. Dans cette optique, l'homophobie systémique est considérée comme un problème
insurmontable, au point que la levée de l'anonymat exposerait les
lesbiennes au risque de voir leurs familles envahies légalement par
des hommes. De la même façon, on a pu justifier le sionisme par
l'inévitabilité de l'antisémitisme chez les non-juifs[1], ou le
totalitarisme soviétique par la nécessité de lutter contre
l'<i>« encerclement capitaliste »</i>.</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- les arguments libéraux : la possibilité de dons de gamètes anonymes est justifié à l'aide d'un raisonnement analogue à celui qui légitime l'existence du système capitaliste chez les libertariens, c'est-à-dire un certain genre d'équivalent à la <i>« propriété de soi »</i> ou au <i>« droit naturel »</i> (certaines lesbiennes radicales semblent d'ailleurs penser que le droit de recourir à des dons anonymes serait doté d'une sorte d'existence objective). </span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">De façon alternative, on aura aussi droit à une rhétorique du type <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Race_to_the_bottom"><i>« race to the bottom »</i></a> appliquée
cette fois-ci aux droits de l'enfant. </span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">Paradoxalement (ou pas), les lesbiennes radicales en question semblent d'un coup beaucoup moins <i>« libérales »</i> lorsqu'il s'agit de légaliser les tests ADN en France.</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- les arguments communautaristes ou relativistes : certaines lesbiennes radicales prétendent que l'anonymat ferait partie du <i>« mode de vie »</i>, de <i>« l'idéologie »</i> ou de la <i>« vision du monde »</i> lesbienne. Bien évidemment, c'est complètement faux, et cet amalgame est tout à la fois essentialiste, dangereux et lesbophobe. Paradoxalement, l'idée
que la levée de l'anonymat serait intrinsèquement homophobe
s'appuie précisément sur ce genre d'amalgame.</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">- les arguments périphériques, liés
à la culture politique habituelle de chaque camp. Il est vrai qu'en règle générale, et surtout en France, la droite
accorde davantage d'importance à la biologie que la gauche. Néanmoins, il ne s'agit que d'une tendance, et ce n'est pas ce qui différencie
fondamentalement les deux camps.</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">On
serait bien en peine de trouver un <i>« vrai »</i> argument de gauche (au sens d'argument qui ferait </span><span style="font-family: times; text-align: left;">précisément</span><span style="font-family: times; text-align: left;"> </span><span style="font-family: times; text-align: left;">intervenir un enjeu de lutte contre les discriminations), dans le
tas, et pour cause : il n'y en a pas.</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times; text-align: left;">De
plus, si la tendance actuelle nous indique quelque chose, c'est que,
loin de constituer un progrès en soi, l'anonymat serait en réalité
plutôt une <i>« voie de garage »</i> de l'Histoire.</span></p>
<p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;">
<span style="font-family: times;">Donc pour résumer, l'anonymisme (y compris même lesbien) n'est ni de droite ni de gauche, tandis que l'anti-anonymisme est de gauche (<a href="https://www.ifop.com/wp-content/uploads/2021/06/118228_Rapport_Ifop_ADFH_2021.06.04.pdf">ou au moins consensuel, droite et gauche confondus</a>) mais peut </span><span style="font-family: times;">parfois</span><span style="font-family: times; text-align: left;"> être instrumentalisé par la droite. Voilà.</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times;">---</span></p><p align="JUSTIFY" style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; orphans: 2; widows: 2;"><span style="font-family: times;">[1]Chez les juifs antisionistes, on trouve parfois l'assertion selon laquelle <i>« le sionisme est pessimiste car il croit que les juifs et les non-juifs ne peuvent pas vivre ensemble » </i>que l'on pourrait ici paraphraser par <i>« l'anonymisme est pessimiste car il croit que les lesbiennes et les hommes ne peuvent pas vivre ensemble »</i>. Voir aussi <a href="https://kingstrapon.medium.com/on-zionism-and-jewish-pessimism-dbbff0a1e108">cet article</a>, très intéressant.</span></p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-68091578583147407892022-06-26T11:22:00.004+02:002022-06-27T16:14:30.249+02:00Le jour où j'ai découvert que j'étais pro-choix (partie 1)<p>En fait, je l'étais déjà, bien sûr, mais je n'étais pas particulièrement militant à ce sujet. Comme vous tous j'espère, j'ai été profondément choqué de la décision de la cour suprême américaine de dé-constitutionnalisation du droit à l'avortement, ouvrant la voie à l'interdiction de celui-ci par les états membres. Cela m'a rendu triste, alors même que je ne serai jamais vraiment directement touché ni impacté par cette décision.</p><p>Peut-être les juges avaient-ils raison, sur un plan strictement constitutionnel ou légal. Je n'en sais rien, je ne suis pas juriste. Ce que je sais, en revanche, c'est que cette décision aura des conséquences désastreuses, voire effroyables, pour des millions de femmes à travers le pays. C'est ce droit que la cour suprême vient de balayer d'un revers de la main, avec une si froide et impardonnable désinvolture.</p><p><i>Roe v Wade</i> était une décision révolutionnaire, outrageusement en avance sur son temps, peut-être trop, même. Elle est en effet plus libérale que la plupart des législations européennes (mais j'aurai l'occasion d'en reparler). Cette décision ne pouvait qu'entrer en conflit avec la religiosité profonde d'une grande partie du pays, et attiser la rancœur de toute une partie de la population, qui y a vu la main du diable et le pouvoir des élites. </p><p>Cette décision a engendré, à terme, un puissant ressentiment dans une toute une catégorie de la population, qui s'est sentie dépossédé du pouvoir. Certes, ces personnes ne représentent pas la majorité de la population américaine, mais ils forment un lobby extrêmement puissant, doté d'une détermination et d'un acharnement quasi-monomaniaques.</p><p>Quoi qu'ils en disent par ailleurs, ce n'est certainement pas pour des raisons humanistes qu'ils veulent interdire l'avortement (sinon, il n'auraient pas soutenu pendant quatre ans un président ouvertement fasciste, et incapable de dissimuler qu'il souhaitait interdire l'avortement pour des raisons purement et bassement misogynes) et bien davantage par dogmatisme religieux.</p><p>Certains états américains du Sud et du Centre du pays ont d'ailleurs d'ores et déjà mis en place des interdictions moyenâgeuses, plus restrictives que dans la plupart des pays du tiers-monde <a href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/a5/Abortion_Laws.svg">(non, je n'exagère même pas !)</a></p><p>On ne réalise pas la chance que l'on a, en France, de vivre dans un pays où l'avortement est légal à la demande jusqu'aux 14 semaines de grossesse, où la majorité de la population est favorable à la constitutionnalisation de ce droit et où l'on n'habite qu'à quelques centaines de kilomètres de pays aux délais plus généreux que le nôtre.</p><p><br /></p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-33041778115130421422022-01-29T16:59:00.066+01:002022-03-11T19:18:10.450+01:00Anonymisme et anti-anonymisme<p style="text-align: justify;">En termes de droits reproductifs, de dons de gamètes et d'accès à la procréation médicalement assistée, on peut distinguer globalement deux types de positions : l'anonymisme et l'anti-anonymisme[1] :</p><p style="text-align: justify;"><b>L'anonymisme</b></p>
<p style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">
Au sens large, l'anonymisme désigne toute idéologie qui défend la
possibilité légale de dons de gamètes et/ou d'accouchements
anonymisés. Les anonymistes défendent des actes de naissance qui ne
reflètent que la parenté sociale et n'indiquent pas l'identité des
parents biologiques. De plus, iels tendent à s'opposer à ce que les
donneurs de sperme soient considérés comme une sorte de « père »,
y compris dans le seul sens de « père biologique ».</p>
<p style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">
Les anonymistes sont eux-mêmes divisés en deux camps principaux :</p>
<p style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">
D'un côté, l'anonymisme « strict » défend la possibilité de dons de
gamètes entièrement anonymes, sans possibilité d'accès à
l'identité du donneur ou de la donneuse même après la majorité de
l'enfant. En France, ce courant est représenté par les <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/les-arguments-fallacieux-des-gouines.html">Gouines contre Nature</a>, les <a href="https://blogs.mediapart.fr/soignantespourlapma/blog/310521/pma-pour-toutes-les-soignantes-sengagent?utm_source=facebook&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-66">SoignantEs pour la PMA</a>, la <a href="https://ineakis.blogspot.com/2021/05/marche-lesbienne-ayons-un-peu-de-recul.html?m=0">Marche lesbienne</a>,
<a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/08/acces-aux-origines-lopposition-de-gauche.html">les députés PCF, Jean-Luc Mélenchon, Daniel Borrillo et Morgane Merteuil</a> notamment (il y en a aussi à droite, peut-être même
encore davantage qu'à gauche, mais étant donné qu'ils s'opposent à
l'élargissement de la PMA, ils n'entrent pas dans le cadre de la présente analyse).</p>
<p style="font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal;">
Au sein de ce courant, on peut distinguer les « pragmatiques »
favorables à l'accès aux antécédents médicaux, au double-guichet
et/ou à la légalité des tests ADN récréatifs (</span><i>L<a href="https://www.lecinemaestpolitique.fr/starbuck-les-genes-ya-que-ca-de-vrai/">e cinéma est politique</a></i>, la frange « modérée » des anonymistes stricts sur Twitter ou Daniel Borrillo,
par exemple[2]) des « ultra-strict-e-s », qui s'y opposent. Ce dernier
courant est devenu très rare à l'heure actuelle, en dehors de
(possiblement ?) Morgane Merteuil et de<a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/y-aurait-il-bel-et-bien-un-integrisme.html" style="font-style: normal;"> la frange « dure » du lesbianisme politique</a>. </p>
<p style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">
Les « ultra-strict-e-s » considèrent qu'en matière de
procréation, le droit de disposer de son propre corps doit être
considéré comme absolu ; cependant, cet attachement affiché à la
« libre disposition de son corps » peut être mis en doute, dans le
sens où iels s'opposent à la légalisation des tests ADN et même,
généralement aussi, au double guichet (ou ne font, au mieux, que le
tolérer lorsqu'il existe). Iels considèrent aussi que le « récit
biologique » doit être combattu à tout prix, peu importe les
conséquences physiques ou psychologiques pour les enfants, en prônant
le nivellement par le bas en termes d'accès aux antécédents
médicaux, au prétexte que ceux-ci ne pourraient être garantis
ailleurs non plus. Au final, la façon dont les « ultra-strict-e-s »
utilisent le slogan « mon corps mon choix » a paradoxalement plus à
voir avec la façon dont les anti-vax ont récupéré ce slogan
qu'avec la façon dont celui-ci était traditionnellement utilisé
par le mouvement féministe.</p>
<p style="font-style: normal; font-weight: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">
De l'autre côté, l'anonymisme « moderne » ou « modéré » (ou encore « originiste », l'originisme comprenant aussi l'anti-anonymisme) promeut un anonymat
temporaire des dons de gamètes, généralement jusqu'aux 18 ans de
l'enfant. En France, cette position est notamment défendue par
<a href="https://adfh.net/lassociation/nos-revendications/">l'ADFH</a>, <a href="http://www.inter-lgbt.org/presentation/nos-revendications/">l'Inter-LGBT</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Caroline_M%C3%A9cary">Caroline Mécary</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Martine_Gross">Martine Gross</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ir%C3%A8ne_Th%C3%A9ry">Irène Théry</a> et
<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043884384">le gouvernement</a>, avec plusieurs divergences toutefois. Le <a href="http://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-XML2HTML-EN.asp?fileid=27680#:~:text=anonymity%20should%20be%20waived%20for,and%20oocytes%20should%20be%20prohibited.&text=The%20donor%20should%20receive%20appropriate,and%20their%20gametes%20are%20used.">conseil de l'Europe</a> défend aussi cette position</p>
<p style="font-style: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-weight: normal;">Les
anonymistes « ultra-strict-e-s » (et même, généralement aussi,
les « strict-e-s pragmatiques ») considèrent l'anonymisme « moderne » comme étant une forme d'anti-anonymisme déguisé et donc intrinsèquement misogyne et lesbophobe, parce qu'iels le
voient comme un moyen d'insérer symboliquement des hommes dans les
familles de lesbiennes. Cependant, il va de soi que les enfants n'ont
nullement l'obligation de protéger la façon dont leurs parents
envisagent leur famille (et penser le contraire permettrait de
justifier n'importe quel genre de dérive familialiste, y compris
réactionnaire) : de fait, l'anonymisme « ultra-strict » (et, dans
une moindre mesure, tous les autres types d'anonymisme, y compris
moderne) n'est plus une position tenable depuis la démocratisation
des tests ADN récréatifs, malgré leur interdiction en France.</span></p>
<p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-weight: normal;">Quoi
qu'il en soit, l'idée que l'anonymisme moderne serait
intrinsèquement lesbophobe est une position très minoritaire, même si
certaines personnes LGBT restent inquiètes par rapport à la quantité de
donneurs disponibles en cas de « levée de l'anonymat », <a href="https://ilga-europe.org/blog/6-things-you-didnt-know-about-rainbow-family-rights-europe">et penchent donc vers des positions anonymistes strictes en conséquence</a>.</span></p>
<p style="font-style: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><b>L'anti-anonymisme</b></p>
<p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-weight: normal;">De
l'autre côté, l'anti-anonymisme est l'idéologie qui s'oppose à
l'anonymisme. Les anti-anonymistes considèrent qu'une procréation
médicalement assistée ne devrait avoir lieu qu'avec des donneurs dont l'identité serait disponible dès la naissance de l'enfant, </span>et iels prônent généralement l'utilisation du terme « père biologique » (voire, dans certains cas, « père » tout court) pour désigner le donneur de sperme.</p><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-weight: normal;">On peut diviser ce courants entre :</span></p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-weight: normal;">- les anti-anonymistes « réformistes », ou « modérés », qui promeuvent, à moyen terme, des réformes d'inspiration « anonymiste-moderne » (établissement d'un âge pour l'accès aux origines, puis abaissement progressif de ce dernier, au lieu d'une abolition immédiate de l'anonymat)</span>, et ne sont pas favorables à des actes de naissance qui inscriraient l'identité des parents biologiques de l'enfant en plus de celle de ses parents sociaux. En général, iels ne prônent pas activement l'utilisation de l'expression « père biologique » (même s'iels peuvent l'utiliser, à titre personnel, pour désigner leur géniteur).</p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">- les anti-anonymistes « simples » ou « classiques » qui font activement campagne pour que l'identité du donneur soit accessible dès la naissance de l'enfant et/ou inscrite sur son acte de naissance, mais qui considèrent que le donneur n'est pas obligé de former une relation avec son enfant biologique dès ce moment-là. Iels cherchent à normaliser l'usage de l'expression « père biologique », mais sans la confondre ni la remplacer par celle de « père » tout court.</p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">- les anti-anonymistes « radicaux » ou « absolus » qui considèrent que l'enfant doit pouvoir former dès sa naissance une relation avec son donneur, et que l'identité de ce dernier doit être systématiquement inscrite sur l'acte de naissance de l'enfant, en vertu d'une interprétation très stricte de l'article 7.1 de la Convention internationale des droits de l'enfant (« <i>L'enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a dès celle-ci le droit à un nom, le droit d'acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux » </i>avec une définition de <i>« parent »</i> qui fait aussi référence aux parents biologiques). Ce sont d'ardent-e-s défenseurs de la formule « père biologique » et iels ont parfois tendance à confondre celle-ci avec celle de « père » tout court.</p><p style="font-style: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">L'anti-anonymisme, surtout sous sa forme « radicale », est une idée plus controversée que l'anonymisme moderne. Elle est considérée comme beaucoup plus délicate à défendre sur le plan politique et, sauf sous sa forme la plus « réformiste », susciterait certainement une levée de boucliers massive, immédiate et générale de la part des parents d'intention, des donneurs, des banques de sperme et des personnalités politiques.</p><p style="font-style: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">De leur côté, les personnes LGBT seraient (quasiment ?) unanimes à considérer l'anti-anonymisme « radical » comme une forme d'homophobie, puisque cette idéologie impose aux lesbiennes de devoir relationner directement avec des hommes pour procréer (fût-ce sans relations sexuelles directes), impose littéralement la présence de ces derniers dans leurs familles (ne serait-ce que par la présence de leur nom sur l'acte de naissance de leurs enfants), leur nie leur droit à vivre selon leur propre conception de la famille, même à titre temporaire, vide de son sens la notion d'homoparentalité dans le cadre d'une PMA et même la notion de choix de l'enfant, ne laissant à ce dernier aucun choix dans le fait de continuer à adhérer ou non à l'idéologie lesbienne-politique de ses parents lorsqu'elle existe, puisqu'il ne lui sera pas possible de grandir dans celle-ci.</p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">Néanmoins, <a href="chrome-extension://efaidnbmnnnibpcajpcglclefindmkaj/viewer.html?pdfurl=https%3A%2F%2Fwww.ifop.com%2Fwp-content%2Fuploads%2F2019%2F06%2F116-446_Rapport_Ifop_ADFH_2019.05.24Don.pdf&chunk=true">d'après un sondage datant de 2019</a>, environ un quart des personnes homosexuelles partageraient des positions anti-anonymistes au sens large[3], une proportion largement comparable (voire supérieure) à celle de la population générale.</p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal;">Malgré cela, les anti-anonymistes déclarés semblent peu nombreux en France, et sans véritable organisation politique. On peut notamment citer </span><a href="https://www.lemonde.fr/blog/jprosen/">Jean-Pierre Rosenczveig</a>, magistrat et expert des droits de l'enfant, hostile à l'accouchement sous X et partisan de l'accès à l'identité du donneur le plus tôt possible dans le cas d'un don de gamètes. C'était autrefois un anti-anonymiste « radical », aujourd'hui il serait plutôt « réformiste ».</p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">Contrairement à ce qu'on pourrait penser, l'association <i><a href="https://pmanonyme.asso.fr/">PMAnonyme</a></i> n'est pas à strictement parler anti-anonymiste, mais anonymiste moderne (à moins de la considérer comme « anti-anonymiste réformiste », puisque, de fait, l'immense majorité de ses membres et de ses sympathisant-e-s le sont).</p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">Ils sont plus nombreux dans d'autres pays, à cause des différences en termes de contexte politique. On peut notamment citer la <i><a href="https://www.donorconceivedalliance.ca/">Donor Conceived Alliance of Canada</a></i> et le <i><a href="https://donorsiblingregistry.com/">Donor Sibling Registry</a></i>, qui sont tous deux, en pratique, des organisations « anti-anonymistes réformistes » (bien que philosophiquement, ce soient davantage des « anti-anonymistes classiques » <a href="https://twitter.com/sarahdingle_/status/1455104563673853952/likes">exprimant</a> <a href="https://donorsiblingregistry.com/blog/the-donor-conceived-bill-of-rights">parfois</a> des sympathies pour la branche « radicale » du mouvement ; autrement, la première se situe davantage sur le plan politique et le second davantage sur le plan social et associatif). Le <i>Donor Sibling Registry</i> est d'ailleurs notable pour ses efforts, indéniables et continus, visant à favoriser les échanges et la communication avec le mouvement LGBT, bien que ses objectifs finaux (<a href="https://donorsiblingregistry.com/blog/the-donor-conceived-bill-of-rights">position stricte anti-anonymat, réforme des actes de naissance, langage utilisé</a>) le situent dans le courant anti-anonymiste.</p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">Encore aujourd'hui, <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/acces-aux-origines-linstrumentalisation.html">les relations qu'entretiendraient certains mouvements anti-anonymistes avec des lobbies réactionnaires</a> <a href="https://ineakis.blogspot.com/2021/11/lhomophobie-dans-le-mouvement-des.html">et homophobes</a> restent un sujet de controverse. Je pense que pour en avoir le cœur net, il est avant tout essentiel de s'intéresser à la <i>rhétorique</i> de ces mouvements : s'ils font de réels efforts pour promouvoir la diversité des modèles familiaux et pour dialoguer avec la communauté LGBT, il n'est pas possible de leur accoler le qualificatif d'« homophobe ». Si, en revanche, la question est au minimum esquivée, cela devrait inciter à davantage de prudence, voire de méfiance.</p>
<p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-weight: normal;">Prenons<i style="font-style: normal;"> </i><i><a href="http://www.tangledwebs.org.uk/">Tangled Webs UK</a></i></span><span style="font-style: normal; font-weight: normal;">, un site web anglais anti-PMA[4] (et donc, par extension, anti-anonymiste « radical »), par exemple : non seulement celui-ci esquive entièrement la question LGBT, <a href="http://www.tangledwebs.org.uk/tw/WhyWrong/Problems/">mais il considère les donneurs de sperme comme des pères à part entière</a>, <a href="http://www.tangledwebs.org.uk/tw/WhyWrong/ArgumentsInFavour/">et même comme les « vrais » pères</a> (sans même parler de « père biologique ») et s'inscrit totalement dans une vision <a href="https://www.google.fr/books/edition/Conceiving_People/wfk-EAAAQBAJ?hl=fr&gbpv=1&dq=conceiving+people&pg=PA24&printsec=frontcover">bionormative</a> de la famille.</span></p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;"><a href="https://thembeforeus.com/letter-to-albanian-parliament/">Si l'association en question considère les hommes et les femmes comme différents et non-interchangeables dans le cadre de la famille</a>, c'est encore pire, puisqu'on a alors affaire à une association explicitement anti-homoparentalité, donc homophobe.</span></p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;">Néanmoins, même dans le cas d'organisations supposées </span><span style="font-weight: normal;"><i>safe</i></span><span style="font-style: normal; font-weight: normal;">, il est nécessaire de faire preuve de vigilance, <a href="https://donorsiblingregistry.com/blog/questions-and-answers-with-wendy">puisqu'on n'est jamais à l'abri d'une collaboration même ponctuelle avec un groupement que l'on sait explicitement réactionnaire</a>. Cela ne signifie pas abandonner ces organisations pour autant, mais au minimum leur poser des questions sur les points qui nous apparaissent problématiques, le moment venu.</span></p><p style="margin-bottom: 0cm;"></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/a/AVvXsEhhz83bh8erWQXauibxLpmzgaSBy4eKEhHT1ikpyoTQgpU8qKyxNMAcwPcDlCM_3nJghuibKYUzhSmsZIrIC_pZuiUbUPh0li9Nwn8erA68MQaKe5RI6HoJYqC62kmSHcLgeJ9z0PKnrLYqOFifdLmW_oN-SIfwgxxBsz1yGeKkdPGxGiRKPS_gDQ=s1200" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="800" data-original-width="1200" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/a/AVvXsEhhz83bh8erWQXauibxLpmzgaSBy4eKEhHT1ikpyoTQgpU8qKyxNMAcwPcDlCM_3nJghuibKYUzhSmsZIrIC_pZuiUbUPh0li9Nwn8erA68MQaKe5RI6HoJYqC62kmSHcLgeJ9z0PKnrLYqOFifdLmW_oN-SIfwgxxBsz1yGeKkdPGxGiRKPS_gDQ=s320" width="320" /></a></div><div style="font-style: italic; text-align: center;"><i>Diagramme représentant les différentes tendances chez un échantillon de 481 personnes conçues par don anglophones en 2020, extrapolées à partir de <a href="https://www.wearedonorconceived.com/2020-survey-top/2020-we-are-donor-conceived-survey/">ce sondage</a> (cliquer sur l'image pour la voir en plus grand). Notez que même chez les anonymistes « strict-e-s » (rouge et orange), moins du quart le seraient par conviction (beaucoup souhaitant en réalité pouvoir retrouver l'identité de leur donneur). Par ailleurs, il ne semble exister aucun-e anti-régulationniste de conviction parmi les sondé-e-s.</i></div><div style="font-style: italic; text-align: center;"><i><br /></i></div><div style="text-align: justify;">Pour information, j'ai aussi fait un tableur qui détaille les différences entre chacun des courants sur telle ou telle question, si jamais vous êtes intéressé-e-s.[5]</div><span style="font-style: normal; font-weight: normal;"><br /></span><p></p><p style="margin-bottom: 0cm;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;">-----</span></p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;">[1]on peut aussi considérer que ces deux positions sont relatives et forment un spectre allant de l'anonymisme « ultra-strict » à des positions anti-PMA.</span></p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;">[2]Daniel Borrillo est peut-être</span> davantage anti-régulationniste que pragmatique, en réalité. L'anti-régulationnisme est un courant dont les positions sur la question sont globalement libertariennes (possibilité de paiement des donneurs, double guichet, pas de limitation légale concernant le nombre d'enfants issus d'un seul don de gamètes, pas de règlementation concernant l'accès aux antécédents médicaux ni l'accompagnement des patients et des donneurs, mais légalité des tests ADN).</p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;">[3]en fait, d'après ce sondage, les personnes homosexuelles seraient plus nombreuses à être anti-anonymistes (26 %) qu'anonymistes strictes (21 %) ! Des proportions nettement inverses de celles des personnes n'ayant aucun homosexuel dans leur entourage (19 % et 31 %, respectivement).</span></p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;"><span style="text-align: left;">[4]En théorie, il serait possible de s'opposer à la PMA sans être homophobe mais, pour l'instant, je n'ai jamais vu ni rencontré de personnes totalement opposées à la PMA et qui n'étaient pas au moins un peu, ne serait-ce qu'insidieusement homophobes. La PMA est l'une des seules façons pour les lesbiennes d'avoir des enfants ; si on l'interdisait, la seule façon pour elles d'avoir des enfants dont la parenté sociale serait reconnue serait de passer par l'adoption, qui offre des possibilités beaucoup plus limitées en comparaison. L'argument de la nécessaire unité du lien biologique et du lien affectif me paraît difficilement tenable autrement que par pure référence religieuse, et cet argument semble de toute façon contredit par une majorité de personnes concernées elles-mêmes. Si l'objectif est réellement de permettre aux enfants de maximiser la connaissance de leurs origines biologiques, pourquoi ne pas « juste » proposer de recourir exclusivement à des donneurs connus, ouverts à la possibilité d'une relation </span></span><span style="text-align: left;">avec l'enfant, et dont le nom serait inscrit sur l'acte de naissance de l'enfant au même titre que celui de ses parents sociaux ? Ce serait une proposition déjà suffisamment radicale en soi, si bien que je ne me vois pas la défendre dans l'immédiat (ne serait-ce parce que cela évacuerait presque entièrement la notion de choix de l'enfant).</span></p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;"><span style="text-align: left;">[5]Celui-ci se trouve sur mon drive pour le moment. Je le mettrais ici lorsque j'aurais le temps.</span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-style: normal; font-weight: normal;"><span style="text-align: left;"><br /></span></span></p>
<p style="font-style: normal; margin-bottom: 0cm; text-align: justify;"><br /></p>
<p style="font-style: normal; margin-bottom: 0cm;"><br /></p>
<p style="font-style: normal; margin-bottom: 0cm;"><br /></p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-16587281220340952012021-11-04T14:41:00.024+01:002022-01-29T18:19:07.458+01:00L'homophobie dans le mouvement des personnes conçues par don<p><b>Comment la pensée extrême et la désinformation ont obscurci des questions légitimes autour du don de gamètes</b></p><p>Il y a déjà plus de deux ans maintenant, j'avais écrit un article sur l'<a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/acces-aux-origines-linstrumentalisation.html">instrumentalisation conservatrice de l'accès aux origines en Amérique du Nord</a>, certaines figures associées (de façon <i>extrêmement</i> périphérique) au mouvement, comme <a href="https://thembeforeus.com/author/kfaust/">Katy Faust</a>, se caractérisant par une homophobie virulente et des positions réactionnaires assumées. Je ne reviendrai là-dessus.</p><p>Au-delà de ces formes flagrantes de préjugé, le mouvement des personnes conçues par don est un mouvement légitime, qui grandit chaque jour en importance et qui se bat depuis des années pour interdire l'anonymat des donneurs, avec une dynamique politique très favorable dans l'ensemble, que ce soit en Europe ou en Australie.</p><p>Malgré cela, l'anonymat reste encore très répandu dans de nombreux pays. Pour les parents, il y a plusieurs raisons qui peuvent expliquer le recours à un donneur anonyme : la disponibilité d'un certain profil de donneur, le sentiment de sécurité juridique, mais le plus souvent c'est la facilité d'accès qui jouera un rôle déterminant. Il y a aussi des raisons idéologiques, certaines lesbiennes le considérant comme nécessaire pour ne pas faire entrer d'homme ni de <i>« figure paternelle »</i> dans leur famille (bien sûr, avec la démocratisation des tests ADN bon marché, cet anonymat est devenu plus symbolique qu'autre chose, ce qu'elles n'ont pas toutes l'air de réaliser).</p><p>Bien que la pratique de l'anonymat soit en déclin parmi les populations LGBT elles-mêmes et que beaucoup d'entre elleux aient soutenu l'accès aux origines lors de la dernière révision des lois de bioéthique en France, la plupart des mouvements de personnes conçues par don n'ont que très peu de liens avec les mouvements LGBT.</p><p>Encore aujourd'hui, dans de nombreux pays, l'anonymat des dons de gamètes reste un sujet relativement tabou, ce qui a pu amener certaines personnes à faire dévier le mouvement vers l'extrémisme, en particulier en ligne. Aux États-Unis, par exemple, faute de discipline et d'organisation (contrairement à ce qui s'est passé dans d'autres pays), le mouvement est devenu une espèce de terreau fertile pour l'homophobie, la misogynie, le traditionalisme et la désinformation, qui menacent de saper les nécessaires échanges autour des techniques d'aide à la procréation, et de l'anonymat des donneurs en particulier.</p><p>Lorsque j'ai commencé à m'intéresser à la question, j'ai très vite été conscient de l'homophobie présente sur les médias sociaux, sur certains réseaux de personnes conçues par don.</p><p>On peut par exemple citer <a href="https://www.thepublicdiscourse.com/2012/09/6459/">cet article</a>, écrit par <a href="https://www.thepublicdiscourse.com/author/alana-s-newman/">Alana S. Newman</a>, qui assimile les homosexuels ayant recours aux mères porteuses à des <i>« prédateurs sexuels »</i> en les considérant comme tout aussi dangereux pour les femmes que les proxénètes ou même les violeurs hétérosexuels. En tant qu'opposant à l'anonymat des donneurs de gamètes et partisan d'une GPA éthique et non-commerciale, je me suis souvent retrouvé exposé à des idées qui tombent dans la <i>« zone grise »</i> de ce que certaines personnes pourraient considérer comme homophobe et d'autres non. Cet article en sort très clairement. Il contient des passages tellement homophobes et réactionnaires qu'il ne devrait plus y avoir de débat possible à ce sujet.</p><p>On pourrait se dire qu'il ne s'agit que d'un point de vue marginal dans la communauté (et il l'est effectivement, de plus en plus) mais malheureusement, je suis forcé de constater qu'à part un vague engagement envers la diversité des modèles familiaux, les mouvements de personnes conçues par don, en général, s'engagent peu contre l'homophobie et prennent peu position à ce sujet. Certains mouvements semblent peu conscients de l'impact que leurs revendications, qui vont parfois bien au-delà de la levée de l'anonymat aux 18 ans de l'enfant pour inclure le droit à être élevé dès la naissance par ses parents biologiques (bien que cette dernière revendication ne soit pas nécessairement homophobe en elle-même), pourraient avoir sur les populations LGBT. </p><p>On a aussi des personnes qui citent en référence <a href="http://AnonymousUs.Org">AnonymousUs.Org</a> (un site web conçu par Alana Newman et qui regroupe des témoignages <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/contre-linstrumentalisation-des.html">dont certains ont été instrumentalisés contre l'homoparentalité</a>), sans au minimum prendre leurs distances vis-à-vis de ses fondateurs ; ou qui relaient des liens vers des articles parus sur des sites plus que douteux, sans esprit critique ; ou qui considèrent l'<a href="https://eclj.org/?lng=fr">ECLJ</a> comme un organisme de défense des droits humains, alors qu'il s'agit avant tout d'un lobby chrétien ultra-conservateur qui ne fait qu'instrumentaliser la question ; ou qui, malgré leur engagement par ailleurs progressiste, <a href="https://donorsiblingregistry.com/blog/questions-and-answers-with-wendy">se font interviewver par l'équivalent américain</a> d'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aude_Mirkovic">Aude Mirkovic</a>.</p><p>Je ne pense pas qu'une personne de bonne volonté, qui dénonce l'homophobie, le racisme, le sexisme, puisse se sentir parfaitement à l'aise avec un mouvement qui, dans le meilleur des cas, n'est pas toujours très bien informé, très au clair ni très prompt à dénoncer les tentatives de récupération dont il fait l'objet, et qui, dans le pire des cas, ne montre absolument aucune sensibilité à ces questions et laisse pleinement s'exprimer ces préjugés sans aucune réaction officielle.</p><p>Ce mouvement ne vient pas de nulle part. Découvrir qu'on a été conçu par don peut engendrer une certaine forme de colère et de mal-être, y compris chez des personnes qui, autrement, sont plutôt privilégiées (attention toutefois, toutes les personnes conçues par don ne sont pas privilégiées, loin de là). Et les personnes privilégiées, surtout les hommes, ne sont pas censées se plaindre de leur position. On comprend dès lors mieux que cette colère puisse se transformer en colère mal placée, avec recherche du bouc émissaire, y compris pour certains enfants dont les parents sont elleux-mêmes LGBT.</p><p>Cependant, de par les conversations que j'ai pu avoir avec certaines personnes conçues par don, leur colère se dirige davantage à l'encontre des médecins, de l'État ou du <i>« système »</i> (et aussi de l'industrie et du profit que celle-ci engendre, dans une perspective nord-américaine) qu'envers un groupe défini par l'orientation sexuelle de ses membres. Les associations de personnes conçues par don revendiquent de nombreux membres LGBT ou issus de familles homoparentales dans leurs rangs. Après tout, il serait plutôt homophobe d'accorder aux homosexuels un statut particulier sur la question.</p><p><b>Addendum</b> : en guise de mise au point, je dirais que la plupart des choses que j'ai citées dans cet article ne s'appliquent pas aux associations françaises de personnes conçues par don, qui, de par un contexte politique très différent du contexte nord-américain, sont au contraire très vigilantes par rapport à l'homophobie et très promptes à la dénoncer, par exemple lorsqu'un membre de <i>PMAnonyme</i> <a href="https://twitter.com/vinznojutsu/status/1276039994340188163">a relayé sur Twitter</a> <a href="https://www.lefigaro.fr/vox/politique/tenus-par-une-dette-existentielle-les-enfants-nes-par-pma-n-osent-pas-reclamer-leurs-droits-20200622">un article écrit par un proche de la<i> Manif pour Tous</i></a> et a dû <a href="https://twitter.com/vinznojutsu/status/1276050217897545729">s'en excuser par la suite</a>.</p><p>Ce que j'ai écrit dans cet article ne doit pas non plus faire oublier que la violence rhétorique existe aussi de l'autre côté, et que dans la twittosphère francophone, celle-ci est infiniment plus intense que celle des personnes conçues par don (et encore, celle-ci n'émerge généralement qu'en réaction à des commentaires particulièrement insultants ou méprisants) pour en avoir été témoin moi-même, ces dernières années.</p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-52911065345058570452021-10-20T16:53:00.006+02:002022-02-16T19:11:50.817+01:00"The Parent Trap" - débunkage<p>Au cours de mes pérégrinations sur Internet, je suis récemment tombé sur <a href="https://reallifemag.com/the-parent-trap/">un article</a> écrit par les actives Alexandra Kimball et Tamara Lea Spira pour le compte du site <a href="https://reallifemag.com/"><i>Real Life Mag</i></a>. De par les quelques articles que j'ai pu parcourir en naviguant dessus, le site semble globalement se doter d'une orientation <i>« </i><i>technophobe de gauche</i><i> » </i>(ce qui pourrait expliquer certaines bizarreries, que je commenterai après), mais on peut y trouver des articles intéressants.</p><p>Celui-ci s'intitule <i>« le piège parental : comment les tests ADN compliquent la famille queer » (The Parent Trap: How DNA testing complicates the queer family)</i>. À lui seul, ce titre résume assez bien un sentiment que j'ai souvent pu déceler chez les lesbiennes radicales de Twitter, à savoir que les tests ADN seraient dangereux et menaceraient leur conception de la famille.</p><p>À vrai dire, <a href="https://reallifemag.com/the-parent-trap/">cet article-ci</a>, écrit en réponse par une personne conçue par don, apporte déjà beaucoup d'objections qu'on pourrait apporter à cet article. Mais il y a aussi d'autres points que j'aimerais aborder..</p><p>Le premier point que j'aimerais soulever, c'est que cet article exprime un point de vue que je qualifierais volontiers, quoiqu'assez paradoxalement, de <i>conservateur</i> par rapport aux évolutions en cours au sein de la communauté LGBT. En effet, toute son introduction prend la forme d'une espèce de longue tirade, déplorant le recul de l'idéologie <i>queer</i> à l'ancienne, du <i>« Love makes a family »</i> parmi les populations LGBT elles-mêmes. </p><p>L'article attribue ce processus à un <i>« tournant biogénétique »</i> qui aurait lieu à l'échelle de la société toute entière. De prime abord, il semble difficile de réfuter cette assertion, mais je dirais que ce n'est pas là que se trouve le plus important.</p><p>(En réalité, je pense que cette évolution doit moins au <i>« tournant biogénétique »</i> qu'à l'arrivée d'une nouvelle génération qui rompt d'avec la tradition et réinterprète à sa façon ce que cela signifie que d'être <i>queer</i>. On peut trouver des éléments d'explication dans <a href="http://ineakis.blogspot.com/2019/09/sopposer-lanonymat-des-donneurs-de.html">cet article-ci</a>.)</p><p>Je ne reviendrai pas sur l'homme de paille tournant autour de l'importance attribuée à la génétique (personne ou presque ne pense que la génétique est plus importante que tout le reste), même si, sans grande surprise, l'article condamne le fait d'essayer de trouver une base biologique à l'homosexualité ou à la transidentité.</p><p>Sans grande surprise non plus, l'article n'échappe pas aux clichés rhétoriques les plus répandus chez les <i>« pro-anonymat de gauche »</i>, à savoir le déshonneur par association (dès qu'on parle de génétique, autant parler tout de suite d'eugénisme, de racisme et de surveillance génétique des migrants, par exemple, ce qui équivaut un peu à qualifier toute personne pro-énergie nucléaire d'être pour la bombe atomique). Le point <i>« Manif pour Tous »</i> est même atteint peu après, avec l'évocation des liens supposés entre le mouvement des personnes conçues par don et des lobbies conservateurs tels que le <i>Center for Bioethics and Culture</i>.</p><p>(Pour ceux qui ne connaîtraient pas, le <a href="https://www.cbc-network.org/">CBC</a> est un peu l'équivalent américain de <a href="https://www.genethique.org/pma-la-dette-de-la-vie/">Gènéthique</a> ou de l'<a href="https://www.alliancevita.org/">Alliance Vita</a> : une source parfois citée par les activistes des droits des personnes conçues par don, notamment à cause d'articles qui vont dans leur sens, mais en lien étroit avec des groupements ultra-conservateurs.)</p><p>Que des activistes pour les droits des personnes conçues par don se compromettent avec ce genre d'organisations est certes déplorable, mais il faut aussi se demander <i>pourquoi</i> cela arrive. Je pense que le CBC et Gènéthique ont saisi une opportunité politique que la gauche, de par ses liens avec les mouvements LGBT, n'était pas encore prête à saisir immédiatement. C'est le même genre de mécanisme qui explique la proximité qu'entretiennent certains ex-musulmans, voire même dans certains cas des musulmans réformistes, avec la droite radicale, par exemple.</p><p>L'article va même encore plus loin, cette fois-ci avec un <i>« déshonneur par association au second degré »</i> impliquant la très conservatrice Bradley Foundation, et dénonce son hypocrisie lorsqu'il s'agit de faire adopter des enfants pauvres de couleur par des blancs évangéliques de classe moyenne.</p><p>Certes, les types de la Bradley Foundation sont des hypocrites... mais, jusqu'à preuve du contraire, leurs liens avec les mouvements de personnes conçues par don ne sont que très ténus et indirects. Et, quoi qu'il en soit, celles et ceux qui prétendent défendre la liberté de de disposer de son propre corps tout en s'opposant aux tests ADN récréatifs sont tout aussi hypocrites.</p><p>Dans l'article, l'expression des revendications des personnes conçues par don est également caricaturale et mal informée. En France, par exemple, <i>PMAnonyme</i> a milité pour l'accès à l'identité du donneur à partir de 18 ans ; elle ne milite pas pour que le donneur soit considéré et reconnu comme un parent dès la naissance de l'enfant (ce qui est sous-entendu dans l'article). Cela permet aux autrices de mettre en avant un faux dilemme : soit le donneur est anonyme, soit il est considéré et reconnu comme parent dès la naissance de l'enfant. C'est pourquoi l'idée selon laquelle la <i>« famille génétique »</i> équivaut à l'idée que <i>« les enfants appartiennent à leurs parents »</i> n'en apparait que d'autant plus étrange : n'est-ce pas l'anonymat des donneurs, plutôt, qui entérine le fait que les enfants appartiennent à leurs parents d'intention ?</p><p>Vers la fin, l'article, qui était jusque là idéologiquement cohérent, prend une direction plus inattendue, se montrant apparemment anti-<a href="http://ineakis.blogspot.com/2020/07/sur-la-ropa.html">ROPA</a>, anti-greffe d'utérus, et anti-appariement racial. </p><p>Pour terminer, l'article déplore la pathologisation des formes de parenté non-exclusives et non-hiérarchiques... Sans se rendre compte que l'anonymat des donneurs et la pathologisation des tests ADN, pris au sérieux, ne peut déboucher que sur la réinvention d'un modèle familial autoritaire, précisément exclusif et hiérarchique. Le point<i> « droits de l'enfant = fascisme »</i> étant là pour clôturer le débat, de façon tout à fait péremptoire, comme si le débat ne portait pas avant tout sur l'autonomie de l'enfant par rapport à ses parents.</p><p><br /></p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-75734374573225991282021-09-16T21:16:00.000+02:002021-09-16T21:16:28.389+02:00En défense de la fille en orange (film Être et avoir)<div><i>Par respect pour la vie privée des personnes, je n'inclurai pas d'images tirées directement du film dans cet article.</i></div><div><i><br /></i></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEghaH3YA4_HANwzF0XOpbzpPGm7vd8Wzp9i8RP3Q5jUDRDWyqf0wFQZ2xG7x8yoc8zuBXWOMgHl6wwxSMmzdttN4Cf1OGaBH5z4aI5P-wos65juxCzn6AUm6IskB-T7PxKO73NM2k9l/s800/affiche.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="800" data-original-width="600" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEghaH3YA4_HANwzF0XOpbzpPGm7vd8Wzp9i8RP3Q5jUDRDWyqf0wFQZ2xG7x8yoc8zuBXWOMgHl6wwxSMmzdttN4Cf1OGaBH5z4aI5P-wos65juxCzn6AUm6IskB-T7PxKO73NM2k9l/s320/affiche.jpg" width="240" /></a></div><br /><div><br /></div><div><i>Être et avoir </i>est un documentaire français réalisé par Nicolas Philibert, datant de 2002. On y suit une classe unique d'école primaire en milieu rural, en Auvergne, assurée par l'instituteur Georges Lopez.</div><div><br /></div><div>Il y a quelque chose qui m'a frappé en regardant à nouveau ce film, 20 ans après ; c'est que, malgré la petite taille de la classe, les enfants qu'on y voit ont tous leurs spécificités propres. Le petit Jojo, <i>« mascotte »</i> malgré lui du film, par exemple, aurait très bien pu être diagnostiqué du TDAH s'il avait vécu aux États-Unis, et aurait donc pu passer la majorité de son enfance sous ritaline. </div><div><br /></div><div>Mais ce n'est pas le seul enfant du film qui a des « particularités ».</div><div><i><br /></i></div><div>En effet, dès le début du film, lors de l'arrivée à l'école sous la neige, on voit une fille vêtue d'orange<i>,</i> marcher de façon très caractéristique, un peu « rigide » (tout comme moi à peu près au même âge, comme j'ai pu m'en rendre compte rétrospectivement), puis, tout au long de ses apparitions dans le film, on peut voir sa posture et sa gestuelle gauches et « disgracieuses », et surtout ses difficultés de communication, apparentes de par son absence de jeu avec les autres enfants et surtout lors d'un passage d'anthologie. </div><div><br /></div><div>Maintenant, je n'aimerais pas coller de diagnostic à l'arrache, mais cela fait beaucoup penser aux symptômes que l'on attribue habituellement au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Syndrome_d%27Asperger">Syndrome d'Asperger</a> (et je le sais, parce que j'ai moi-même été diagnostiqué de cette condition l'année dernière).</div><div><div><br /></div><div>Lors d'une scène avec sa mère, le professeur souligne sa très bonne orthographe mais aussi ses difficultés en mathématiques (ce qui constituerait une preuve, si cela se confirmait, que les Aspies ne sont pas tous bons en maths). Sa mère souligne qu'elle n'est pas très <i>« gaie »</i>, et espère qu'elle le deviendra davantage à l'avenir. Lors de la même scène, le professeur espère la voir s'épanouir davantage. Malheureusement, cette scène est un peu gâchée par le baratin astrologique de la mère à la fin. Les deux personnes souligne de concert qu'<i>«</i> <i>elle vit dans son monde »</i>. </div><div><br /></div><div>C'est une description qui correspond beaucoup à ce que l'on a dit de moi durant ma propre enfance, certes pas exactement dans la même mesure. J'avais l'impression d'être en décalage constant vis-à-vis des autres, mais je pensais que c'était parce que j'étais surdoué, comme je l'ai découvert à l'âge de 10 ans (aujourd'hui, on dirait plutôt <i>« haut potentiel intellectuel »</i>). Plus tard, à l'adolescence, je me suis rendu compte (plus ou moins à mes dépens) que les surdoués n'étaient pas tous maladroits, mauvais en sports ni « asociaux ». </div><div><br /></div><div>Pour de nombreux Aspies non diagnostiqués qui ont grandi à cette époque-là, avec un peu de chance, cette personne est peut-être la toute première fois qu'ils ont pu voir à l'écran quelqu'un qui leur ressemblait (et qui n'était pas un stéréotype à la <i>Rain Man</i>). </div><div><br /></div><div>Néanmoins, avec le recul, certains points posent problème concernant ce film.</div><div><br /></div><div>Notamment, l'obsession que semblent avoir certains documentaristes, dont le réalisateur lui-même, à vouloir montrer des enfants <i>« différents »</i> pleurer devant les caméras (plus récemment encore avec <i><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Petite_Fille_(film,_2020)">Petite fille</a></i> de Sébastien Lifshitz) mériterait grandement d'être interrogée et remise en cause. </div><div><br /></div><div>La scène de discussion entre le professeur et son élève est aussi en cause et illustre un travers fréquent : en effet, quelque soient les bonnes intentions, il ne suffit pas de dire que les choses iront mieux pour qu'elles aillent mieux ; il faut aussi s'engager et chercher les causes du problème. Malheureusement, le neurotypisme extrême de la société française constitue un obstacle à cette démarche-là. </div><div><br /></div><div>Ce qui n'est pas arrangé par le fait qu'avec le temps, je dois le préciser, le film soit devenu extrêmement controversé, pour d'autres raisons : en effet, Georges Lopez a porté plainte pour atteinte à son droit à l'image et revendiquait des droits d'auteur sur le documentaire en tant qu'auteur d'une partie du texte et en tant qu'artiste-interprète du film. S'il sera finalement débouté par la justice, toute cette affaire contribuera néanmoins à jeter un sérieux doute sur les méthodes de travail et la probité de Nicolas Philibert, réalisateur du film, doute qui continuera de planer par la suite jusqu'à aujourd'hui.</div><div><br /></div><div>Il y a aussi du positif dans ce film, bien entendu, mais il est dommage qu'il soit devenu plus difficile de l'apprécier, à cause de toutes ces histoires. </div><div><br /></div><div>En tout cas, je ne sais pas si la fille en orange va bien aujourd'hui, mais j'espère que oui, même si les suites du tournage n'ont pas dû être très faciles à vivre pour elle.</div></div>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-32547970372295956632021-05-25T20:30:00.004+02:002021-12-11T09:39:43.574+01:00"Marche lesbienne" : ayons un peu de recul<p>En ce moment, avec la pandémie en cours, on ne parle plus trop du projet de loi bioéthique, qui prévoit entre autres l'ouverture de la PMA à toutes les femmes, et qui se trimbale depuis au moins 2019 entre le gouvernement et les différentes chambres du parlement.</p><p>Et c'est fort dommage, je trouve ; le Sénat, conservateur comme par son habitude, a tout intérêt à laisser pourrir le projet et à faire obstruction pour que celui-ci soit adopté le plus tard possible, et le moins que l'on puisse noter, c'est que de ce point de vue-là, il n'a pas déçu, si je puis dire[1]. </p><p>En effet, récemment, le Sénat a quasiment sabordé le projet de loi, en le vidant littéralement de sa substance et de ses dispositions les plus importantes. Ainsi, lors de l'examen du texte en deuxième lecture, c'est tout l'article 1 (qui prévoit l'ouverture de la PMA à toutes les femmes) qui a été rejeté.</p><p>Plus tard, et de façon prévisible, la commission mixte parlementaire n'est pas parvenue à se mettre d'accord sur un texte commun, ce qui signifie que le texte aura droit à un passage en troisième lecture à l'Assemblée Nationale.</p><p>De l'autre côté, pour des raisons en partie compréhensibles, vu le contexte actuel, les défenseurs du projet (et/ou celleux qui voudraient aller plus loin) n'ont pas donné beaucoup de voix, jusqu'à maintenant. Celleux-ci semblent eux-mêmes être divisés selon des lignes idéologiques relativement précises (notamment sur l'<a href="https://ineakis.blogspot.com/2014/12/bioethique-lanonymat-des-dons-de-gametes.html">accès aux origines</a> et la <a href="https://ineakis.blogspot.com/2020/01/le-paysage-des-associations-pour-le.html">RCA</a>), ce qui rend <i>de facto</i> quasi-impossible toute défense unifiée d'un projet alternatif, qui serait à la fois plus cohérent et moins <i>« stigmatisant / discriminant »</i> que l'actuel projet (cette division arrange d'ailleurs beaucoup les opposants dudit projet, soit dit en passant).</p><p>C'est donc dans ce contexte qu'un nouveau rassemblement <i>« lesbien »</i> a eu lieu le 25 avril dernier, en particulier à Paris. </p><p>Cet évènement fut un relatif <i>« succès surprise »</i>, tout particulièrement dans le contexte actuel de la pandémie de Covid-19, puisqu'il aura attiré au minimum plusieurs milliers de personnes. En revanche, il aura attiré très peu d'attention médiatique, finalement. </p><p>En ce qui me concerne, mes propres sentiments personnels sur cette marche sont plutôt mitigés.</p><p>D'un certain côté, même si je ne suis pas nécessairement d'accord avec toutes leurs revendications (je détaillerai pourquoi dans la partie d'après), je suis, à vrai dire, extrêmement content que ce genre de marche existe et rencontre même un certain succès, en réalité. Oui, les lesbiennes sont encore trop souvent victimes de discriminations, et oui, les discriminations dans l'accès à la parentalité en font clairement partie. </p><p>De plus, face à un gouvernement qui semble avoir délibérément mis la PMA sous le tapis et laissé traîner le sujet comme un boulet, et à un Sénat qui semble avoir tout fait pour tuer le projet dans l'œuf et l'enterrer, il était plus que nécessaire de réveiller nos chers parlementaires pour qu'ils n'ignorent pas ces revendications et n'oublient pas non plus leurs engagement passés. </p><p>Ce qui me dérange dedans, c'est donc plutôt la rhétorique des organisatrices, leurs possibles motivations, ainsi que le contenu de leurs revendications, une fois qu'on se penche dessus et qu'on les examine plus en profondeur.</p><p>Parce que le diable se cache dans les détails. Même si, si l'on se base sur le texte des interventions lors de la marche, <a href="https://twitter.com/CollagesLesb/status/1386791856294481923">la ligne rouge ne semble pas avoir été franchie</a>, il se trouve qu'en France, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lesbianisme_politique">lesbianisme politique</a> se caractérise <i>dans le meilleur des cas</i> par une ambigüité profonde sur la question de l'accès aux origines, et dans le pire par <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/08/acces-aux-origines-lopposition-de-gauche.html">une hostilité farouche à son encontre</a>. </p><p>De prime abord, <i><a href="https://twitter.com/CollagesLesb">Collages Lesbiens</a></i> (le collectif à l'origine du rassemblement) semble moins explicite que les <a href="http://ineakis.blogspot.com/2019/09/les-arguments-fallacieux-des-gouines.html">Gouines Contre Nature</a> sur certains aspects de son projet et de ses motivations. Il subsiste néanmoins des motifs d'inquiétude importants, d'autant plus que ce mouvement se dote d'ores et déjà d'une assise beaucoup plus large que celle de son <i>« prédécesseur »</i>.</p><p>Passons outre les éléments de langage possiblement <i>« connotés »</i> tels que <i>« PMA sans conditions »</i>, <i>« lesbophobie et transphobie d'Etat »</i> (qui fait écho à la thématique décoloniale du <i>« racisme d'Etat »</i>) ou encore <i>« non mixité » </i>: parfois mobilisés par des organisations respectables, ils ne devraient pas à eux seuls nous alerter.</p><p>C'est plutôt au niveau des revendications que le bât blesse. En effet, dès le début de leur liste de revendications, le 25 mars dernier, on pouvait lire en gras <i><a href="https://pbs.twimg.com/media/ExVx9AKXMAgs-ny?format=png&name=medium">« PMA anonyme par défaut »</a></i>. Plus tard, le 1er avril dernier, elles ont précisé que les <a href="https://twitter.com/CollagesLesb/status/1377687888998064133/photo/4">dons dirigés</a> qu'elles revendiquent[2] doivent pouvoir bénéficier de l'<i><a href="https://pbs.twimg.com/media/Ex6HEwUXEAU0gmX?format=jpg&name=medium">« anonymat total »</a>, </i>rajoutant après « <i>Il est important en effet de respecter l'équilibre des familles lesbiennes </i>(sic)<i> en ne leur imposant pas une « figure paternelle » lorsqu'elles ne le souhaitent pas »</i>. </p><p>Il y a plusieurs choses qui clochent dans cette affirmation ; premièrement, parce qu'à première vue, les <i>« colleuses »</i> ne prévoient rien pour les femmes, lesbiennes ou non, qui envisageraient bel et bien une <i>« figure paternelle »</i> pour leurs enfants.<i> </i>Ainsi, elles ne semblent pas revendiquer de double guichet, option qui proposerait pourtant davantage de possibilités pour les femmes qui le souhaiteraient. </p><p>Ensuite, parce qu'avec cette loi, ce n'est pas l'équilibre des <i>« familles »</i> qu'il faut viser, mais celui des <i>enfants</i>, parce que ce sont eux les produits de la PMA, et que ce sont les seuls qui n'ont pas leur mot à dire dans le processus, alors même que leur parole devrait être considérée comme la plus importante de toutes. </p><p>De fait, revendiquer l'anonymat des dons va à rebours d'une tendance mondiale qui consiste à davantage prendre en compte l'intérêt de l'enfant, y compris dans les décisions de PMA, et qui conteste tous les dogmes familialistes qui placent le bien-être de la <i>« famille »</i> au-dessus de celui de l'enfant, que ce soit le secret familial ou l'idéologie du <i>« deux parents maximum »</i>. Je considère comme paradoxal que des personnes, pourtant historiquement elles-mêmes discriminées à cause d'une idéologie familialiste, se mettent à réinventer à leur manière une nouvelle forme de familialisme tout aussi délétère que les autres.</p><p><span style="font-family: times;">Pour le reste, je réitère la critique que j'avais déjà formulée à l'époque contre les <i>Gouines Contre Nature</i> : </span></p><p><span style="color: #323232; font-family: times;"><span style="background-color: white; font-style: italic;">« Je répète encore, en quoi, pour un enfant, le fait de pouvoir avoir accès à l'identité de son géniteur à sa majorité légale constitue-t-il un moyen d'imposer une </span><span style="background-color: white;">« présence masculine »</span><span style="background-color: white; font-style: italic;"> à sa famille ? »</span></span></p><p>De plus, faut-il encore le rappeler aujourd'hui : <i>de facto</i>, l'anonymat ne peut plus être garanti et <i>n'existe plus</i> en pratique, de par la généralisation des tests ADN récréatifs, malgré leur interdiction en France.</p><p>Je pense qu'il s'agit là d'éléments à rappeler à toutes les personnes et groupes de personnes qui, ayant affirmé leur soutien à l'accès aux origines par ailleurs, ont soutenu ou relayé la marche, voire y ont elleux-mêmes participé. Rappeler que si c'est le cas, elles ont probablement défilé avec des <a href="https://twitter.com/gouinesCONTRE/status/1387751386213986305">Gouines contre Nature</a> et des personnes qui, non seulement s'opposent farouchement à l'accès aux origines, mais ont harcelé des personnes conçues par don en ligne lorsqu'elles osaient émettre leur point de vue. </p><p>Pour ma part, je considère évident que les défenseurs de l'accès aux origines, indépendamment de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre, ne s'associent pas à un évènement qui fait de l'anonymat des donneurs de gamètes une de ses principales revendications, même si cela n'a été que rarement mentionné par les divers média qui ont couvert la manifestation (et sans aucun recul critique, lorsque ce fut le cas). Personnellement, c'est d'ailleurs la raison principale pour laquelle j'ai finalement décidé de ne pas participer à cette manifestation (il y avait aussi d'autres raisons, plus personnelles).</p><p>Bref, cette marche pose les mêmes problèmes que la <a href="https://www.marianne.net/politique/marche-contre-l-islamophobie-l-insoutenable-legerete-de-la-gauche-avec-les-reseaux-de-l">marche contre l'islamophobie</a> en son temps (ou la manifestation des policiers, si vous préférez) : de bonnes intentions, mais gâchées par des organisateurices et soutiens discutables, dans les deux cas.</p><p style="margin-bottom: 0cm;">---</p><p style="margin-bottom: 0cm;">[1]Le maintien de l'anonymat, fût-ce sous une forme moins rigide, fait d'ailleurs partie de cette double stratégie de maintien du statu quo et de division du camp progressiste. Il est avéré que, dans les pays qui ont voté l'accès aux origines avant l'ouverture du mariage pour tous et de la PMA pour toutes les femmes, privant ainsi le camp adverse de toute objection sérieuse à leur encontre, ces deux mesures sont passées de façon relativement facile. Si par exemple, en Suisse, l'ouverture de la PMA est en passe d'être votée, c'est que l'accès aux origines y est garanti depuis déjà plusieurs années.</p><p style="margin-bottom: 0cm;">[2]Dans l'absolu, je suis moi-même favorable aux dons dirigés (non-anonymes), et je pense aussi que l'accès des minorités ethniques à la PMA, notamment par l'appariement (ou le non-appariement) mériterait une bien meilleure considération. Cependant, les dons dirigés tels que les envisagent les « collageuses » semblent reposer sur des bases contradictoires, où ceux-ci seraient à la fois dirigés et anonymes (plus précisément, le donneur connaîtrait le couple receveur, mais celui-ci n'aurait que des informations limitées sur le donneur, si j'ai bien compris). Quoi qu'il en soit, je ne peux m'empêcher de voir une hypocrisie profonde dans le fait de revendiquer l'anonymat au prétexte que la biologie n'aurait pas d'importance, tout en revendiquant l'accès à la PMA et au don dirigé au nom de l'importance d'« avoir un enfant qui nous ressemble ».</p>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-88716270887253477722021-01-21T12:59:00.002+01:002021-01-21T13:28:21.624+01:00L'accès aux origines continue d'avancerMalgré les reports successifs, voire intempestifs, du projet de loi bioéthique en raison de la crise du COVID-19 (crise qui, de mon point de vue, en a malgré tout aussi renforcé la nécessité, en démontrant l'impératif de l'accès aux antécédents médicaux), on peut dire qu'en France, la cause de l'accès aux origines a globalement progressé, au cours de ces dernières années. <div><br /></div><div>Au début des années 2000, lorsque <i>PMAnonyme</i> a commencé à exister, le secret parental était encore largement répandu, voire était la norme, dans nombre de familles concernées ; depuis, il a inexorablement poursuivi sa régression. </div><div><br /></div><div>A la même époque, il y a une quinzaine d'années, les principales associations homoparentales étaient, <i>dans le meilleur des cas</i>, favorables au double guichet, et la simple idée d'abolir l'anonymat des dons en même temps que l'élargissement de la PMA aurait certainement provoqué un réel tollé dans une partie de la communauté LGBT. Aujourd'hui, l'<i>Inter-LGBT</i> a définitivement intégré l'accès aux origines au sein de ses propres revendications, ce qui signifie, en pratique, que les derniers vrais désaccords potentiels portent sur certains détails technico-juridiques tels que la RCA (même si, malheureusement, une minorité bruyante continue de s'opposer farouchement à toute levée de l'anonymat, notamment sur <i>Twitter</i>). </div><div><br /></div><div>Il y a une dizaine d'années encore, lorsque l'idée commençait à percer politiquement en France, l'accès aux origines divisait encore assez nettement la gauche modérée ; aujourd'hui, elle ne divise encore guère plus que l'extrême-gauche et la droite conservatrice, pour des raisons apparemment opposées (libertarisme soixante-huitard à tendance communautariste d'un côté contre masculinisme réactionnaire adultocentré de l'autre côté, pour simplifier). </div><div><br /></div><div>Néanmoins, il y a encore beaucoup de chemin à parcourir, et nous n'en sommes qu'au tout début. C'est pourquoi il nous faut encore rester vigilants, si l'on espère concrétiser ces avancées.
<div class="separator" style="clear: both;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJqYukyGwACe80mfo04zDC7m3GSq9pMlUpUPvQleXMfvEBkf6et2sPuT4t65dX2xydfCZ9cLyFjTwe6H4TAzdtBoTwvkO5ZntgFt1rGlpryn6rMeOAmyYF5isKD4_FhbuWZzLCxozJ/s750/Eqq-NtJWMAMmwuj.jpg" style="display: block; padding: 1em 0px; text-align: center;"><img alt="" border="0" data-original-height="740" data-original-width="750" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJqYukyGwACe80mfo04zDC7m3GSq9pMlUpUPvQleXMfvEBkf6et2sPuT4t65dX2xydfCZ9cLyFjTwe6H4TAzdtBoTwvkO5ZntgFt1rGlpryn6rMeOAmyYF5isKD4_FhbuWZzLCxozJ/s320/Eqq-NtJWMAMmwuj.jpg" width="320" /></a></div>
</div>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-10203638184982134802020-07-31T11:26:00.001+02:002020-11-25T18:12:01.369+01:00Sur la ROPA Alors que les députés sont actuellement en train de débattre de la nouvelle loi bioéthique, et alors que le site <a href="https://lmsi.net/" style="font-style: italic;">Les Mots Sont Importants</a> (avec lequel je n'ai pas spécialement d'affinité idéologique particulière, par ailleurs) a récemment publié <a href="https://lmsi.net/deux-mamans-ca-ne-passe-pas">un article</a> sur la question, et que le sujet est parfois âprement débattu sur les réseaux sociaux, je me suis dit qu'il était grand temps de donner mon avis dessus.<br />
<br />
Tout d'abord, qu'est-ce que c'est, de quoi s'agit-il, et pourquoi en parle-t-on ?<br />
<br />
La ROPA, acronyme pour <i>Réception de l'Ovocyte de la PArtenaire</i>, est une technique d'assistance médicale à la procréation (AMP) destinée typiquement à un couple de femmes (il peut aussi s'agir de personnes transgenres et/ou non-binaires), dans laquelle une des deux personnes fournit un de ses ovocytes, qui sera ensuite fécondé par le spermatozoïde d'un tiers donneur, puis transféré dans l'utérus de sa partenaire.<br />
<br />
En ce qui me concerne, j'y suis favorable (ou du moins, je n'y suis pas opposé) d'une part parce que cette pratique ne pose de tort à personne - elle n'est pas si difficile que cela à expliquer pour un enfant, et n'est pas non plus incompatible avec l'accès aux origines - et d'autre part parce que les arguments du camp d'en face sont quasiment tous plus fallacieux les uns que les autres. Mais je considère aussi que cette question mérite mieux que d'être l'enjeu d'un affrontement binaire entre conservateurs (ou même <i>« modérés »</i>) d'un côté et identitaristes <i>à la</i> Borrillo[1] de l'autre, et j'aimerais apporter un autre point de vue sur la question.<br />
<br />
L'article de <i>LMSI </i>présente (et dénonce) un certain nombre d'arguments en défaveur de la ROPA. Analysons-les de plus près.<br />
<br />
Il y a tout d'abord l'argument du risque médical. Mais, même si cet argument était avéré, il y a tout un tas d'autres pratiques <i>« non-nécessaires »</i> qui sont associées à des risques médicaux, y compris en AMP. Le seul argument qui me semble valable est celui du risque pour la santé de l'enfant, mais d'une part, d'après <i>LMSI </i>(donc à vérifier), aucune étude n'a jamais démontré la dangerosité de cette pratique, d'autre part, même si tel était le cas, ce serait toutes les pratiques de fécondation in-vitro (FIV) qu'il faudrait ainsi remettre en cause.<br />
<br />
Ensuite, il y a l'argument de la <i>« pente glissante »</i>, selon laquelle cette pratique ouvrirait la porte à de <i>« graves dérives »</i> (Thibault Bazin, LR). Peut-être fait-il référence à la gestation pour autrui (GPA) ? C'est fort possible, étant donné que l'argumentation ultérieure de <i>LMSI</i> donne elle-même du grain à moudre à cette interprétation (qui a dit <i>« balle dans le pied »</i> ?). Mais c'est un autre débat.<br />
<br />
D'autres, comme Agnès Buzyn, considèrent que cette technique ouvrirait la voie au don de gamètes dirigé, ce qui remettrait en cause l'anonymat du don. Cette pratique serait donc à interdire au nom du principe d'anonymat ![2]<br />
<br />
De plus, cette assimilation de la ROPA à une GPA ou à un don dirigé (et son interdiction parce qu'assimilée en tant que tel-le) ne peut sérieusement être maintenue que par l'adhésion rigide et irréfléchie à des principes considérés comme intangibles, voire avec de la simple mauvaise foi. La vraie raison de cette opposition, je pense, est que cette pratique serait probablement perçue par ses adversaires comme <i>« trippesque »</i> ou « <i>communautariste »</i>, c'est-à-dire rejetée pour des raisons, en réalité, implicitement lesbophobes.<br />
<br />
En revanche, contrairement à <i>LMSI</i>, je ne suis pas particulièrement offusqué de voir la ROPA décrite comme un don (au sein d'un couple), parce que les problématiques qu'elle soulève sont en réalité très similaires à celles du don d'ovocytes.<br />
<br />
Il y a notamment l'idée que la ROPA constituerait un bouleversement de notre concept de parenté biologique, ce qui est déploré par les conservateurs et les <i>« modérés »</i> tout en étant, précisément pour cette raison-là, revendiqué par les identitaristes, en particulier sur les réseaux sociaux. En réalité, rien n'est plus faux[3].<br />
<br />
Qu'est-ce qu'un parent biologique ? C'est celui/celle qui transmet 50 % de son ADN à son enfant. La notion de parent biologique est donc équivalente à celle de parent génétique. Bien entendu, cela ne remet pas en cause l'influence biologique éventuelle de la gestatrice (épigénétique, régime, stress, etc...), mais tout ce dont la base est génétique (en particulier, le groupe sanguin et les maladies génétiques) provient du seul parent biologique. Comme on peut le voir avec ces exemples, la ROPA ne bouleverse pas notre vision de la parenté biologique, pas davantage que le don d'ovocytes auparavant.<br />
<br />
Ainsi, la ROPA ne devrait pas être envisagée comme un moyen d'avoir <i>« magiquement »</i> une relation génétique vis-à-vis de ses propres enfants, comme certaines personnes ont l'air de le penser, ce qui peut être facilité par le silence des médecins au nom du <i>« politiquement correct »</i>.<br />
<br />
Alors que d'un autre côté, les personnes conçues par don ont besoin d'une terminologie précise pour se construire et envisager leur existence. Essayer de manipuler le langage pour faire croire que ces personnes seraient biologiquement liées à leurs parents non-biologiques est une imposture, et le faire valoir pour combler un besoin émotionnel, alors que l'accès à des données médicales pertinentes peut être une question de vie ou de mort, est certainement déplorable.<br />
<br />
J'irais même jusqu'à dire que ce manque de précision est probablement le signe d'un malaise persistant[4] vis-à-vis du manque de relation génétique avec ses propres enfants[5], alors que cela n'amoindrit pourtant d'aucune manière ni le rôle de parent, ni l'importance de la grossesse et de l'accouchement. Avant de discuter avec son enfant de la façon dont il a été conçu (idéalement, ce devrait être le plus tôt possible), il est important, pour un parent, d'accepter ce manque de relation biologique avec lui.<br />
<br />
---<br />
<br />
[1]Un peu de terminologie, pour commencer.<br />
<br />
Les opinions sur la PMA offrent un large éventail de positions, depuis les conservateurs traditionnels d'inspiration religieuse, qui s'opposent à toute évolution en la matière (<i>LMPT</i>), les défenseurs sincères des droits de l'enfant mais à tendance conservatrice sur la question (Jean-Pierre Rosenczveig, par exemple) les <i>« modérés »</i>, qui acceptent certaines avancées mais restent frileux sur certains sujets tels que la ROPA, les droits des trans, la PMA post-mortem et/ou la GPA (le gouvernement et la plupart des membres de la majorité actuelle <i>LREM</i>) les modernistes-pragmatiques équilibrés et pro-droits de l'enfant (Irène Théry, <i>PMAnonyme</i> et les autres partisans de la RCA), les modernistes-pragmatiques à tendance identitariste (la plupart des opposants à la RCA regroupés au sein du <i>« Collectif PMA »</i>) et enfin les identitaristes radicaux, opposés à toute levée de l'anonymat (qui se définissent souvent comme <i>« féministes matérialistes »</i> sur les réseaux sociaux).<br />
<br />
Ici, je considère que les autrices de l'article se rangent implicitement, sinon du côté des identitaristes radicaux, du moins de celui des modernistes-identitaristes, puisqu'elles citent à plusieurs reprises les propos de l'intellectuel franco-argentin à l'appui de leur argumentaire.<br />
<br />
[2]Un point que certain-e-s identitaristes ont d'ailleurs eu tendance à souligner pour dénoncer ce qui, selon eux, démontrerait l'hypocrisie des <i>« modérés »</i>. En ce qui me concerne, je suis contre l'anonymat, mais je considère aussi que celui-ci devrait être dénoncé avec cohérence, et que critiquer la ROPA au nom du principe d'anonymat, c'est s'attendre à susciter ce genre de réactions.<br />
<br />
[3]En particulier, je vous renvoie <a href="https://www.donorsiblingregistry.com/blog/egg-embryo-donation-families-terminology">à cet excellent article du Donor Sibling Registry</a>, dont je me suis beaucoup inspiré pour écrire cet article.<br />
<br />
[4]D'ailleurs, chez certain-e-s identitaristes radicales, je constate souvent un rapport à la biologie à géométrie variable, à savoir prétendre que la biologie n'est pas très importante lorsqu'il s'agit de défendre l'anonymat des donneurs, tout en rappelant l'importance de celle-ci lorsqu'il s'agit de défendre la ROPA et/ou de pouvoir choisir un donneur d'une ethnie donnée.<br />
<br />
[5]Mon expérience avec des personnes conçues par don est que beaucoup d'entre elles se considèrent comme adoptées avant même leur conception. Bien sûr, on peut ne pas être d'accord avec ce point de vue, mais il faut néanmoins le prendre en considération.Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-85370990826482056462020-06-16T18:59:00.000+02:002020-07-30T08:43:41.542+02:00Commentaires concernant un article d'Odile Fillod sur la PMA<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Odile_Fillod">Odile Fillod</a> est une chercheuse française, connue entre autres pour son engagement féministe de longue date. En particulier, elle tient <a href="http://allodoxia.odilefillod.fr/">un blog concernant la vulgarisation scientifique, et en particulier sur les biais genrés qui vont avec</a>. On peut y trouver d'excellents articles, en particulier sur l'<a href="http://allodoxia.odilefillod.fr/2020/04/26/je-ne-suis-pas-complotiste-mais-a-propos-de-laffaire-raoult/#more-2750">affaire Raoult</a>, mais aussi d'autres un peu plus critiquables, avec des cibles assez récurrentes, dans lesquels on ressent souvent un biais <i>« anti-biologisant »</i> de la part de l'auteur (et je pense que c'est important pour comprendre sa position sur d'autres sujets). Cela pourrait constituer le point de départ d'un débat fort intéressant, mais pour aujourd'hui, j'ai préféré me concentrer sur tout autre chose.<br />
<br />
Notamment <a href="https://blogs.mediapart.fr/odile-fillod/blog/110620/amp-et-filiation-options-sur-la-table-et-enjeux-ideologiques-du-debat?fbclid=IwAR1TyS-JnHVeqFjlv52Z5mXI4sM40dAcfLik8lUTKWU--Hv4PyXKbKPo210">cet article-ci</a>, qui aborde <a href="https://ineakis.blogspot.com/2020/05/mes-evolutions-personnelles-sur-lacces.html">une thématique qui m'est chère</a>.<br />
<br />
L'auteur commence par y critiquer, à raison d'ailleurs, le conservatisme du Sénat et les conséquences discriminatoires, homophobes et ségrégationnistes des amendements qu'il a adoptés.<br />
<br />
Elle se montre en revanche plus critiquable lorsqu'elle critique les positions d'Irène Théry, célèbre sociologue française ayant travaillé de longue date sur les évolutions de la famille.<br />
<br />
A l'instar de <a href="https://ineakis.blogspot.com/2016/12/le-retour-de-la-revanche-de-daniel.html">Daniel Borrillo</a>, Odile Fillod semble être de celles et ceux qui n'ont jamais su pardonner à Irène Théry ses anciennes prises de positions conservatrices dans les années 1990[1], et prend bien soin de rappeler celles-ci en les décontextualisant au possible. Indirectement, cela lui sert de prétexte pour critiquer la revendication d'accès aux origines, et plus particulièrement la reconnaissance commune anticipée de filiation (RCA), qui, en permettant l'inscription de la mention du don dans l'acte de naissance de l'enfant[2], constituerait un mode de filiation séparé, et implicitement discriminatoire[3].<br />
<br />
Dans son analyse de l'expression <i>« accès aux origines »</i>, Odile Fillod énonce un faux dilemme entre origines biologiques et origines sociales, qui est aussi un homme de paille, puisqu'aucune personne IAD que je connais ne réduirait ses origines à la pure biologie.<br />
<br />
Ensuite, <span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;">Odile Fillod prétend que l'affirmation selon laquelle l’identité des géniteurs d’une personne ferait partie des <i>« conditions élémentaires de construction de son identité narrative »</i> ne serait étayée par aucune étude scientifique. </span></span><br />
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;"><br /></span></span>
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;">Mais suivant la façon dont on interprète cette phrase et les études déjà entreprises sur le sujet, on peut considérer cela comme faux. </span></span><span style="background-color: #f2f3f5; font-family: inherit;">En effet, si toutes les personnes conçues par don ne sont pas à la recherche de leurs géniteurs, la plupart d'entre elles sont pour l'accès aux origines, quelque soit le genre de leurs parents. </span><br />
<span style="background-color: #f2f3f5; font-family: inherit;"><br /></span>
<span style="background-color: #f2f3f5; font-family: inherit;">De plus, une majorité absolue de personnes conçues par don considèrent aussi que leur donneur constitue la moitié de leur identité. Il n'y a peut-être pas eu beaucoup d'études en France à ce sujet, mais il y en a déjà eu pléthore dans le monde anglo-saxon.</span><br />
<span style="background-color: #f2f3f5; font-family: inherit;"><br /></span>
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;">Par la suite, Odile Fillod sous-entend aussi que la plupart des autres arguments en faveur de l'accès aux origines seraient principalement d'inspiration psychanalytique et/ou anthropologique. </span></span><br />
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;"><br /></span></span>
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;">Là encore, c'est archi-faux. D'une part, parce qu'en dehors des frontières hexagonales, la psychanalyse a une influence quasiment nulle sur le débat politique. </span></span><br />
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;"><br /></span></span>
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;">D'autre part, parce qu'Odile Fillod omet d'évoquer tous les arguments ayant trait aux antécédents médicaux (dont l'accès serait facilité par l'accès à l'identité du donneur) et à l'impréparation des parents face à la curiosité de leurs enfants, qui peut mener à des comportements délétères tel que le maintien du secret, la minimisation de la biologie ou à des conflits larvés entre parents et enfants.</span></span><br />
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;"><br /></span></span>
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;">Enfin, et contrairement à ce qu'Odile Fillod semble elle-même penser, on peut tout à fait être pour l'accès aux origines tout en étant contre la RCA. Ce n'est certes pas forcément très cohérent, mais c'est tout à fait possible. Aujourd'hui, c'est le cas de nombre d'associations mainstream (auxquelles Odile Fillod fait elle-même allusion, oubliant que celles-ci réclament la levée de l'anonymat</span></span><span style="background-color: #f2f3f5; font-family: inherit;">), mais aussi de personnes conçues par don, comme le couple Kermalvezen de l'association Origines (qui sont certes minoritaires dans leur milieu).</span><br />
<span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;"><br /></span></span>
<span style="background-color: #f2f3f5;">Cependant, j</span><span style="background-color: #f2f3f5;"><span style="font-family: inherit;">e remarque que certaines de ces associations, en principe favorables à la levée de l'anonymat du fait de leur alliance avec l'association <i>Origines</i>, n'hésitent pas, en pratique, à partager, retweeter et/ou liker cet article <i>Mediapart</i> dans leurs petits milieux respectifs, sans aucune ébauche de critique des arguments d'Odile Fillod sur l'accès aux origines.</span></span><br />
<br />
Cet article était déjà la preuve que, malheureusement, certains courants de la gauche radicale et du féminisme ont encore quelques petits efforts à fournir sur la question des droits de l'enfant, mais j'y vois aussi une preuve supplémentaire du double discours au sein des associations membres du collectif PMA (qui regroupe la plupart des associations opposées à la RCA).<br />
<br />
C'est que, d'un côté, on peut voir Irène Théry comme une <i>« conservatrice »</i> reconvertie, mais de l'autre côté, on pourrait tout aussi bien dire que la plupart des associations membres du collectif PMA sont des <i>« pro-anonymat »</i> ou au minimum des <i>« pro-double guichet »</i> reconvertis ; d'ailleurs, nombre de leurs membres ou sympathisant-e-s, en privé ou sur les réseaux sociaux, continuent en réalité à tenir le même genre de discours qu'Odile Fillod sur les <i>« origines »</i>, en adoptant un point de vue de parent, adultocentré.<br />
<br />
---<br />
<br />
[1]Effectivement, ces prises de position paraissent rétrospectivement conservatrices dans le contexte actuel, mais si l'on considère le contexte de l'époque dans sa totalité, les positions globales d'Irène Théry étaient en réalité <a href="https://tvtropes.org/pmwiki/pmwiki.php/Main/FairForItsDay">plutôt progressistes</a>. On a tendance à l'oublier aujourd'hui, mais l'homophobie ouverte était beaucoup plus assumée et affichée que maintenant, tandis que le trio Borrillo-Fassin-Iacub (et ses sympathisant-e-s) ont eu tendance à surestimer leur propre influence dans le débat politique. Marcela Iacub est même tombée en disgrâce lorsque son <i>« permissivisme »</i> l'a amenée à prendre des positions franchement masculinistes sur certains sujets controversés.<br />
<br />
[2]Ce qui, contrairement à ce que prétend Odile Fillod, est une revendication de personnes concernées, au moins si l'on considère les personnes conçues par don comme étant des personnes concernées (ou même certaines associations LGBT et féministes particulièrement sensibles à la question des droits de l'enfant).<br />
<br />
[3]Ce qui est faux : il existe déjà un mode de filiation distinct pour les personnes adoptées, et pourtant personne ne hurle à la discrimination.Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-83955775065182311542020-06-12T13:43:00.002+02:002023-04-04T18:10:26.612+02:00J. K. Rowling et la transphobie<i>[Tw : transphobie, et incompétence possible de l'auteur sur cette épineuse question]</i><br />
<br />
Si, comme moi, vous fréquentez régulièrement les réseaux sociaux tels que Twitter, vous n'avez pas pu passer à côté de ce <i>shitstorm</i> qui agite actuellement la toile : J.K. Rowling, l'autrice de la célèbre saga Harry Potter, serait transphobe, c'est-à-dire hostile aux droits des personnes transgenres.<br />
<br />
A vrai dire, elle n'en est pas à son coup d'essai. Déjà, le 19 décembre 2019, elle se fendait d'un tweet pour partir à la défense de Maya Forstater, une spécialiste fiscale qui avait été licenciée pour avoir posté sur Twitter que le sexe biologique était purement binaire, qu'il était impossible de changer celui-ci et, surtout (même si cela est rarement évoqué), <a href="https://www.bbc.com/news/uk-50858919">pour avoir, apparemment, utilisé ces justifications</a> <a href="https://drive.google.com/file/d/12P9zf82TicPs2cCxlTnm0TrNFDD8Gaz5/view">afin de nier des droits fondamentaux à des personnes transgenres</a>. C'est beaucoup plus grave que la version qu'en a donnée Rowling, à savoir qu'elle avait été licenciée uniquement pour avoir affirmé que le sexe (biologique) existait[1].<br />
<br />
Bref, cette fois-ci, tout a commencé par <a href="https://twitter.com/jk_rowling/status/1269382518362509313">ce tweet</a> le 6 juin dernier :<br />
<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi-tvBskG6q-qxXbETOAxHm6nCMnd-3MjNKpftjNFAa5KVXj0EASOLISMhqBborsOxSc8UBghG11xcv7DGp4otS3tSUSKuXsPECqSO6BuyV3t6ZtNh3Hzk1rWCHFdvdCyOMFCNjEB3k/s1600/jk+rowling2.png" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="182" data-original-width="560" height="104" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi-tvBskG6q-qxXbETOAxHm6nCMnd-3MjNKpftjNFAa5KVXj0EASOLISMhqBborsOxSc8UBghG11xcv7DGp4otS3tSUSKuXsPECqSO6BuyV3t6ZtNh3Hzk1rWCHFdvdCyOMFCNjEB3k/s320/jk+rowling2.png" width="320" /></a></div>
<br />
<br />
Si on lit l'article en question, on se rend compte que l'expression <i>people who menstruate</i> était vraiment à prendre au sens littéral, et n'était absolument pas un « euphémisme » pour <i>women</i> (femmes), parce qu'il abordait directement le problème des règles durant la pandémie de covid-19.<br />
<br />
Ce choix de langage était donc tout à fait pertinent. D'une part, de façon triviale, parce que ce ne sont pas toutes les femmes qui ont leurs règles. Sans même parler des femmes trans et intersexes, il y a toute une série de raisons, temporaires ou définitives, qui font que les femmes n'ont pas leurs règles : grossesse, ménopause, soucis de santé, etc...<br />
<br />
Mais aussi parce qu'il y a des personnes qui ne se considèrent pas elles-mêmes, voire que d'autres personnes ne considèrent pas comme femmes, et qui ont leurs règles : c'est par exemple le cas des <i>« gender non-binary persons »</i> (personnes non-binaires) évoquées dans l'article, mais aussi des hommes trans et de certaines personnes intersexes. C'est pourquoi, même parler uniquement de<i> « women who menstruate »</i> n'était pas suffisamment inclusif pour ce genre d'article qui s'adresse au plus grand nombre ; il fallait donc, <i>a minima</i>, reconnaître l'existence de personnes qui ne sont pas des femmes et qui ont des règles[2].<br />
<br />
Si on se met à la place des personnes concernées, en particulier celle des femmes trans, on peut donc tout à fait comprendre que ce tweet ait été particulièrement mal perçu, puisqu'il sous-entend que les femmes trans ne seraient pas des femmes ; en effet, avec la technologie actuelle, il n'est pas possible de donner de menstruations à une femme trans. Sans entrer dans un débat sur le transmédicalisme, on peut <i>a minima</i> considérer qu'une femme trans opérée à laquelle on a remplacé le pénis par un vagin est une femme, point (vision simpliste et aujourd'hui considérée comme dépassée, voire rétrograde, d'ailleurs). On n'est pas en train de parler de non-binaires barbus à moitié libanais, là. Il s'agit de quelque chose de très basique concernant les droits des personnes trans.<br />
<br />
Rowling aurait pu s'en arrêter là, mais elle est allée en fait beaucoup plus loin que ça. Dans ses tweets d'après, déjà, elle en a rajouté une couche sur la réalité du sexe biologique (à grands renforts d'<a href="https://rationalwiki.org/wiki/Motte_and_bailey">équivocations</a> et de doubles sens), alors que ce n'était pas le propos de l'article qu'elle citait, qui ne nie même pas l'existence du sexe biologique, et se contente d'utiliser des termes corrects et consensuels pour désigner des réalités biologiques.<br />
<br />
Ensuite, elle s'est fendue d'<a href="https://www.jkrowling.com/opinions/j-k-rowling-writes-about-her-reasons-for-speaking-out-on-sex-and-gender-issues/">une longue justification, assez bancale</a>, où l'on retrouve des arguments <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/TERF#:~:text=TERF%20(%20%2Ft%C9%9C%CB%90rf%2F%2C%20%C3%A9galement,de%20trans%2Dexclusionary%20radical%20feminist.">TERFs</a> assez classiques, du type <i>« les hommes vont envahir nos espaces »</i>, où elle n'hésite pas à donner dans l'amalgame au sujet des <i>« trans-activistes »</i>, et où elle évoque certaines des réponses qu'elle a eues suite à ses diatribes. A ce sujet, je tiens à signaler que je ne cautionne absolument pas les pires excès de la <i><a href="https://www.madmoizelle.com/cancel-culture-definition-1037892">cancel culture</a></i> qui sévit actuellement sur Twitter, ni certains des harcèlements dont Rowling a pu être la victime, s'ils ont bel et bien eu lieu.<br />
<br />
Toujours est-il que les acteurs de la série Harry Potter, Daniel Radcliffe et Emma Watson en tête, ont commencé à prendre leurs distances vis-à-vis des positions de Rowling sur la transidentité. C'est bien évidemment une bonne chose, et l'on ne peut que souhaiter que cela continue.<br />
<br />
---<br />
<br />
[1]Plus précisément, ce qui était visé dans le jugement prononcé à l'encontre de Forstater, semble-t-il, ce n'était pas tant sa croyance philosophique en l'immutabilité du sexe biologique que le fait qu'elle utilise cette croyance pour justifier des atteintes aux droits des personnes trans. Il s'agit d'un manque de neutralité évident. C'est l'équivalent d'un chrétien qui discriminerait à l'encontre des homosexuels en raison de passages tirés du Lévitique.<br />
<br />
[2]L'article ne parlait d'ailleurs même pas directement du cas des hommes trans, et pourrait donc être lui-même accusé de transphobie par certaines personnes pour cette raison-là.<br />
<br />
<br />Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-24489573896426977682020-05-13T17:29:00.008+02:002022-02-12T17:55:49.228+01:00Mes évolutions personnelles sur l'accès aux originesTout d'abord, pour tous ceux qui suivent mes articles, je tiens à préciser que je ne suis moi-même <i>pas</i> conçu par don, j'ai juste un très fort intérêt personnel pour le sujet. Bien sûr, dans ces conditions, il me faut également comprendre <i>pourquoi</i> j'ai un intérêt personnel aussi fort pour ce sujet.<br />
<br />
Contrairement à ce que certaines <a href="https://ineakis.blogspot.com/2020/05/dernieres-nouvelles-de-la-jungle-de.html">FMLR</a> pourraient penser, je ne pense pas que ce serait parce que je serais homophobe ou lesbophobe. Au contraire, j'ai très tôt remarqué, en particulier dans le monde anglo-saxon, la convergence entre <i>certains</i> mouvements de personnes conçues par don et <i>certains</i> courants homophobes. Et, bien que j'aie tout de suite ressenti de la sympathie pour cette cause, je savais qu'il faudrait tôt ou tard la purger de ses possibles instrumentalisations homophobes (ou, plus généralement, conservatrices), ce qui, fort heureusement, m'a l'air d'être en assez bonne voie, si je suis l'évolution du mouvement au cours du temps.<br />
<br />
Je pense qu'il y a aussi, effectivement, une part de volonté de <i><a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/08/acces-aux-origines-lopposition-de-gauche.html">« dénoncer la gauche radicale là où elle se fourvoie »</a></i>, mais cela vise moins des groupes de personnes en particulier que des idéologies : la minimisation de la biologie et le relativisme culturel, par exemple. Puis bon, en France, l'opposition à l'accès aux origines provient en réalité davantage de la <i>droite</i> (cf. les débats au Parlement et <a href="https://www.ifop.com/wp-content/uploads/2019/06/116-446_Rapport_Ifop_ADFH_2019.05.24Don.pdf">ce sondage</a>) que de la gauche, même radicale, contrairement à ce que pourraient faire penser certaines minorités bruyantes sur Twitter. De plus, en politique, je sais très bien où sont mes priorités, et que je sais que je ne voterai <i>jamais</i> pour la droite conservatrice, même si celle-ci était plus favorable à l'accès aux origines que la gauche.<br />
<br />
Enfin bref, je pense qu'en a peine quelques mois, j'ai évolué sur la question de l'accès aux origines. Pas sur le fond, ni sur les principales positions à défendre, mais plutôt sur la <i>manière</i> de défendre celles-ci.<br />
<br />
Il y a quelques mois à peine, j'engageais directement le débat avec certaines FMLR sur leurs profils, et suite à certaines de leurs insultes ou à certains arguments particulièrement mauvais de leur part, il m'arrivait de m'énerver et de tomber ainsi dans leur piège, qui était de me faire passer pour insensible, voire réactionnaire et homophobe. Occasionnellement, il m'est ainsi arrivé d'user de termes psychophobes pour me référer à certaines de mes adversaires lorsqu'elles avaient le dos tourné, ou d'employer un ton pouvant être vu comme condescendant, allant jusqu'à balancer des accusations de <i>« reniement »</i> voire de <i>« totalitarisme »</i> à l'encontre de certaines d'entre elles. Avec le recul, ce sont autant d'arguments que j'utilisais à l'époque et que je n'utiliserais plus aujourd'hui. <i><b>[update du 12 février 2022 : j'ai encore évolué depuis. Je pense que si je n'utiliserai plus ces arguments aujourd'hui, c'est avant tout parce que, fondamentalement, je n'aime pas faire de la peine aux gens, et que je sais désormais où ces arguments nous mènent. Mais je maintiens qu'il y a tout de même un problème avec la violence de certaines des réactions que j'ai pu croiser, révélateur de problèmes plus fondamentaux de leur idéologie, ce qui pourrait faire l'objet d'un prochain article]</b> </i>En particulier, je pense qu'il convient de ne pas <i>exagérer</i> les méfaits d'une pratique et d'une idéologie à laquelle on s'oppose, tant que l'on n'a pas vu, de façon concrète, comment les choses se déroulaient dans la pratique. <br />
<br />
Aujourd'hui, c'est tout juste si je me contente de liker les posts d'un "courageux" individu conçu par don, qui se vante de signaler les cas les plus flagrants de harcèlement et de désinformation provenant de la communauté FMLR. Je ne réponds plus à rien, sauf si on s'adresse directement à moi.<br />
<br />
Par ailleurs, j'ai récemment lu des articles d'anthropologie portant sur l'excision (un sujet que j'ai délibérément choisi pour son caractère extrême, puisque je doute qu'il y ait beaucoup de personnes pour le défendre dans le monde occidental, mis à part quelques anthropologues relativistes). Sans tomber dans le relativisme extrême, ces articles mettaient en avant certaines problématiques qui compliquaient la lutte contre l'excision et pouvaient même s'avérer contre-productives.<br />
<br />
Notamment, un certain risque d'ingérence paternaliste et néo-coloniale de la part d'un Occident civilisateur qui apporterait le salut aux femmes indigènes, ce qui leur fait dire que pour combattre efficacement l'excision, il fallait tout d'abord bien comprendre les mécanismes culturels derrière cette pratique, et avant tout s'appuyer sur les femmes qui habitent sur place et travailler avec elles pour changer les attitudes locales et éduquer les personnes sur les dangers de cette coutume, dont la pratique persiste même dans des régions où il y a des lois qui l'interdisent.<br />
<br />
Pour comparer avec notre sujet de départ - avec lequel je ne suis pas en train d'insinuer qu'il y aurait un quelconque degré de gravité similaire ou comparable, ni même qu'il faudrait le traiter avec la même sévérité - cela me fait mieux comprendre, toutes proportions gardées, l'opposition à la levée de l'anonymat des dons de gamètes de la part des FMLR.<br />
Avant toute chose, la situation politique que nous vivons est très délicate, et les aspects homophobes de la culture hétérosexuelle ont souvent brandi un certain concept de <i>« droits de l'enfant »</i> pour s'opposer aux droits des personnes LGBT de vivre leur vie comme elles l'entendaient, alors même que le système d'anonymat des donneurs tel que défini par la loi de 1994 était l'incarnation-même du privilège hétérosexuel. D'ailleurs, les FMLR utilisent le fait que cette institution ne soit remise en cause que maintenant, et que notre monde a encore un rapport compliqué voire contradictoire à la science, au corps et à la parenté (notamment en ce qui concerne les droits des personnes intersexes), comme preuves indéniables de l'inoxydable hypocrisie du monde hétérosexuel à leur égard, alors que nous n'en avons justement pas terminé avec cette défense masculine et hétérosexuelle de l'anonymat des donneurs et des secrets de famille.<br />
<br />
C'est pourquoi, dans notre combat contre l'anonymat des dons de gamètes, il nous faut avant tout nous appuyer sur la <i>« majorité silencieuse »</i> de la communauté LGBT et des féministes, renforcer notre coopération avec les organisations LGBT (y compris en ouvrant le dialogue avec des militant-e-s assez radicales, <a href="https://programmation.maifsocialclub.fr/programmation/le-mois-des-adopte-e-s/adoption-pma">ce qui a déjà commencé</a>), <a href="https://www.familyequality.org/2019/12/17/podcast-donor-conceived-queerspawn/">écouter les enfants de ces familles-là, d'autant plus si iels-mêmes sont LGBT et engagé-e-s dans ce milieu</a>[1], travailler main dans la main avec les centres LGBT régionaux, rappeler que pour une personne conçue par don, découvrir l'identité de son donneur à sa majorité n'est en aucun cas une obligation, écouter les justifications derrière les revendications de nos adversaires, en évitant autant que possible les jugements de valeur négatifs[2].<br />
<br />
Je remarque qu'en France, les associations pour le droit d'accès aux origines entament déjà des démarches allant dans ce sens, et c'est une bonne chose. Cela se voit dans la trajectoire du site web de l'association <i>PMAnonyme</i> : en moins d'une quinzaine d'années, celui-ci est ainsi passé d'<a href="https://web.archive.org/web/20071012104201/http://www.pmanonyme.asso.fr/">une esthétique froide connotée <i>« pro-vie »</i></a> à <a href="https://pmanonyme.asso.fr/">une esthétique beaucoup plus chaleureuse, qui met davantage en avant les droits des personnes et leurs expériences</a>. La rhétorique employée a elle aussi évolué : <a href="https://web.archive.org/web/20071012104647/http://www.pmanonyme.asso.fr/charte.php">celle de la toute première version du site serait rétrospectivement qualifiée de pro-<i>« Manif Pour Tous »</i></a> à cause du vocabulaire employé[3], tandis que <a href="https://pmanonyme.asso.fr/la-charte-de-lassociation-pma/">celle de la version actuelle est beaucoup plus modérée</a>.<br />
Plus récemment, le site a aussi supprimé la mention de la notion de <i>« père biologique »</i> (bien que <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A8re">techniquement correcte</a>, cette expression peut être considérée comme controversée, dans l'optique d'un dialogue avec des militant-e-s radicales) et relégué au second plan sa catégorie <i>Ils l'ont dit </i>(section controversée chez les FMLR, en raison de citations de députés de droite, notamment).<br />
<br />
Pourquoi ne pas aller plus loin ? Pourquoi ne pas indiquer dans la charte de l'asso une reconnaissance et une valorisation de la diversité des modèles familiaux, comme l'ont déjà fait le <a href="https://www.donorsiblingregistry.com/about-dsr/history-and-mission"><i>Donor Sibling Registry</i></a> et l'<a href="https://www.donorsiblingregistry.com/about-dsr/history-and-mission"><i>Association Canadienne des Personnes Conçues par Don de Gamètes</i></a> avant elle ?<br />
<br />
Soyons fous : <i>PMAnonyme</i> pourrait même proposer de participer, avec ou sans sa concurrente <i><a href="https://associationorigines.com/">Origines</a> </i>(<a href="https://ineakis.blogspot.com/2020/01/le-paysage-des-associations-pour-le.html">qui, par rapport aux organisations LGBT et féministes les plus classiques, a l'avantage d'être encore moins « controversée » que <i>PMAnonyme</i></a>), à la prochaine Marche des Fiertés (qui ne se tiendra pas avant un bon moment, vu le contexte actuel, donc).<br />
<br />
Absurde ? Pas tant que ça : le <a href="https://www.donorsiblingregistry.com/">Donor Sibling Registry</a>, dont les positions sont nettement similaires à celles de ses homologues français, <a href="https://www.donorsiblingregistry.com/dsr-support/lgbt">participe depuis déjà plusieurs années à des événements LGBT</a>. Et après tout, <i>PMAnonyme</i> et <i>Origines</i> se sont, chacune dans leur genre, beaucoup mobilisées et illustrées dans le débat bioéthique et la loi sur la PMA, sachant que l'accès aux origines est aussi <a href="http://www.inter-lgbt.org/presentation/nos-revendications/">une revendication de l'Inter-LGBT</a>.<br />
<br />
Cependant, cette participation risquerait certainement d'être perçue comme une provocation, voire comme une insulte, par <a href="https://twitter.com/gouinesCONTRE">certaines organisations radicales</a>, ce qui risquerait de provoquer des <i>clashs</i> et autres altercations inutiles. <a href="https://www.lesinrocks.com/2019/06/29/actualite/actualite/expulsion-des-migrants-une-action-pour-interpeller-air-france-lors-de-la-marche-des-fiertes/">Des incidents du même type ont eu lieu à cause du même genre de personnes lors de précédentes Marches des Fiertés, pour d'autres raisons</a>.<br />
<br />
Ainsi, si cette participation est acceptée, ce serait bien sûr une grande victoire pour la cause de l'accès aux origines, mais il ne faudrait pas se réjouir trop vite, et rester vigilants, bien entendu.<br />
<br />
---<br />
<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
[1]D'après mon
expérience personnelle, les personnes LGBT conçues par don (mêmes celles issues de parents LGBT) ont d'ailleurs globalement tendance à privilégier leur identité de personne conçue par don à
celle de personne LGBT, en termes de revendications.</div>
<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
[2]C'est un
point sur lequel je pense avoir particulièrement progressé, depuis
moins d'une semaine. <a href="https://ineakis.blogspot.com/2020/05/dernieres-nouvelles-de-la-jungle-de.html">Dans mon précédent article</a>, j'écrivais encore que
les FMLR étaient principalement motivées par la <i>peur</i>, notamment
celle d'être <i>« trahies »</i> par leurs propres enfants. Dans la
réalité, c'est certainement plus complexe que cela. Personne n'admet
facilement être motivé par la peur, et elles seraient tout à fait capables de
renverser cette accusation à notre égard, pour d'autres raisons. En
fait, certaines FMLR semblent même motivées par une forme de
<i>confiance</i> (qui d'ailleurs, de notre point de vue, apparaît largement excessive, et il faudra donc faire comprendre qu'elle est <i>empiriquement</i> excessive) dans leur
idéologie <i>« révolutionnaire »</i>, davantage que par la peur.</div>
<br />
[3]Le vocabulaire utilisé n'était pas <i>spécifiquement</i> homophobe à proprement parler, mais on peut lui trouver rétrospectivement une connotation homophobe, notamment à cause de la récupération de ce genre de rhétorique par <i>La Manif Pour Tous</i> à partir de 2013.<br />
<i><br /></i>
<br />
<br />
<br />Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-14833353659070230692020-05-06T19:19:00.001+02:002021-02-20T10:45:43.194+01:00Dernières nouvelles de la jungle de Twitter en confinement (ou les extrémistes face à leurs contradictions)Actuellement, il semblerait hélas qu'avec l'allongement du confinement - j'en ai de plus en plus l'impression - ce soit tout le réseau social Twitter qui ait décidé de partir en vrille et de s’entre-déchirer entre <i>clashs</i> et autres <i>dramas</i>. Dans la sphère Zèt', c'est récemment <a href="https://twitter.com/Acermendax/status/1256678847837339652"><i>Acermendax</i> qui s'est clashé avec <i>le Bouseux</i></a>, tandis qu'<i><a href="https://twitter.com/homofabulus?lang=fr">Homo Fabulus</a></i> s'est clashé avec <i><a href="https://twitter.com/game_of_hearth/">Game Of Hearth</a></i> et <i><a href="https://twitter.com/UnMondeRiant/">Un Monde Riant</a></i>, qui lui-même s'est clashé avec <i><a href="https://twitter.com/mgigantoraptor">Gigantoraptor</a></i>. Longue histoire, qui ne sera pas abordée dans cet article-ci.<br />
<br />
Mais la sphère dite « <i>woke</i> » est actuellement agitée par un <i>drama</i> d'ampleur peut-être plus importante encore.<br />
<br />
Tout a commencé par un post sur l'accouchement sous X, dans lequel une twittos appelait à ne pas relayer les posts de nés sous X qui recherchaient leur mère de naissance, afin de respecter la décision qu'avait prise celle-ci de garder l'anonymat. S'en est suivi, inévitablement, un clash avec lesdits nés sous X (parmi lesquels se trouvaient de nombreuses personnes racisées)[1].<br />
<br />
Dans un des tweets de son fil, ladite twittos visait expressément une personne IAD engagée contre l'anonymat des dons de gamètes, disant qu'elle était homophobe, réactionnaire et la présentant implicitement comme une sorte de repoussoir idéologique absolu. Suite à ce harcèlement ciblé, ladite personne IAD[2] a réussi à mobiliser sa communauté afin de signaler le compte en question et de le suspendre.<br />
<br />
À vrai dire, je ne sais toujours pas s'il s'agissait de la bonne décision à prendre, même si je reconnais qu'au minimum, il ne doit pas être très agréable de se prendre ce genre de harcèlement injustifié à répétition.<br />
<br />
Toujours est-il que par la suite, la personne IAD en question s'est prise en retour un <i><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_du_%C2%AB_call-out_%C2%BB">call-out</a> </i>particulièrement sévère en pleine poire, de la part de « <i>féministes-matérialistes-</i><i>lesbianistes-radicales</i><i> </i>» (ou FMLR)[3] pour lesquelles tout désaccord ou toute critique de leur idéologie relève de l'homophobie pure et simple.<br />
<br />
Il faut bien comprendre qu'il ne s'agit pas ici de véritablement <i>expliquer</i>[4] en quoi les propos de ladite personne IAD seraient homophobes, discriminatoires, intégristes, réactionnaires ou d'extrême-droite ; il s'agit avant tout de dénoncer, de dénigrer, de discréditer, de provoquer, de désinformer un certain public présent sur Twitter afin de maintenir celui-ci dans une emprise sectaire (on pense aux fameuses <i>deux minutes</i> <i>de la haine</i>, dans <i>1984</i> de George Orwell, par exemple), puis de répéter et d'exagérer les accusations des autres intervenants. De fait, leurs principaux arguments relèvent du plus pur <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sophisme_par_association">déshonneur par association</a> et d'autres tropismes issus de la désormais tristement célèbre « <a href="https://www.madmoizelle.com/cancel-culture-definition-1037892"><i>cancel culture</i></a> ».<br />
<br />
Un autre individu IAD, profondément engagé dans la même cause que la précédente personne IAD, s'est ensuite mis en avant pour signaler autant de posts injurieux qu'il le pouvait. Parmi les « <i>FMLR »</i> de Twitter, celui-ci a suscité un certain nombre de railleries, notamment en raison de son pseudonyme, mais cela leur également permis de découvrir les actions effectivement menées par les personnes IAD de chair et d'os, et aussi, indirectement, qu'il existait toute une frange LGBT <i>« modérée »</i> (largement majoritaire, hors de Twitter) qui non seulement ne partageait pas leur idéologie, mais la rejetait même ouvertement (avec toutefois beaucoup de nuances à apporter à cela, évidemment)<span style="text-align: justify;">[5].</span><br />
<br />
Quant à moi, cela m'a permis d'en découvrir davantage concernant les contradictions qui agitent actuellement ce mouvement de pensée.<br />
<br />
Notamment en ce qui concerne les incohérences de sa rhétorique, qui révèlent en filigrane ce que pourraient bien être les véritables motivations derrière les revendications de ce mouvement.<br />
<br />
Prenons la « <i>libre disposition de son propre corps »</i>, par exemple. Les <i>« FMLR »</i> y sont en principe favorables... sauf lorsqu'il s'agit d'user de cette libre disposition de son corps pour effectuer des tests ADN[6] afin de découvrir son géniteur.<br />
<br />
Prenez <a href="https://twitter.com/nofunkind/status/1257720663705554944">ce post</a>, par exemple.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjfS6J2IvacuLOKNbdBsZ7pAMCoGQ7zoiKvzXawdE8DmbBQ8cM_HkzVXgtGWs6-rGgBgCra7s3mNWSHTFJdHECfaqr75RFd3eqOAgC6GuTgptCwrGjymKm0Kt0rOnhWRuPa0grTA0mK/s1600/anonymat.png" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="446" data-original-width="562" height="316" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjfS6J2IvacuLOKNbdBsZ7pAMCoGQ7zoiKvzXawdE8DmbBQ8cM_HkzVXgtGWs6-rGgBgCra7s3mNWSHTFJdHECfaqr75RFd3eqOAgC6GuTgptCwrGjymKm0Kt0rOnhWRuPa0grTA0mK/s400/anonymat.png" width="400" /></a></div>
<br />
<br />
Ainsi, les « <i>FMLR »</i> découvrent avec horreur que l'anonymat des dons de gamètes, que des démagogues leur avaient promis et auquel elles tenaient tant, n'est plus garanti dans la pratique, et que même des médecins gays de gauche applaudissent des deux mains... Quelle surprise, dites donc !<br />
<br />
Il est tout de même cocasse de voir que les mêmes personnes qui, dans un autre domaine, se vantaient ouvertement de défendre des « <i>fraudeuses</i> » (pourtant à juste titre, selon moi) s'étonnent ici de voir d'autres personnes « <i>contourner la loi »</i>, et ce avec une confondante naïveté ; alors que pourtant, on est en droit de penser que résoudre un questionnement existentiel pourrait être ni plus ni moins légitime que d'assouvir un désir d'enfant. Dans les deux cas, il s'agit de façons de reprendre sa vie en main.<br />
<br />
Bien sûr, la twittos dont il est question ici prend soin par la suite de ne pas paraître trop « <i>pro-donneurs</i> » (ce qui serait étonnamment « <i>pro-hommes</i> » pour une supposée féministe radicale). Elle enchaîne donc avec <a href="https://twitter.com/nofunkind/status/1257730992464375809">le tweet suivant</a> :<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEitYG8EPhHA-Ltb1kwlehjYkWDuLUN1IgPBqWHuobMBFloCFUNG_35RTPt4kzwG6LsDaSa1ylgUBkASHnsXf8inqICR5RYWgkbcJ_ezwBrKGHTvRs1EJDjmgyJEQg0YC14wdDELfEdQ/s1600/Anonymat3.png" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="67" data-original-width="536" height="50" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEitYG8EPhHA-Ltb1kwlehjYkWDuLUN1IgPBqWHuobMBFloCFUNG_35RTPt4kzwG6LsDaSa1ylgUBkASHnsXf8inqICR5RYWgkbcJ_ezwBrKGHTvRs1EJDjmgyJEQg0YC14wdDELfEdQ/s400/Anonymat3.png" width="400" /></a></div>
<br />
<br />
Comment peut-on être davantage à côté de la plaque ?<br />
<br />
Je veux dire, à moins de penser sérieusement que tous les hommes sans exception sont secrètement l'un ou l'autre voire les deux, il est fort à parier que dans les faits il n'y aura ni l'un ni l'autre (sauf peut-être chez des « <i>repentis</i> », des progressistes ou des gens responsables), à moins d'être particulièrement stupide, suicidaire ou les deux.<br />
<br />
Elle enchaîne ensuite avec <a href="https://twitter.com/nofunkind/status/1257736240474083330">deux</a> <a href="https://twitter.com/nofunkind/status/1257736242118230033">tweets</a> qui témoignent indirectement de ce qu'on pourrait appeler le cœur du problème, à savoir la peur. Peur - largement fantasmatique - d'être un jour confrontée à un inconnu qui pourrait menacer notre famille ; peur de se voir, soi et sa famille, délégitimées et déconsidérées ; mais, peut-être aussi, peur implicite et secrète de voir un jour nos propres enfants finir par nous « <i>trahir</i> ». Ce à quoi je réponds que nos familles ne devraient pas être basées sur la peur et l'appréhension, car nos enfants valent mieux que ça[7].<br />
<br />
Dans <a href="https://twitter.com/nofunkind/status/1257723415626231808">le post suivant</a>, il y a aussi le sentiment que la situation est plus ou moins en train de leur échapper, et qu'il va falloir tôt ou tard faire le deuil d'une utopie mort-née, à savoir tenter de redéfinir la famille et la parenté sans aucune référence même implicite à la biologie, et de pouvoir imposer ce point de vue à tous et en premier lieu à leurs propres enfants.<br />
<br />
C'est ce qui me fait dire que, dans l'affaire, les vrais réactionnaires ne sont peut-être pas ceux qu'elles voudraient nous faire croire.<br />
<br />
Parce qu'il n'y a pas que les cathos, les intégristes ou les conservateurs qui ont du mal à s'adapter à l'évolution du monde ; il y aussi les FMLR, dans un autre registre. C'est quelque chose qu'elles comprendraient certainement mieux, si elles essayaient davantage de discuter avec des personnes IAD nées dans des couples hétéro, plutôt que de venir les insulter sur les réseaux.<br />
<br />
À leur décharge, il faut dire que ce courant ne développe quasiment aucune réflexion pertinente qui lui soit propre en matière de droits des enfants, et pour cause puisque le simple fait d'évoquer ce sujet fait de vous une personne d'extrême-droite à leurs yeux.<br />
<br />
C'est bien simple, le plus souvent, le sujet n'est abordé qu'à l'aune d'un dogmatisme « <i>pro-choix »</i> aussi suranné qu'immature, qui partage paradoxalement en commun avec son homologue anti-avortement dans sa forme la plus crue, le fait de tenir des opinions très fortes et arrêtées sur ce que pourrait ou devrait être une grossesse, tout en se foutant de ce qu'il advient de l'enfant après (pas au sens littéral bien sûr, mais au sens où certains de ses éventuels besoins, opinions ou considérations ne seront probablement pas pris en compte).<br />
<br />
Ce dogmatisme, accompagné d'une fermeture délibérée à la discussion, au dialogue et à l'échange, ne peut déboucher que sur une forme d'irresponsabilité proclamée et revendiquée, affichée et assumée en tant que telle, aux forts relents passifs-agressifs, qui contribue paradoxalement à essentialiser encore davantage le désir d'enfant.[8]<br />
<br />
C'est fort dommage, parce que le projet de loi bioéthique contenait bel et bien de nombreuses avancées marquantes, qu'il ne doit donc être enterré sous aucun prétexte et qu'il faudra les défendre coûte que coûte, dénaturées qu'elles aient été après le passage au Sénat. Je dirais même que la crise du COVID-19 rend la question de la levée de l'anonymat des donneurs encore plus pertinente et pressante que jamais, pour plusieurs raisons (perturbations possibles, et à titre temporaire, de l'industrie des tests ADN, ce qui appelle à une facilitation des démarches administratives à l'avenir pour retrouver son donneur, enquêter sur les réactions face au COVID-19 des parents biologiques qui pourrait correspondre à un profil génétique particulier, etc...).<br />
<br />
___<br />
<br />
[1]Plus précisément, ce clash opposait majoritairement d'un côté des féministes « <i>pro-choix</i> » radicales, mais majoritairement blanches et aussi en un sens plus traditionnelles qu'elles ne le prétendaient, et de l'autre de jeunes personnes, souvent racisées, là aussi des femmes pour la plupart.<br />
<br />
[2]Probablement l'une des personnes IAD les plus ouvertes et progressistes que je connaisse, en plus. C'est même pire que ça : en fait, je pense qu'elle est même ciblée <i>spécifiquement</i> parce qu'elle est ouvertement progressiste, parce que quelque part elle baigne déjà dans cette sphère-là et ce depuis longtemps. Un type IAD lambda aurait eu beaucoup moins d'abonnés en commun avec les FMLR, et l'impact d'un <i>call-out</i> s'en serait trouvé d'autant plus amoindri.<br />
<br />
[3]Cette notion correspond à peu près à celle de « sympathisante <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/les-arguments-fallacieux-des-gouines.html">GCN</a> » ; mais je me réserve dorénavant le droit de parler de GCN pour parler plus spécifiquement de l'association, et non du courant de pensée dans son ensemble. En tout les cas, elles sont à peu près aussi représentatives des lesbiennes en général qu'Eric Zemmour est représentatif des français.<br />
<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
[4]Comme indiqué
précédemment, toute critique de leur idéologie est généralement
considérée comme lesbophobe, sans autre forme de procès ;
cependant, et particulièrement quand on les pousse à détailler
leur point de vue, il arrive parfois que des FMLR explicitent
davantage en quoi elles considèrent ces désaccords comme
lesbophobes (tout en insistant toujours à chaque fois sur le fait
qu'elles ne devraient pas avoir besoin de l'expliquer, tant selon
elles ce point de vue devrait aller de soi).
</div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
En particulier,
elles rejettent l'argument selon lequel la levée de l'anonymat n'est
pas lesbophobe parce qu'elle concerne aussi les hétéros, et ce pour
plusieurs raisons.</div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
Tout d'abord,
elles considèrent, tout comme les homophobes paradoxalement, que
<a href="https://twitter.com/eliminature_/status/1258101708170891272">l'homosexualité est davantage histoire d'idéologie que d'orientation sexuelle</a>, ce qui dans leur cas engendre une confusion
très utile pour immuniser leur idéologie face à la critique.</div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
Et entre autres,
cette idéologie leur permet d'affirmer que les homosexuel-le-s seraient
substantiellement différent-e-s des hétéros en termes de culture, de
pensée, de vision du
monde, de vécu et d'idéologie elle-même.</div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
Bien sûr, dans la vraie vie, ce n'est pas tout à fait vrai. Par
exemple, les motivations des parents opposés à la levée de
l'anonymat, quelque soit leur orientation sexuelle, sont très largement
similaires : peur de la chute des dons, <a href="https://www.donorsiblingregistry.com/blog/curiously-not-curious/">peur de se voir trahi-e par ses propres enfants (particulièrement dans le cas du parent non-biologique), peur de se voir perturbé-e dans la vision de sa propre famille...</a></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
Seule l'expression de ces sentiments diffèrent, suivant le type de
famille : les hétéros gardent autant que possible le secret sur la
conception de leurs enfants, parce qu'ils peuvent se permettre cette
fiction, tandis que les FMLR, incapables de garder le secret,
minimisent l'importance de la biologie.</div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
De façon plus importante encore, prétendre que, sous prétexte que
les homosexuels auraient intrinsèquement une idéologie différente
de celle des hétéros, la critiquer relèverait de l'homophobie, ce
n'est pas un argument recevable dans le cadre d'une démocratie à
l'occidentale (et encore moins dans le modèle universaliste à la
française). Cela permet de se rendre compte où s'arrête l'égalitarisme et où commence le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Relativisme_culturel">relativisme</a> ou le communautarisme (le vrai, et non le fantasmé).</div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
D'autre part, on
trouve l'idée que la présence d'un homme dans les familles
hétéro-parentales qui ont recours à la PMA protégerait
intrinsèquement mieux celles-ci, d'un point de vue politique. Elles
vont jusqu'à imaginer des scénarios alambiqués dans lesquels <a href="https://twitter.com/Siili_Sk/status/1221433808077185025">les enfants des lesbiennes seraient placés sous l'autorité parentale d'un type qu'ils n'ont jamais connu au nom de leur droit d'avoir un père et une mère</a>. En plus de totalement méconnaître les opinions
de la droite et de l'extrême-droite françaises réelles sur la
question de l'accès aux origines (en pratique, ces dernières sont
souvent beaucoup plus « pro-donneurs » ou « pro-secret parental » que les FMLR ne se
l'imaginent), ce projet serait à la fois impossible à mettre en
place, contre-productif et probablement même inconstitutionnel.
</div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
Et après, elles
considèrent qu'<a href="https://twitter.com/tartyrex/status/1257990575623598080">éviter de coucher par inadvertance avec un demi-frère ou une demi-sœur biologique</a> est <a href="https://twitter.com/tartyrex/status/1257994233497165825">un <i>« argument choc complètement tordu »</i></a>.<br />
<br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-style: normal;"><span style="font-weight: normal;">[5]L'association </span></span></span></span><span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-style: normal;"><span style="font-weight: normal;"><a href="https://pmanonyme.asso.fr/">PMAnonyme</a>, implicitement visée à travers toute cette campagne de harcèlement, a notamment co-signé des tribunes dans la presse avec</span></span></span></span><span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-weight: normal;">
l'<a href="https://adfh.net/" style="font-style: normal;">ADFH</a>, association homoparentale qui milite de longue date pour la levée de
l'anonymat des dons de gamètes, mais aussi <a href="https://www.le-refuge.org/">Le Refuge</a>, le <a href="https://ravad.org/">RAVAD</a>,
<a href="https://www.stophomophobie.com/?gclid=CjwKCAjw4871BRAjEiwAbxXi263wuNnD0iripsl62PYG85yOGITLFkF2nHQA3j4nnMxx6H7hntIbihoCLpcQAvD_BwE">Stop Homophobie</a>, les associations religieuses <a href="https://www.davidetjonathan.com/">David et Jonathan</a> et
<a href="https://beit-haverim.com/">Beit Haverim</a>, des <a href="https://enfantsdecambaceres.fr/">franc-maçons LGBT</a>, des représentants
d'organisations LGBT proches des grands partis du centre et de la
gauche, ainsi qu'avec <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Caroline_M%C3%A9cary">Caroline Mécary</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Martine_Gross">Martine Gross</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Christophe_Beaugrand">Christophe Beaugrand</a>,</span></span></span><span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-style: normal;"><span style="font-weight: normal;">
<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Marie_Labory">Marie Labory</a> et <a href="https://ethopol.hypotheses.org/jerome-courduries">Jérôme Courduriès</a>.</span></span></span></span>
<span style="font-style: normal;">Il existe également d'autres organisations LGBT</span> <span style="font-style: normal;">qui
sont en désaccord avec PMAnonyme concernant certains détails légaux techniques,
mais qui ne s'opposent pas (ou plus) à la levée de l'anonymat des
dons de gamètes,</span> prise dans ses grandes
lignes. Voir aussi <a href="https://www.ifop.com/wp-content/uploads/2019/06/116-446_Rapport_Ifop_ADFH_2019.05.24Don.pdf">ce sondage</a>, qui date de l'année dernière.<br />
<br />
[6]À la légalisation desquels même le juriste franco-argentin ultra-libertaire Daniel Borrillo se montre pourtant favorable.<br />
<br />
[7]À ce sujet, <a href="https://www.donorsiblingregistry.com/blog/curiously-not-curious/">un très bon article (en anglais)</a> aborde justement cette question-là.<br />
<br />
[8]Cela pourrait paraître exagéré, mais, toutes proportions gardées, on peut noter de troublantes similitudes entre le discours d'un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Incel">incel</a> <a href="https://fstdt.com/CQ74">qui fait l'apologie du viol parce que la prostitution est illégale</a>, et celui d'<a href="https://twitter.com/garIicslut/status/1257747866455609347">une FMLR qui fait l'apologie du fait de concevoir un enfant dans le dos d'un homme (par trouage de préservatif) parce que la PMA ne sera pas légale dans les conditions qu'elle aurait souhaitées</a> (je ne suis pas ici en train de prétendre qu'il s'agirait là de deux situations parfaitement équivalentes, bien entendu). Une pamphlétaire telle que <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Marcela_Iacub">Marcela Iacub</a> offre ainsi une possibilité de convergence fortuite entre FMLR et incels.<br />
<br />Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-19200555581426696942020-01-16T12:43:00.001+01:002020-06-16T21:25:31.554+02:00Le paysage des associations pour le droit d'accès aux origines en FranceEn ce contexte de <a href="https://twitter.com/DonsGametes/status/1215164543451705344">revirement absurde des sénateurs sur la question de l'accès aux origines</a>, j'avais envie de reparler de ce sujet.<br />
<br />
En France, à ma connaissance, il n'existe que deux associations qui se battent pour le droit d'accès aux origines des personnes conçues par don de gamètes.<br />
<br />
D'un côté, il y a <a href="http://www.pmanonyme.asso.fr/"><i>PMAnonyme</i></a>, de l'autre <a href="https://associationorigines.com/"><i>Origines</i></a> (si l'on exclut l'<a href="http://www.adedd.fr/">ADEDD</a>, supposément dirigée par des personnes nées de dons mais qui s'oppose à l'accès aux origines).<br />
<br />
Tout ce qui suit est très relatif, mais la première association est probablement la plus connue des deux, tandis que la seconde est surtout connue par son fondateur, qui est une personnalité assez médiatique.<br />
<br />
Le principal clivage entre les deux associations réside dans l'attitude à adopter par rapport à la RCA (Reconnaissance Commune Anticipée de filiation, un mode de filiation qui serait spécifique à certaines personnes conçues par don de gamètes, notamment celles hors couples H/F), <i>PMAnonyme</i> souhaitant l'étendre à tous les couples tandis qu'<i>Origines</i> s'y oppose pour tous les couples.<br />
<br />
En ce qui me concerne, je pense que soutenir la RCA serait la solution qui me semblerait à la fois la plus convenable et la plus logique du point de vue des droits des enfants (en plus de potentiellement mieux sécuriser leur filiation), et dont les enfants de couples hétéros bénéficieraient le mieux (parce qu'elle permettrait de mieux lutter contre les secrets de famille), alors même que ces enfants-là sont, pour le moment, exclus de cette procédure. Alors comment se fait-il qu'<i>Origines</i> s'y oppose ?<br />
<br />
Sans rentrer dans les détails, j'ai cru comprendre que son principal promoteur, entre autres, par peur absolue que la cause de l'accès aux origines - notamment à cause de diverses tentatives de récupérations idéologiques, intéressées mais néanmoins fondamentalement hypocrites - ne puisse être perçue comme trop conservatrice, voire réactionnaire, avait décidé de jouer à fond la carte de la « respectabilité » vis-à-vis d'un certain milieu dit « progressiste »[1] et bien organisé politiquement.<br />
<br />
A ce sujet, il est à noter que d'ordinaire ce sont plutôt les groupes minoritaires « typiques » qui essaient de prendre leurs distances vis-à-vis d'images perçues comme dégradantes, véhiculées par le camp conservateur et agitées par celui-ci comme repoussoir. On aurait donc là un exemple assez surprenant de personnes pour qui ce serait l'assimilation, réelle ou fantasmée, avec le camp conservateur qui serait perçue comme infamante, et qui essaieraient de tout faire pour s'en démarquer, quitte à perdre en radicalité (assez paradoxalement).<br />
<br />
Attention, entendons-nous bien, la politique de la respectabilité n'est pas nécessairement une mauvaise chose en soi. Certains stéréotypes sont effectivement très nuisibles, et il peut être souhaitable et même nécessaire d'aller à leur encontre. Dans certains cas, les stéréotypes peuvent même s'avérer être des pièges qui peuvent mener jusqu'à défendre des choses qui ne devraient pas être défendables, ou à se montrer en quelque sorte plus conservateur et moins radical qu'on ne le prétend soi-même.<br />
<br />
La politique de la respectabilité peut aussi être associée à une certaine forme de pragmatisme et d'enrichissement idéologique (en prenant mieux en compte les objections et les différentes facettes d'un même problème), là où l'anti-respectabilité peut être davantage associée à diverses formes d'utopisme, de cynisme, de jusqu'au-boutisme, de rigidité idéologique ou de dogmatisme.<br />
<br />
Par exemple, l'ADFH est parfois raillée par les militants LGBT les plus « radicaux » notamment à cause de la perception d'une certaine tendance[2] à lorgner du côté de la respectabilité, mais il n'empêche qu'il s'agit à ma connaissance de la toute première association LGBT à avoir revendiqué directement la levée de l'anonymat des dons de gamètes, et pas une solution intermédiaire comme le double guichet.<br />
<br />
Cependant, la respectabilité peut aussi devenir une mauvaise chose, notamment lorsqu'elle a pour conséquences un affadissement des revendications, la compromission avec des groupes aux intérêts opposés ou le fait de ne plus rien proposer de véritablement innovant ou subversif.<br />
<br />
Pour revenir au sujet de base, autant cette approche pourra très certainement fonctionner auprès d'associations<i> mainstream </i>pas trop sectaires et Inter-LGBT-compatibles, autant celle-ci sera inefficace pour tenter de convaincre les groupes les plus « radicaux » tels que les <a href="https://twitter.com/gouinesCONTRE">Gouines contre Nature</a>, qui ne veulent pas entendre parler d'<i>« origines »</i> et récusent l'emploi de ce type-même de vocabulaire. Néanmoins, il est vrai que les groupes de ce type-là sont (heureusement) encore très marginaux, et qu'ils ne constituent probablement pas la cible principale de l'activité militante de l'association <i>Origines</i>, de toute façon.<br />
<br />
Bref, tout cela illustre qu'il y a un bon équilibre à trouver entre respectabilité et revendicativité.<br />
<br />
---<br />
<br />
[1]Encore que cela soit éventuellement assez relatif. Une des associations qui fait équipe avec <i>Origines</i>, <a href="http://gaylib.org/">GayLib</a>, représente historiquement les LGBT de droite et de centre-droit.<br />
<br />
[2]Objectivement très relative, tant la légalisation de la GPA, l'une de leurs revendications-phares, a été agitée comme repoussoir absolu par toute la droite et même certain-e-s allié-e-s auto-proclamé-e-s « progressistes ».<br />
<br />
<br />
<br />Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-60654964573771702462019-09-27T17:22:00.031+02:002021-12-08T22:17:27.776+01:00Les arguments fallacieux des « Gouines contre Nature »L'<i>« intégrisme LGBT »</i> que j'avais dénoncé dans <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/y-aurait-il-bel-et-bien-un-integrisme.html">un précédent article</a> vient enfin de se doter d'une expression politique : les <a href="https://twitter.com/gouinesCONTRE">Gouines contre Nature</a> (que nous appellerons ci-après GCN, pour simplifier la lecture).<br />
<br />
Quelque part, paradoxalement, je considère que c'est une bonne chose que ce mouvement se dote d'une expression politique et d'une appellation, car jusque là, pour désigner cette idéologie, il fallait recourir à des termes trop ambigus (comme <i>« lesbianisme radical »</i>, <i>« intégrisme LGBT »</i>), qui pouvaient laisser croire que nous étions hostiles aux droits LGBT dans leur ensemble, alors que si l'on parle de <i>« GCN »</i>, on sait tout de suite à qui on a affaire.<br />
<br />
Les GCN ont récemment organisé <a href="https://www.facebook.com/events/715647285574368/">un événement</a> place Saint-Michel à Paris, le 5 octobre. L'objectif en est de dénoncer les <i>« manquements »</i> du projet de loi actuel, à savoir les insuffisances en matière de parentalité trans mais surtout, aussi, la levée de l'anonymat des donneurs (et ce, <a href="http://www.inter-lgbt.org/wp-content/uploads/2019/06/DossierDePresse2019-v6.pdf">bien que l'accès aux origines fasse partie des revendications de l'Inter-LGBT en 2019</a>).<br />
<br />
Soyons clairs : ce ne sont absolument pas les questions liées à la parentalité trans (qui me semble être un combat tout à fait légitime) que je conteste (même si les GCN instrumentalisent certainement la question pour gagner des sympathisant-e-s et ne pas parler du reste). Plutôt le fait que dans ce cas, l'anonymat soit toujours défendu avec des arguments qui ne résistent pas à l'analyse critique.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
</div>
En effet, dès l'introduction, il est écrit : <i>« <span face=""helvetica" , "arial" , sans-serif" style="background-color: white; color: #1d2129; font-size: 14px; white-space: pre-wrap;">Nous appelons au rassemblement le 5 octobre 2019 pour les droits reproductifs, pour le droit à disposer de nos corps librement, nos gamettes [sic] comprises. »</span></i><br />
<br />
J'aimerais revenir sur cette notion de <i>« droit à disposer de son corps librement »</i>, qui me semble mobilisée à tort et à travers. Pour moi, cette notion n'est rien d'autre qu'un artifice rhétorique. Rien que sur l'IVG, par exemple, on ne va jamais totalement au bout de ce que cette notion implique. À part quelques illuminé-e-s, personne ne défend le droit d'avorter jusqu'au neuvième mois de grossesse, par exemple. De même (à part les libertariens, probablement les plus cohérents dans cette démarche) personne n'aurait l'idée saugrenue d'utiliser cette notion pour revendiquer le droit de rouler en voiture sans mettre sa ceinture de sécurité, ou même de conduire en état d'ivresse et sans permis.<div>
<br />
Ensuite, techniquement, ce n'est même pas du <i>« droit à disposer de [leur] corps librement »</i> que parlent les GCN. Cette loi ne changera rien - ou presque, et dans un sens positif - à l'utilisation de leurs propres gamètes. En réalité, paradoxalement,
les GCN militent surtout, à première vue, pour le droit des
donneurs (majoritairement masculins) à disposer de leur corps à <i>eux</i>. Je
dis <i>à première vue</i>, car sous le régime français d'anonymat pur et simple,
ce droit à disposer de son propre corps est en réalité très
restreint, ce que beaucoup de donneurs déplorent eux-mêmes.<br />
<br />
Bref, on acceptait déjà auparavant que le droit des donneurs à disposer de leur corps connaissait de nombreuses limites, ce principe reste le même, seules les modalités vont changer.</div><div><br /></div><div><div><i>(Addendum du 8 décembre 2021 : l'idée sous-jacente, à savoir défendre sa « liberté de disposer de son corps » juste parce qu'on pense en avoir le droit, a très mal vieilli avec la pandémie de Covid-19 ; il n'y a qu'à voir comment l'extrême-droite a récupéré le slogan « mon corps, mon choix » pour s'opposer à la vaccination et aux mesures sanitaires. </i></div><div><i>Paradoxalement, sur la question de l'anonymat des dons de gamètes, la vision qu'ont les sympathisantes GCN de la libre disposition de son corps a davantage à voir avec celle des anti-vax qu'avec celle du militantisme féministe traditionnel. C'est d'autant plus étonnant que, si on peut reprocher des choses aux sympathisantes GCN, il faut leur reconnaître qu'elles se sont le plus souvent montrées très pro-vax et pro-mesures sanitaires, depuis le début la pandémie)</i></div>
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEid7eEPBRCcCGAJDCbJUVFpRaR6iOMdz_4Dq8B-bQax8CbDIQWJrLuNhztP7woqtzxdaSgVM-jgcO73RuiYyN5KtNLZUUyDCoVe4-gXfF6P1x2sE26R7ccXWQxiwrJeitjr3wbaRGxb/s1600/EFU47q9W4AAPWmr.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1123" data-original-width="794" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEid7eEPBRCcCGAJDCbJUVFpRaR6iOMdz_4Dq8B-bQax8CbDIQWJrLuNhztP7woqtzxdaSgVM-jgcO73RuiYyN5KtNLZUUyDCoVe4-gXfF6P1x2sE26R7ccXWQxiwrJeitjr3wbaRGxb/s640/EFU47q9W4AAPWmr.jpg" width="452" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgLAyE2SA581khWr-aPp4j61z9oBQOXMCr0kFFkPQJyJWBgg9t_zRt2TXDGTvAie53h2MMepKpBlGwJhB1jvtU_S1DsAw6JoeCvykS7PcNUshX-c0yvRzGQ985D9gub5N0peX52cOuW/s1600/EFU47q7WkAcyVW0.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1123" data-original-width="794" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgLAyE2SA581khWr-aPp4j61z9oBQOXMCr0kFFkPQJyJWBgg9t_zRt2TXDGTvAie53h2MMepKpBlGwJhB1jvtU_S1DsAw6JoeCvykS7PcNUshX-c0yvRzGQ985D9gub5N0peX52cOuW/s640/EFU47q7WkAcyVW0.jpg" width="452" /></a></div>
<br />
<br />
Continuons. Au début de leur tract, il est écrit « <span face=""helvetica" , "arial" , sans-serif" style="background-color: white; color: #1d2129; font-size: 14px; white-space: pre-wrap;"><i>La PMA voulue par la majorité et défendue par la ministre de la santé Agnès Buzyn transforme le donneur de gamète en “père biologique”, et le don de spermato en “origines” pour nos enfants. »</i></span><br />
<b><br /></b>
À ce sujet, il faut dores et déjà noter que non, ce n'est pas la <i>réforme</i> qui transforme le donneur de gamètes en <i>« père biologique »</i> (l'expression ne figure d'ailleurs même pas dans le projet de loi) et les spermatozoïdes en <i>« origines »</i>[1]. Ce sont des <i>personnes</i>, le plus souvent elles-mêmes concernées, qui utilisent ce langage - parfois, mais pas tout le temps. Pour défendre la première assertion (<i>père biologique</i>), les GCN s'appuient sur une phrase d'Agnès Buzyn qu'elle a prononcée lors d'une interview, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sophisme_par_association">pour prétendre que ce serait comme cela que tous les partisans de la réforme verraient les choses</a>. Certes, elles peuvent déplorer qu'Agnès Buzyn parle d'<i>« origines »</i> et de <i>« père biologique »</i> (expressions pourtant techniquement correctes) mais le déploreront-elles lorsque ce seront leurs propres enfants qui le feront ?<br />
<br />
Ensuite : <i>« <span face=""helvetica" , "arial" , sans-serif" style="background-color: white; color: #1d2129; font-size: 14px; white-space: pre-wrap;">Nous refusons de laisser l’Etat nous imposer des présences masculines dans nos familles, car nous y voyons une manière de nous rappeler que celles-ci n’ont de la valeur seulement quand nous avons un lien avec un homme. </span></i><span face=""helvetica" , "arial" , sans-serif" style="background-color: white; color: #1d2129; font-size: 14px; white-space: pre-wrap;"><i>Nous voulons vivre nos maternités librement et nous n’admettons pas que l’ordre répressif hétérosexuel nous impose ses termes et sa vision réactionnaire de la famille.</i> </span><i><span face=""helvetica" , "arial" , sans-serif" style="background-color: white; color: #1d2129; font-size: 14px; white-space: pre-wrap;">»</span></i><br />
<br />
Ce passage révèle une profonde méconnaissance des revendications des personnes IAD, qui entrevoient toutes l'accès aux origines comme un droit ouvert à l'enfant et non pas comme une obligation imposée aux parents. Je répète encore, en quoi, pour un enfant, le fait de pouvoir avoir accès à l'identité de son géniteur à sa majorité légale constitue-t-il un moyen d'imposer une <i>« présence masculine »</i> à sa famille ? À ce stade-là, je me pose donc la question : ou bien les GCN n'ont pas compris le projet de loi, ou bien elles n'utilisent cet argument que comme façade pour cacher d'autres intentions. Notamment, et je le dis tel quel, la peur de la liberté que pourraient avoir leurs propres enfants dans leur façon d'envisager leur famille[2].<br />
<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
En fait, ce passage
relève de la désinformation pure et simple, et c'est à
cela qu'il faudra être particulièrement vigilant.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
</div>
<span face=""helvetica" , "arial" , sans-serif" style="background-color: white; color: #1d2129; font-size: 14px; white-space: pre-wrap;"><i>« On nous rejoue la musique de 2013, en opposant le droit des femmes lesbiennes et célibataires à faire famille à la thèse préférée de l’extrême droite : l’intérêt de l’enfant. </i></span><span face=""helvetica" , "arial" , sans-serif" style="background-color: white; color: #1d2129; font-size: 14px; white-space: pre-wrap;"><i>Nous devrions tout accepter, de la levée de l’anonymat des donneurs au monopole complet des médecins sur le processus de procréation, sous peine d’être pointée du doigt comme des femmes capricieuses, égoïstes et négligentes du bien-être de leurs enfants. Ces arguments, nous les connaissons bien, puisque nous les entendons quand nous avortons, quand nous accouchons sous X, et à chaque fois que nous luttons pour le droit de disposer librement de nos corps. </i></span><i style="color: #1d2129; font-family: helvetica, arial, sans-serif; font-size: 14px; white-space: pre-wrap;">»</i></div>
<br />
Ou quand le simple fait de parler d'intérêt de l'enfant fait de vous une personne d'extrême-droite... Rappelons à ce sujet que la notion d'intérêt supérieur de l'enfant provient de la <a href="https://www.unicef.fr/sites/default/files/userfiles/50154.pdf">Convention des droits de l'Enfant de 1989</a> (<a href="https://www.humanium.org/en/declaration-rights-child-2/">en fait, elle est même plus ancienne que cela</a>). D'extrême-droite, l'ONU ?<br />
<br />
Par ailleurs, l'extrême-droite, la vraie, a toujours été profondément hostile aux droits de l'enfant, et ne ne fait en réalité qu'<i>instrumentaliser</i> la question contre les populations LGBT lorsque cela l'arrange, de la même façon qu'elle instrumentalise les droits des femmes et la laïcité contre les populations d'origine étrangère lorsque cela lui convient.<br />
<br />
Par opposition, ce serait une idée de gauche que de prétendre que l'enfant n'a pas d'intérêt ? Étrange perspective...<br />
<br />
Lorsqu'on lit la suite, on se rend compte qu'elles revendiquent en réalité un droit à ce que leurs décisions personnelles ne puissent être critiquées, même lorsqu'elles ont un impact sur d'autres personnes (ce qui est le cas, dans le cas de l'accouchement sous X). Va-t-on promouvoir le droit à boire de l'alcool et à fumer pendant la grossesse au nom des mêmes arguments ?<br />
<br />
Je ne reviendrai pas sur les deux derniers paragraphes, car y répondre serait réitérer mes précédents arguments (juste préciser : personne de sérieux ne nie que leurs familles existent déjà ; mais leurs enfants aussi, pris comme groupe abstrait, sont déjà en train de retrouver leur géniteur que cela leur plaise ou non. Donc cet argument peut être retourné pour défendre la levée de l'anonymat).<br />
<br />
Il y aurait beaucoup à dire sur cette étrange fascination paradoxale, très certainement inconsciente, qu'exercent certaines idées libertariennes et/ou conservatrices, notamment un certain type de modèle familial autoritaire, sur les sympathisantes GCN[3], notamment l'idée que <i>« si
les enfants n'appartiennent pas à leurs parents, ils appartiennent à
l'Etat »</i> ou <i>« les parents comme premiers éducateurs de leurs enfants »</i>, toutes historiquement des idées de droite. C'est là qu'on voit que les extrêmes se rejoignent.<br />
<br />
Certaines sympathisantes GCN semblent même envier aux hétérosexuels leur capacité à cacher à leurs enfants le secret de leur conception, alors que les personnes IAD ne le voient justement pas comme une bonne chose. Paradoxalement,
certaines associations autrefois opposées à la levée de l'anonymat
s'opposent à la RCA, qui garantirait l'accès aux origines pour les enfants de couples hétérosexuels, et les sympathisantes GCN elles-mêmes soutiennent, indirectement, l'idée que les couples hétérosexuels puissent cacher son mode de conception à leur enfant.<br />
<br />
Bref, tout cela illustre parfaitement bien l'écueil, voire l'impasse d'un certain militantisme dogmatique enfermé dans un carcan idéologique et peu ouvert à la discussion. Les LGBT valent mieux que ça. S'il est impossible
d'avoir un débat rationnel avec les sympathisantes GCN les plus extrémistes, il
est en revanche possible de discuter avec des personnes qui seraient
tentées par cette idéologie, afin d'en réfuter les arguments les
plus répandus. D'où la nécessité
de rester le plus inclusif possible envers les populations LGBTI+, afin de leur éviter de tomber dans le piège d'une idéologie sans issue.<br />
<br />
---<br />
<br />
[1]Dans ce contexte, parler d'accès aux origines est certes une simplification, mais aucune personne conçue par don que je connais ne réduirait ses origines personnelles à son propre donneur uniquement.<div><br /></div><div>[2]En réalité, on peut constater que les <i>Gouines Contre</i> ont saisi les enjeux du projet, dès lors qu'on les pousse à s'exprimer davantage dessus. C'est ainsi que j'ai pu écouter une <a href="https://gouinementlundi.fr/2019/12/pma-pour-toutes-pas-de-quoi-se-rejouir/">interview</a> d'une de leurs militantes sur le site <i><a href="https://gouinementlundi.fr/">Gouinement Lundi</a>, </i>qui évoque spontanément son opposition à la levée de l'anonymat : contrairement à d'autres personnes, ses arguments ne reposent pas sur de la désinformation ou des lieux communs (<i>« chute des dons »</i>, etc...), mais sur des motivations purement idéologiques, voire sémantiques. Même si elle ne pense probablement pas en ces termes, elle peine d'ailleurs à cacher sa méfiance envers la liberté dont pourraient disposer ses propres enfants.</div><div>
<br />
[3]Ce que trahit un de leurs slogans officiels (<i>« Pas d'État dans nos familles ! »</i>), leur intérêt personnel pour le <i>homeschooling </i>(<a href="https://www.instagram.com/gouinescontre/">source</a>), ainsi que la revendication implicite de voir leurs <i>familles</i> « protégées », et non leurs <i>enfants</i>.</div></div>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-66358138093814336152019-09-19T16:58:00.007+02:002022-06-24T20:12:46.580+02:00Y aurait-il bel et bien un « intégrisme LGBT » ?<div style="text-align: left;"><i><b><span style="font-size: medium;"><u>Mise en garde (août 2021)</u> :</span> cet article a initialement été rédigé à une époque où il était de bon ton, y compris chez certains sceptiques et progressistes, de tourner en dérision les « SJW ». Avec le recul, je réalise que si j'avais à le refaire, je ne pourrais certainement pas ré-écrire un tel article aujourd'hui, en tout cas en utilisant certains des termes que j'avais employés alors. Voir aussi <a href="https://ineakis.blogspot.com/2020/05/mes-evolutions-personnelles-sur-lacces.html">ici</a>, pour davantage de détails.</b></i></div><div style="text-align: center;"><i><br /></i></div><div style="text-align: center;">
<i>"Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde." </i></div>
<div style="text-align: center;">
<i>Albert Camus</i></div>
<br />
Il existe des intégristes dans tous les milieux, malheureusement. Chez les catholiques, les protestants, les juifs, les musulmans, les majorités et les minorités. Par delà leur extraordinaire diversité, tous les intégristes ont bien davantage en commun qu'ils ne voudraient l'admettre. Par exemple, tous semblent partager la conviction commune selon laquelle si les enfants n'appartiennent pas à leurs parents, c'est qu'ils appartiennent à l'État. Par ailleurs, tenter de débattre avec un intégriste, quel qu'il soit, c'est un peu comme essayer de jouer aux échecs avec un pigeon : il va renverser les pièces, chier sur le plateau et se pavaner fièrement l'air de rien, comme s'il avait gagné. C'est simple, les intégristes de tout genre ne font aucun effort pour comprendre la perspective de l'autre, puisqu'ils ont déjà toutes les réponses.<br />
<br />
Malheureusement, il existe aussi, en un sens, des personnes qui partagent ce genre de mentalité chez les LGBT, pourtant historiquement victimes de ces mêmes intégristes. Ce sera donc le sujet de cet article.<br />
<br />
Tout d'abord, je dois apporter quelques précisions. Pour qui en douterait, tou-te-s celleux qui me connaissent savent que je n'ai absolument rien contre l'idée que les homosexuels puissent élever des enfants, y compris en ayant recours à la PMA. Un homosexuel n'est donc pas un <i>« intégriste »</i> pour la seule et unique raison de vouloir élever des enfants, que ce soit seul ou en couple. Par ailleurs, les quelques familles homoparentales que je connais sont parmi les familles les plus ouvertes d'esprit qu'il m'ait jamais été donné de rencontrer.<br />
<br />
Avant d'aller plus loin, sans même parler d'<i>« intégrisme »</i>, les idées de complot, de propagande ou même tout simplement de lobby LGBT, sont des clichés réactionnaires et, partout dans le monde, ces notions sont souvent brandies contre des revendications tout à fait raisonnables, voire en opposition au simple respect élémentaire des droits humains.<br />
<br />
Une fois ces précisions posées, avançons.<br />
<br />
Pour commencer, ce que je vais dorénavant appeler l'<i>« intégriste LGBT »</i> (n'ayons pas peur des mots) est avant tout une espèce de <a href="http://menace-theoriste.fr/social-justice-warrior/">SJW</a><a href="http://lesquestionscomposent.fr/le-social-justice-warrior-trademark/">(TM)</a> dont l'activisme concerne principalement les questions LGBT[1]. Iel est particulièrement extrémiste et virulent en la matière. En fait, pour résumer, on pourrait dire que cet <i>« intégriste »</i> est un peu au combat LGBT ce que les<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Indig%C3%A8nes_de_la_R%C3%A9publique"> Indigènes de la République</a> sont à la lutte antiraciste.<br />
<br />
Ce qui préoccupe le plus l'<i>« intégriste LGBT »</i> en ces temps de débats bioéthiques, c'est la volonté de rendre les dons de gamètes non-anonymes (les enfants du dons pourra accéder à l'identité de leur donneur à leurs 18 ans). Pour diverses raisons, l'<i>« intégriste LGBT »</i> y voit une forme de lesbophobie honteuse, à peine dissimulée.<br />
<br />
Certes, certains arguments avancés peuvent sembler légitimes. Il est vrai qu'on peut critiquer le <i>timing</i> de cette proposition (l'ouverture de la PMA à toutes les femmes et la levée de l'anonymat sont discutés au même moment) ainsi que le langage employé par la ministre Agnès Buzyn, qui ne témoigne pas toujours d'une véritable maîtrise du sujet.<br />
<br />
Mais s'appuyer uniquement sur ces deux arguments n'est pas très honnête, intellectuellement.<br />
Il y a d'autres arguments. Examinons-les de plus près.<br />
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> avance que la fin de l'anonymat entraînerait mécaniquement une chute, voire une disparition des dons de sperme. Cela a beau être démenti par l'expérience des pays voisins qui nous ont devancés en la matière, l'intégriste LGBT n'a que faire des études, de l'empirisme et de ce qui se passe à l'étranger.<br />
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> avance aussi que la fin de l'anonymat précariserait sa famille et la menacerait d'être exposée à l'existence d'une figure masculine. Historiquement, il s'agissait effectivement d'une préoccupation légitime, mais on se demande bien en quoi le fait de pouvoir découvrir l'identité de son géniteur à 18 ans seulement, à sa majorité légale, à un âge où l'on censé être suffisamment mature pour bien faire la distinction entre géniteur et père, contribuerait à précariser des familles.<br />
<br />
Ce qui m'emmène à ce qui est peut-être la véritable raison, non-avouée, de cette opposition à la levée de l'anonymat : à savoir, la volonté de pouvoir exercer une forme de contrôle idéologique sur ses propres enfants, voire leur nier le droit à exprimer leurs propres opinions sur le sujet, afin de ne pas être ébranlé-e dans le confort de ses propres certitudes dogmatiques.<br />
<br />
Attention, si on ose plaisanter sur le fait que les <i>« intégristes LGBT » </i>traiteraient leurs propres enfants de lesbophobes parce que celleux-ci se demandent où est leur <i>« papa »</i>, on se voit tout de suite taxé de lesbophobie puante par mépris pour leur capacité pédagogique. À vrai dire, je ne pense pas <i>littéralement</i> que ces personnes accuseraient leurs enfants d'être lesbophobes si iels posaient des questions sur leur <i>« père »</i>. Mais l'on est en droit de douter, néanmoins, que l'adhésion à une idéologie aussi extrême facilite véritablement le dialogue vis-à-vis de ses propres enfants[2], à moins de chercher à tout prix de se séparer du reste de la société dans une véritable démarche intégriste.<br />
<br />
Il s'agit en effet d'une idéologie qui, en termes aristotéliciens, entend réduire l'origine d'un individu à sa pure cause finale, alors que les autres causes sont peut-être tout aussi importantes pour lui.<br />
<br />
Ainsi, il ne faut pas parler d'<i>« origines »</i>, même biologiques, mais uniquement de <i>« sperme »</i> ou de <i>« matériel génétique »</i>. Il s'agit pourtant là d'une des causes matérielles et formelles de la formation d'un individu, et en un sens, il s'agit donc bien d'origines, au moins au sens biologique du terme.<br />
<br />
De même, il ne faut pas parler de <i>« don »</i> mais d'<i>« assistance médicale »</i>. Il ne faut pas parler de <i>« père biologique »</i>, ni même de <i>« géniteur »</i> ou de <i>« donneur »</i> ; en fait, il faut aller jusqu'à nier l'existence d'un homme, ou même d'une personne, derrière le don de gamètes[3].<br />
<br />
Enfin, il ne faut pas parler de <i>« PMA »</i> mais de <i>« faire un enfant »</i>.<br />
<br />
On comprend qu'avec ce genre d'argumentaire, les partisans modérés de la PMA n'ont pas besoin d'ennemis.<br />
<br />
Cela montre que cette opposition à la levée de l'anonymat ne s'appuie pas que sur des arguments juridiques, elle est aussi <i>« morale »</i>. Par exemple, on peut être favorable au double guichet mais reconnaître qu'idéalement, il est préférable d'avoir recours à un donneur connu (par exemple chez certain-e-s libertarien-ne-s, par pure application de principes idéologiques). Ce n'est pas leur cas. Pour elleux, la morale est un truc de bourgeois, si bien qu'il est immoral de critiquer une femme qui aurait recours à un don anonyme, au nom de la formule <i>« son corps, son choix »</i> quand bien même la libre disposition de son corps connaîtrait de nombreuses limites, notamment celle de ne pas utiliser son propre corps de façon qui puisse porter préjudice à d'autres personnes.<br />
<br />
Cela suggère aussi que, contrairement à ce que prétendent les réactionnaires - et contrairement à ce qu'iel prétend iel-même parfois - l'<i>« intégriste LGBT »</i> ne veut aucunement abolir la famille. En réalité, iel veut la recréer de façon tout aussi autoritaire, voire davantage, qu'auparavant. Un peu à la manière des bolchéviks de 1917, qui pensaient que l'on pouvait détruire l'État en renforçant considérablement son pouvoir.<br />
<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
L'<i>« intégriste
LGBT »</i> a toujours raison. Iel prétend que la levée de l'anonymat
est lesbophobe parce que la PMA concerne les lesbiennes, mais si on
lui dit qu'elle concerne aussi les hétéros, iel y voit la preuve que la
levée de l'anonymat est une revendication d'hétéro. Les biais liés au système actuel (en France, PMA réservée aux couples hétéros, avec très peu de donneurs non-blancs) sont complètement
ignorés et mis de côté.<br />
<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
L'<i>« intégriste LGBT »</i> connaît <i>le</i>
sens de l'Histoire mieux que quiconque (et surtout vous) et <i>sait</i>
que vous êtes réactionnaire et iel progressiste. </div>
<br /></div>
L'<i>« intégriste LGBT »</i> veut absolument des enfants, mais ne se renseigne pas d'abord sur ce que vivent ces enfants (ou retient uniquement ce qui l'arrange). Iel n'écoute pas les concerné-e-s quand leur discours la dérange, et pratique le « saucissonnage du concernement », en rejetant les témoignages des personnes qui ne sont pas suffisamment concerné-e-s selon iel. Iel serait même presque prêt-e à les envoyer en camp de rééducation pour tenter les débarrasser de leurs pensées négatives, si iel le pouvait.<br />
De toute façon (et c'est une caractéristique qu'iel partage avec le réactionnaire), l'« intégriste LGBT » n'a que faire des études et des témoignages (sauf ceux qui vont dans son sens). Seule lui importe son idéologie[4].<br />
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> est un-e habitué-e des faux dilemmes. Si on lui dit que les enfants sont concerné-e-s aussi par la PMA, tout d'un coup les LGBT cessent de l'être.<br />
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> accuse celleux dont les ressentis ne lui plaisent pas de verser dans le « pathos » mais son indignation à iel doit toujours être considérée comme parfaitement légitime, sans jamais verser dans le pathos.<br />
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> pratique le purisme idéologique, et sur les réseaux sociaux, bloque souvent - et parfois même si iel n'a jamais interagi avec elleux - les personnes qui émettent des opinions qui lui déplaisent, même lorsqu'elles sont raisonnables et argumentées.<br />
<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
L'<i>« intégriste LGBT »</i> aime les
procès d'intention. Pour iel, si on demande l'accès aux origines
c'est que l'on prétend que les enfants iraient <i>forcément</i> mal
si iels ne les connaissaient pas. Il ne lui vient pas à l'esprit que
ce n'est que parce qu'il est <i>possible</i> qu'iels aillent mal que
nous le demandons.</div>
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> adore les amalgames et les raccourcis foireux[5]. Par exemple, pour iel, le simple fait de parler d'intérêt de l'enfant est<i> « fasciste »</i>. Lorsqu'on lui fait remarquer que ne pas avoir la possibilité de connaître ses origines biologiques n'est peut-être pas dans le meilleur intérêt de l'enfant, iel fait dévier la conversation en parlant de choses certes tout aussi importantes,<a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Whataboutism"> mais sans rapport direct</a>.<br />
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> est généralement misandre et hétérophobe (et le revendique ouvertement), tout en considérant que la misandrie et l'hétérophobie n'existent pas, parce que ces oppressions ne font pas système. C'est d'ailleurs pour cette raison que l'intégriste LGBT ne propose rien pour les enfants nés dans des couples hétérosexuels, et se moque de leur ressenti.<br />
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> s'identifie à la communauté LGBT toute entière (alors qu'il n'en constitue iel-même qu'une infime minorité) parce qu'iel s'en croit à l'avant-garde, et pour rendre impossible la critique rationnelle de ses arguments[6].<br />
<br />
<span style="font-family: "times new roman"; text-align: justify;">L</span>'<i>« intégriste LGBT »</i> est <span style="font-family: "times new roman"; text-align: justify;">pétri-e de contradictions. Iel peut simultanément prétendre que la levée de l'anonymat ferait chuter les dons et qu'il n'y a personne derrière les gamètes fournis, ou que la biologie n'a aucune importance et vouloir un donneur de la même ethnicité qu'iel pour son enfant.</span><br />
<br />
L'<i>« intégriste LGBT »</i> est toujours en colère contre la « méchante société » et lui attribue tous les problèmes que pourraient éventuellement connaître ses enfants. Si on lui dit que <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/contre-linstrumentalisation-des.html">certain-e-s enfants de familles homoparentales sont carrément devenus homophobes en partie à cause d'un problème de communication avec les parents</a>, ils en déduisent que si les enfants de familles homoparentales deviennent homophobes ce serait à cause de l'orientation sexuelle de leurs parents (et uniquement à cause de cela). Cela devient vite pratique comme excuse pour lui éviter de se remettre en question.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsfNgwQY3rRDuc4PB8nAqnBpC9BBsUGjRMiAM_gD5Ljhhtmr4wBaexLy699YG70ULYRBTxjfVlbT5K21bMvqvSrWkzdysleuU3sADgbHwyVNq8Eozdi6VGbkvoeh3ZuUu6rVvC5E1Q/s1600/Bingo.png" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="545" data-original-width="613" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsfNgwQY3rRDuc4PB8nAqnBpC9BBsUGjRMiAM_gD5Ljhhtmr4wBaexLy699YG70ULYRBTxjfVlbT5K21bMvqvSrWkzdysleuU3sADgbHwyVNq8Eozdi6VGbkvoeh3ZuUu6rVvC5E1Q/s1600/Bingo.png" /></a></div>
<div style="text-align: center;">
<i>Un résumé des arguments.</i></div>
<br />
Pour résumer, l'<i>« intégriste LGBT »</i> cause énormément de tort à la communauté LGBT, d'autant plus que les homophobes s'imaginent volontiers que tous les LGBT ressemblent à cela, à cause d'une minorité de personnes qui braillent plus fort que les autres sur Twitter.<br />
<br />
Maintenant, se pose la question de savoir comment réagir face à cela. Des personnes que je croyais de bonne volonté se sont récemment fait-e-s l'écho de leurs désinformations sur Twitter, parce qu'iels gravitaient autour de cette sphère. Pour contrer ce genre de rhétorique, je pense qu'il est essentiel de :<br />
<br />
- montrer que nous ne sommes pas « de droite » (certains peuvent l'être à titre personnel, mais certainement pas tous) ;<br />
- rester le plus inclusif possible envers les populations LGBT+ et mettre en avant leurs expériences, pour contrer celles des « intégristes » ;<br />
- et surtout, le plus important, refuser le jeu de la concurrence victimaire.<br />
<br />
Si cela ne convaincra évidemment pas les <i>« intégristes LGBT »</i> elleux-mêmes, cela semble dores et déjà fonctionner sur certaines personnes sensibles à leur désinformation.<br />
<br />
De toute façon, à force de rester les un-e-s sur les autres et de se fâcher avec tout le monde, les « intégristes LGBT » sont de plus en plus minoritaires, même au sein de la communauté LGBT. Leur sympathie potentielle dans l'opinion publique est proche du zéro absolu et leur poids politique inexistant.<br />
<br />
Iels ne sont qu'une nuisance temporaire. Nos véritables adversaires sont, et restent, La Manif Pour Tous.<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<br /></div>
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<div align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;">---</span></span></span><br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><br /></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;">[1]En réalité, surtout L, parfois G et T, plus rarement B. Mais dans tous les cas, une minorité de minorité. Et contrairement à ce que l'on pourrait penser, les personnes qui partagent cette idéologie ne sont pas nécessairement elles-mêmes LGBT.</span></span></span><br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><br /></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;">[2]E</span></span></span><span style="text-align: start;">n ce sens, toutes proportions gardées, les <i>« intégristes LGBT »</i> ressemblent un peu aux terroristes qui dénoncent les caricatures qu'on en fait, tout en ressemblant un peu eux-mêmes à ces mêmes caricatures.</span><br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><br /></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;">[3]</span></span></span>À l'inverse, on ne verra <i>jamais </i>un
homme gay ou bi, même « extrémiste », nier qu'une femme a joué
un rôle dans la conception de son enfant. Vu les préjugés actuels autour de la GPA, ce serait vu comme extrêmement misogyne de sa
part.<br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><br /></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><span style="font-family: "times new roman"; text-align: start;">[4]Il se peut qu'il y ait des enfants d'<i>« intégristes LGBT »</i> qui ne questionneront jamais leurs origines et adhéreront entièrement à leur idéologie, néanmoins on peut se poser les raisons de la construction d'un tel attachement.</span></span></span></span><br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><span style="font-family: "times new roman"; text-align: start;"><br /></span></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><span style="font-family: "times new roman"; text-align: start;">[5]Dans ce milieu, les militants pour l'accès aux origines sont parfois comparés aux militants anti-avortement, comme ceux des Survivants. En réalité, il y a beaucoup trop de différences entre les deux questions pour qu'on puisse réellement les comparer.</span></span></span></span><br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><span style="font-family: "times new roman"; text-align: start;"><br /></span></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><span style="font-family: "times new roman"; text-align: start;">D'une part, </span></span></span></span><span style="text-align: start;"> l'opposition à l'avortement est profondément enracinée dans des conceptions religieuses relatives à l'« âme du fœtus » ou au contraire à une vision purement matérielle de la vie (le fœtus</span><span style="text-align: start;"> a des bras, des jambes, etc, donc c'est un humain). Elle ne s'appuie pas sur des preuves empiriques.</span><br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><span style="font-family: "times new roman"; text-align: start;"><br /></span></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="text-align: start;">Ensuite, </span></span></span><span style="text-align: start;">l'IVG est un moyen d'éviter les grossesses non-désirées, tandis qu'au contraire la PMA est un moyen de tomber enceinte. Cette simple différence fait que, si l'on compare certains arguments relatifs à une naissance par empêchement d'IVG et à une naissance par PMA, ils pourront sembler étrangement similaires, bien qu'utilisés par des bords opposés sur la « libre disposition de son corps » (on peut par exemple citer l'accusation d'eugénisme, pouvant être brandie aussi bien par les anti-IVG que par les lesbianistes radicales, contre leurs adversaires respectifs, mais pour des raisons en apparence très différentes).</span><br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="font-size: small;"><span style="font-family: "times new roman"; text-align: start;"><br /></span></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="text-align: start;">Enfin, les Survivants ne sont pas des fœtus, et encore moins des fœtus avortés, alors que les membres de PMAnonyme sont au contraire des personnes directement concerné-e-s.</span></span></span><br />
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="text-align: start;"><br /></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="text-align: start;">Pour invalider davantage la comparaison, on peut noter d'une part que ce n'est pas parce que l'IVG est autorisée que celle-ci l'est jusqu'au neuvième mois de grossesse, et que la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et la Suède, pays où l'anonymat des donneurs n'existe pas, ont des lois plus libérales que les nôtres en la matière (de 18 à 24 semaines de grossesse contre 12 chez nous).</span></span></span></div><div align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm;"><div style="text-align: start;"><span style="font-family: times new roman;"><br /></span></div><div style="text-align: start;"><span style="font-family: times new roman;">Enfin, dernier point, les mouvements de personnes conçues par don sont souvent très proches des mouvements de personnes adoptées et nées sous X. Ces derniers mouvements, en général, n'apprécient pas de voir les anti-IVG considérer l'adoption comme une alternative à l'avortement (et l'accouchement sous X fut souvent vu de cette façon-là).</span></div>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="text-align: start;"><br /></span></span></span>
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";"><span style="text-align: start;">[6]</span></span></span><span style="text-align: start;">On voit d'ailleurs le même genre de manipulation chez les intégristes des autres communautés, généralement.</span></div>
</div>
<br />Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-18502603393451707392019-09-16T22:32:00.032+02:002021-06-23T13:27:46.491+02:00S'opposer à l'anonymat des donneurs de gamètes est-il lesbophobe ?Sur Twitter, il peut parfois être dangereux de défendre la levée de l'anonymat des dons de gamètes (que ce soit sur le plan légal ou même simplement moral). En effet, quels que soient notre niveau de « <i>wokerie</i> » personnelle, de prudence dans l'expression de nos propos ou de qualité de notre argumentation, une accusation infamante et tristement commune dans <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/08/acces-aux-origines-lopposition-de-gauche.html">certains milieux</a> vise à couper court à toute espèce de débat rationnel : celle de <i>lesbophobie</i>[1].<br />
<br />
Les arguments avancés pour étayer cette accusations sont principalement les suivants :<br />
<br />
D'une part, on ne parlerait d' <i>« accès aux origines »</i> que depuis la proposition d'extension de la PMA à toutes les femmes. C'est bien sûr faux, puisque cette revendication existe depuis bien plus longtemps que cela, et qu'on attendait une nouvelle révision des lois bioéthiques pour faire d'une pierre deux coups[2].<br />
<br />
Ensuite, s'opposer à l'anonymat des donneurs reviendrait à vouloir restreindre le recours à la PMA pour les lesbiennes (voire à s'opposer à la PMA tout court, pour certaines d'entre elles). A long terme, ce n'est pas nécessairement vrai, et plusieurs études suggèrent même le contraire.<br />
<br />
De plus, renoncer au don anonyme reviendrait à imposer une figure masculine aux couples de femmes et contribuerait à précariser ces familles. À vrai dire, on est quasiment dans la désinformation, à ce niveau-là. En effet, découvrir l'identité de son géniteur est un droit qui ne reviendrait qu'à l'enfant et que celui-ci ne pourrait exercer qu'à partir de ses 18 ans (c-à-d à sa majorité légale). On voit mal comment un exercice aussi tardif de ce droit pourrait précariser des familles, d'autant plus qu'à cet âge les enfants sont légalement majeurs, et que ce droit n'ouvre de toute façon aucune possibilité de filiation (on trouve parfois quelques anecdotes qui suggéreraient le contraire, mais elles sont, justement, relatives à un cadre juridique peu sécurisé).<br />
À moins que, tout simplement, cette inquiétude n'ait comme unique source la peur de la liberté que pourraient avoir nos propres enfants dans la façon de concevoir leur famille.<br />
<br />
Le prochain argument relève du plus pur <i>déshonneur par association</i> : en effet, le simple fait de parler de « <i>levée de l'anonymat</i> » constituerait une forme de concession honteuse à la rhétorique de<i> La Manif Pour Tous</i>. Comme suggéré dans un précédent article, certaines militantes radicales semblent être devenues allergiques à toute forme de rhétorique tournant autour de l'<i>intérêt supérieur de l'enfant</i>, et n'abordent la question des droits de l'enfant que sous l'angle de la <i><a href="https://rationalwiki.org/wiki/Whataboutism">whataboutery</a></i>. Que LMPT instrumentalise les concepts de droits de l'enfant et de vérité biologique est une chose, mais depuis quand défendre les droits de l'enfant est-il devenu une idée de droite ?<br />
<br />
Enfin, on peut noter un recours constant au <i>faux dilemme</i> : si on leur dit que les enfants conçus par don sont concernés par l'ouverture de la PMA et la fin de l'anonymat, cela signifie-t-il tout de suite que les lesbiennes cessent de l'être ? Et comment prétendre sérieusement que les enfants ne seront pas concernés par cette avancée (ce qui est clairement sous-entendu, parfois) ?<br />
<br />
Un dernier point concerne le vocabulaire utilisé, mais j'y reviendrais.<br />
<br />Les questions qu'il faut se poser, face à ces accusations, sont les suivantes :<br />
<br />- Est-ce que le recours à un don anonyme concerne exclusivement les lesbiennes (ou, de façon équivalente, les bisexuelles, les non-binaires ou les hommes trans...) ?<br />
<br />- Est-ce que le recours à un don anonyme est universel chez les lesbiennes ?<br />
<br />- Est-ce que les partisans du droit d'accès aux origines ne s'opposent au don anonyme que pour les lesbiennes ?<br />
<br />Les réponses à ces questions sont, respectivement, non (trivialement), carrément non (par expérience : toutes
les lesbiennes n'ont pas nécessairement recours à un donneur
anonyme pour devenir mères, et beaucoup d'alternatives existent - donneur avec possibilité d'être connu à la majorité de l'enfant,
donneur connu, co-parentalité, adoption, etc...) et non (par défaut, puisqu'à ma connaissance, il n'existe pas d'association de personnes conçues par don, même franchement réactionnaire, qui ne s'opposerait aux dons anonymes <i>que</i> pour les lesbiennes).<br />
<br />
De fait, et contrairement à certaines désinformations répandues dans ces milieux, le projet de loi actuel prévoit la levée de l'anonymat pour <i>tous</i> les couples, y compris hétérosexuels. Certes, ceux-ci pourront toujours, naturellement et légalement, garder le secret sur la conception de leur enfant, mais bizarrement, les militantes radicales s'opposent aussi aux arrangements légaux qui pourraient permettre de rompre le secret chez les couples hétéros.<br />
<br />
Autrement, il est dangereux de catégoriser tout un mouvement comme lesbophobe, à moins de bien savoir de quoi on parle ; de même qu'il est dangereux, pour les personnes en colère vis-à-vis de leur propre mode de conception, de penser (à tort) que toutes les lesbiennes soutiennent l'anonymat des donneurs, ou de croire que la lesbophobie (c'est-à-dire la haine) est une réponse appropriée face à l'anonymat des donneurs de gamètes. Le mouvement pour l'accès aux origines se doit de combattre et de détruire ce sentiment, dans les quelques rares recoins où celui-ci existe encore.<div><br /></div><div>De plus, ce serait oublier que l'anonymat
des dons de gamètes est depuis longtemps un sujet de débat actif au sein de la communauté
LGBT elle-même, et qu'il y a été remis en question dans de nombreuses
publications ces dernières années (que ce soit en France ou
ailleurs), avec des articles faisant notamment la promotion de la
recherche des relations génétiques (donneurs, demi-frères et sœurs biologiques, etc...) et/ou de la réglementation de l'industrie
afin d'abolir l'anonymat des dons, y compris dans les pays qui y sont les plus
attachés. En particulier, l'anonymat
du don a été remis en question dès les origines de la conception
avec tiers donneur et, notamment, dès que les LGBT ont eu accès aux
techniques de procréation médicalement assistée. Ceux-ci ont d'ailleurs été des pionniers pour
réclamer des dons de gamètes non-anonymes de la part de l'industrie de la fertilité. Par la suite, l'anonymat a été contesté par des personnes conçues par don, y compris LGBT elles-mêmes, y compris issues elles-mêmes de parents LGBT, <a href="https://www.familyequality.org/2019/12/17/podcast-donor-conceived-queerspawn/">y compris LGBT <i>et</i> issues de parents LGBT.</a> </div><div>
<p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";">De fait, n'importe
quel enfant élevé par des parents LGBT peut se revendiquer
comme <i>queerspawn </i>(néologisme anglo-saxon désignant les enfants élevés par des parents LGBT), qu'il y ait
eu recours ou non à des donneurs anonymes. Dans ce contexte, promouvoir l'anonymat des
donneurs alimenterait l'idée que seuls les enfants nés de dons anonymes
seraient de vrais <i>queerspawns</i>, voire pire, qu'ils ne le
resteraient qu'à la condition qu'ils ne retrouvent pas leur donneur,
et donc qu'en quelque sorte les donneurs seraient, en réalité, les vrais parents
de l'enfant.</span></span></p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">De même, il
n'existe aucune preuve (sauf rumination complotiste) que la levée de l'anonymat constituerait une quelconque menace pour l'existence de la communauté LGBT. En fait, prendre cet
argument au sérieux reviendrait peu ou prou à affirmer que la
communauté LGBT, en France, n'existerait même pas encore à l'heure actuelle, puisqu'elle n'a toujours pas
accès à la PMA de façon légale. De plus, malgré
l'anonymat, beaucoup de personnes (y compris des <i>queerspawn</i>)
ont déjà découvert leurs donneurs grâce à des tests ADN. </p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">En réalité, l<span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";">'anonymat
des dons est une institution aux motivations principalement natalistes, qui a été initialement conçue par des hétérosexuels et pour des
hétérosexuels. </span></span><span style="color: black;"><span style="font-family: "times new roman";">Certain-e-s
LGBT se le sont par la suite approprié parce que c'était l'option
la plus protectrice qui existait à l'époque d'un point de vue
légal, mais elle a tout de suite été critiquée. </span></span>Encore
aujourd'hui, la plupart des lesbiennes qui ont recours à des dons
anonymes le font soit par nécessité (l'anonymat étant imposé localement sur le plan légal), par recherche d'un certain profil de donneur (qui ne serait disponible que si le don est anonyme), par idée préconçue (notamment celle
qu'elles seraient toujours mieux protégées, d'un point de vue légal), ou encore parce qu'elles craignent que l'accès aux origines ne soit pas garanti, beaucoup moins souvent par conviction idéologique profonde.</p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">Dernier argument frappant, l'anonymat
des donneurs va à l'encontre des valeurs que le mouvement
LGBT a historiquement toujours défendues au cours de son existence : le droit
des enfants à se forger leurs propres opinions, à exprimer leur
personnalité, à vivre leur vie et à concevoir leur existence comme ils l'entendent, à disposer de leur corps (y compris, par exemple, en faisant des
tests ADN), à ne pas craindre de se sentir rejetés ni jugés par leurs
parents. L'anonymat
ne libère pas les lesbiennes ; au contraire, il leur inflige une
pression supplémentaire dans l'éducation de leurs enfants, en les
forçant à se conformer à un modèle idéologique intenable.</p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm;">
</p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm;">
</p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm;">
</p><p align="JUSTIFY" style="margin-bottom: 0cm;"><span style="text-align: left;">Pour finir, j'aimerais terminer sur le mode de pensée à l'origine de cette accusation.</span></p>
<br />
Comme déjà évoqué, celles qui en sont à l'origine ne conçoivent pas l'homosexualité comme une simple histoire d'attirances mais comme une idéologie (ce qui constitue déjà en soi un gros fantasme de <i>LMPT</i>, mais passons) et on pourrait même dire que certaines aspirent à en faire une religion, avec ses commandements (l'anonymat des donneurs) et ses blasphèmes (parler de <i>«</i> <i>père biologique »</i>, par exemple).<br />
<br />
Cette idéologie repose notamment sur l'idée que les lesbiennes (ou plutôt une vision fantasmée de ce que devraient être les lesbiennes, selon les adhérentes de cette idéologie) constitueraient le groupe ultime d'opprimées et se trouveraient donc, par là-même, au-dessus de toute critique éventuelle. Ainsi est rejetée l'idée que les lesbiennes puissent éventuellement être dominantes par rapport à d'autres groupes (suivant les courants et les circonstances, cela peut être les bisexuels, les pansexuels, les trans, les asexuels, les adeptes du BDSM, les personnes conçues par don...)<br />
<br />
On a déjà trouvé ce syndrome ailleurs dans l'histoire, que ce soit en Union Soviétique ou en Israël, par exemple.<br />
<br />
La diffusion de cette idéologie est favorisée par un certain entre-soi militant, caractérisé par un important sectarisme, et par une fermeture délibérée à la discussion rationnelle.<br />
<br />
Néanmoins, faut-il encore le rappeler, cette idéologie reste très minoritaire, même parmi les mouvements LGBT, et découle d'une mauvaise interprétation de ce que constitue le fait d'être de telle ou telle orientation sexuelle. En fait, plus que de nous amener à infléchir nos positions, j'ai surtout l'impression que cette situation risque de favoriser la lesbophobie (la vraie) dans nos rangs, chez des personnes peu informées, si l'on n'y prend pas garde et si elles se laissent instrumentaliser par <i>La Manif Pour Tous</i>. C'est pourquoi, à cet égard, les conseils que j'ai donnés précédemment sont d'une importance fondamentale.<br />
<br />---</div><div><br /></div><div>[1]Pour une définition de la lesbophobie de la part d'une grande organisation engagée sur le sujet, voir par exemple <a href="https://www.sos-homophobie.org/definitions/lesbophobie">ici</a>.</div><div><br /></div><div>[2]De fait, malgré certaines imperfections et notamment les tendances personnelles homophobes de certains parlementaires de centre-droit (qui ont d'ailleurs fini par voter <i>contre</i> le texte dans son ensemble, pour la plupart d'entre eux), il n'y a rien dans le texte de loi qui permette d'affirmer que la levée de l'anonymat aurait été motivée par des considérations lesbophobes (et si tel avait été le cas, l'extension de la PMA n'aurait probablement même pas été à l'ordre du jour).</div><div><br /></div><div>La levée de l'anonymat est d'ailleurs une mesure qui a été ouvertement soutenue par de nombreux partis progressistes et même certaines associations LGBT, et initialement, c'est surtout la droite qui s'y est opposée, dans un premier temps.</div><div><br /></div><div>Se demander si, malgré tout, cette coïncidence des deux mesures n'aurait pas été causée en partie (et inconsciemment) par des motivations lesbophobes sous-jacentes, c'est une interrogation légitime, mais cela mériterait probablement d'être le sujet d'un autre article.</div><div><br /></div><div><i>(Quoiqu'il en soit, dans les pays où existe une homophobie d'Etat avérée (Russie, Pologne, Hongrie...), celle-ci se drape le plus souvent dans la protection des personnes de moins de 18 ans. Or, avec le projet de loi actuel, c'est précisément cette catégorie de personnes qui n'aura pas le droit de découvrir l'identité de son géniteur.)</i></div><div><br /></div>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-56659776840006611112019-09-08T20:33:00.000+02:002019-09-09T17:44:07.541+02:00Contre l'instrumentalisation des témoignages (positifs ou négatifs) autour de l'homoparentalitéChez les gens de gauche (et les activistes LGBT, bien entendu), il est courant de partager des témoignages positifs autour de l'homoparentalité, pour montrer que « les enfants vont bien » et en espérant ainsi convaincre des personnes réticentes et/ou réactionnaires.<br />
<br />
Mais généralement, ils ne comprennent pas pourquoi les gens de droite ne sont pas convaincus par ces témoignages. C'est parce que ceux-ci ne les intéressent pas. Pour certains d'entre eux, un seul témoignage négatif suffit à discréditer l'homoparentalité.<br />
<br />
Et si on cherche des témoignages plus ou moins négatifs sur l'homoparentalité, on en trouve.<br />
<br />
<a href="https://thembeforeus.com/stories-donor-conceived-kids-w-gay-parents/">Certains sites</a> se sont faits une spécialité de recueillir ce genre de témoignages.<br />
<br />
Maintenant, penchons-nous sur la possibilité de décortiquer ceux-ci.<br />
Tout d'abord, gardons-nous bien d'invalider tout ressenti, aussi négatif soit-il. Là-dessus, souvenons-nous de ce que disait Acermendax sur les <a href="http://menace-theoriste.fr/social-justice-warrior/">SJW</a> (paradoxalement) :<br />
<br />
<i><span style="font-size: x-small;"><strong style="background-color: white; border: 0px rgb(225, 225, 225); box-sizing: border-box; color: #719430; font-stretch: inherit; line-height: inherit; margin: 0px; padding: 0px; text-align: justify; vertical-align: baseline;">Laisser la parole en priorité à ceux qui sont frappés par les discriminations est évidemment une bonne chose</strong><span style="background-color: white; color: #464646; font-family: "open sans" , "helveticaneue" , "helvetica neue" , , "helvetica" , "arial" , sans-serif; text-align: justify;">, cette prise de parole fait partie de la solution : elle rappelle aux dominants que d’autres types d’individus existent, qu’ils ont un point de vue et que le résultat de la violence sociale, ce sont eux qui le vivent. L’expression de ce ressenti est importante ; le privilégié serait donc bien inspiré de prendre conscience de ses privilèges et de la mettre en veilleuse quand il a la possibilité d’entendre un moins privilégié que lui s’attaquer au problème. Ce principe rejoint une éthique personnelle dont il est utile de faire la promotion de manière pédagogique. <b>Toutefois, si cette parole à l’opprimé fait sens dans le cadre du ressenti, elle devient absurde lorsqu’elle est étendue au cadre de la réflexion sur les dynamiques sociétales de préservation de stéréotype, ou sur les moyens de lutte contre les discriminations (extension que pratique volontiers le SJW)</b>.</span></span></i><br />
<br />
Ce ne sont donc pas les ressentis qu'il faut critiquer, mais les implications qu'il y a derrière telle ou telle instrumentalisation. Nous supposerons également que les témoignages sont de bonne foi (il est trop facile de suggérer que tel ou tel témoignage relèverait d'une fabrication). Cependant, je suis aussi obligé de préciser que certains de ses témoignages sont tronqués. Souvent, le contexte d'origine peut permettre de relativiser l'interprétation homophobe qui peut en être tirée.<br />
<br />
En l'occurrence, le premier témoin a deux mamans et se demande ce que cela ferait d'avoir un père, et se demande l'identité de son père biologique. Cela ne me paraît pas anormal. Il se trouve que l'un de mes grands-pères est mort bien avant ma naissance et que l'autre est décédé peu après. En conséquence, je me suis parfois demandé ce que cela faisait d'avoir un grand-père encore en vie. Le témoin indique même explicitement qu'il ne souhaite pas que celui-ci devienne un papa actif, qu'il veut juste connaître son identité. A aucun moment n'est sous-entendue l'idée selon laquelle l'homoparentalité serait quelque chose d'intrinsèquement mauvais et qu'il faudrait interdire le mariage pour tous.<br />
<br />
La deuxième témoin est apparemment la fille d'une mère célibataire (bien que lesbienne), donc le rapport à l'homoparentalité est déjà assez ténu en soi. Elle considère le donneur de sperme comme son père (ce qui arrive plus facilement lorsqu'on est l'enfant d'une mère célibataire) et désirerait le connaître et entretenir une relation père-fille avec lui. C'est son droit le plus strict, bien entendu, mais au-delà de ça il n'y a pas de réel sous-entendu politique, à part qu'il s'agit d'un sujet dont il n'est pas facile de parler avec sa mère.<br />
<br />
La troisième témoin considère ses deux mamans comme les meilleurs parents qu'elle et sa sœur ont pu avoir (en quoi est-ce un argument <i>contre</i> l'homoparentalité ?). Certes, elle veut un papa, mais cela ne me semble pas anormal (cf. précédemment) et elle indique qu'elle n'est ni contre le mariage pour tous, ni contre l'homoparentalité.<br />
<br />
Le quatrième témoin est l'enfant d'une mère célibataire, peut-être décédée (vu le temps utilisé). Il exprime des sentiments mitigés : d'un côté il évoque la <i>« kick-ass mom »</i> qui l'a mis au monde, de l'autre il souligne qu'elle ne saura jamais les dégâts qu'elle a causé en le privant de père, mais n'explicite pas davantage à ce sujet.<br />
<br />
La cinquième témoin a aussi une mère célibataire lesbienne. Elle a apparemment souffert de ne pas avoir de père, mais les arguments qu'elle donne n'ont que peu avoir avec le genre de son parent et visiblement davantage à voir avec la façon dont sa mère l'a élevée, et les difficultés qu'elle a eu à communiquer avec sa mère (dont elle n'est pas la seule responsable).<br />
<br />
La sixième témoin veut elle aussi un papa et semble être aussi dans un rapport d'opposition vis-à-vis de ses parents.<br />
<br />
La septième témoin aime ses deux mamans et veut un papa. Là encore, sa colère se situe contre la PMA et l'anonymat des donneurs en particulier, mais elle soutient l'adoption pour les couples homosexuels.<br />
<br />
Le huitième a été élevé par deux mamans et ne veut pas connaître son « vrai » papa. Il considère comme probable le fait que son père biologique soit un médecin peu scrupuleux. Cela l'a évidemment paniqué, mais cette histoire n'a que peu à voir avec le bienfondé ou non de l'homoparentalité.<br />
<br />
La neuvième voulait un papa parce que le papa de son meilleur ami était quelqu'un de génial qu'elle admirait. Elle a pleuré lorsqu'on l'a qualifiée de <i>« fille à papa »</i>, sachant qu'elle ne saura jamais ce que c'est.<br />
<br />
Le dixième avait une mère biologique bisexuelle, en couple avec une femme à la naissance, dont le père biologique est le neveu de sa mère sociale. Elle n'a pas cherché à le contacter, par respect pour cet arrangement, mais reste en contact avec la sœur et le cousin de ce monsieur. Mis à part que la situation n'est pas toujours facile à vivre pour elle à cause de tous ces arrangements et de ces séparations, il n'y a pas de réel sentiment négatif exprimé.<br />
<br />
La onzième veut un papa (encore), considère une famille normale comme ayant un papa et une maman et ne connaîtra jamais son père biologique.<br />
<br />
Le douzième est un athée élevé par des pères gays. Il met sa maladie mentale à l'adolescence sur le compte de leur homosexualité et considère même l'homosexualité comme une maladie mentale. A ma connaissance, il s'agit du seul de ces témoignages qui évoque explicitement l'idée selon laquelle les personnes LGBT feraient intrinsèquement de moins bons parents que les autres (mais d'autres témoins l'ont aussi indiqué ailleurs).<br />
<br />
La treizième a deux mamans. Elle n'a appris que tardivement que son donneur de sperme était en fait son « oncle ». Là encore, on trouve la critique d'un certain type d'arrangement, mais pas de l'homoparentalité en général.<br />
<br />
La quatorzième est la fille de deux mères lesbiennes séparées. Elle a souffert d'habiter dans un quartier conservateur à partir de l'âge de six ans, où elle a dû inventer des histoires pour cacher l'absence de père. Ce n'est que tardivement qu'elle s'est mise à rechercher son père biologique.<br />
<br />
Le quinzième a lui aussi deux mamans divorcées. Il souffre de ne pas avoir de papa (ou au moins un frère) dans sa famille. Il s'entend mal avec sa mère sociale et la famille de celle-ci.<br />
<br />
La seizième ne sait rien de son père/donneur et ne s'entend pas très bien avec sa mère biologique.<br />
<br />
Le dix-septième a deux mamans et ne connait pas sa famille biologique. Autrement, son témoignage est quelque peu confus.<br />
<br />
Le dix-huitième a deux papas et appelle sa mère biologique « maman » lorsque ses papas ont le dos tourné.<br />
<br />
Enfin, la dernière témoin a deux mamans, voulait un père bien qu'elle aime ses deux parents, et considère qu'on lui a menti lorsqu'on lui a dit qu'elle n'avait pas de père. Elle a connu plusieurs problèmes de stabilité émotionnelle et mentale à cause de cela.<br />
<br />
Que penser de tous ces témoignages ?<br />
<br />
D'abord, les thèmes récurrents :<br />
<br />
- séparation précoce des deux parents,<br />
<br />
- blocage de la communication vis-à-vis d'un des parents ou des deux (surtout si cela est accompagné d'un <i>« trip »</i> idéologique de leur côté),<br />
<br />
- décalage vis-à-vis d'un environnement conservateur, qui a contribué à ce que certains de ces témoins intériorisent leur homophobie, parfois jusqu'à l'extrême,<br />
<br />
- critique de certains arrangements (dont l'anonymat des donneurs), plus que de l'homoparentalité en général.<br />
<br />
Dans de nombreux témoignages, on ressent aussi un certain manque de préparation du côté des parents (ce qui est normal car personne ne peut tout anticiper dans la vie d'un enfant), mais qui devrait s'estomper dans d'autres familles avec le temps, notamment avec l'acceptation grandissante de l'homoparentalité et les revendications croissantes des personnes nées d'un don.<br />
<br />
A la lecture de ces témoignages, faut-il donc s'opposer à l'homoparentalité ?<br />
<br />
Je pense que non, et je vais vous expliquer pourquoi.<br />
<br />
Tout d'abord, je pense que lorsque l'on est favorable à l'homoparentalité (ce qui est mon cas), il faut au contraire rechercher activement ce type de témoignages. Il ne faut pas être favorable à l'homoparentalité <i>grâce aux </i>témoignages positifs ; il faut y être favorable <i>malgré</i> les témoignages négatifs. C'est ce qu'en rhétorique, on appelle la défense de <i>l'homme d'acier</i>, c'est-à-dire s'attaquer à la forme la plus forte de l'argument de son adversaire. Ou, en termes poppériens, il s'agit de chercher la <i>réfutation</i> plutôt que la <i>confirmation</i> de nos thèses.<br />
<br />
En l'occurrence, est-ce que ces témoignages remettent en cause l'homoparentalité ?<br />
<br />
Non. Je pense que les difficultés qui traversent ces familles sont davantage dues à la façon dont celles-ci sont gérées (manque de communication et/ou de disponibilité des parents, difficulté de bien s'armer face à un environnement conservateur, manque de soutien et d'accompagnement des parents et des enfants...) qu'à l'homoparentalité en elle-même.<br />
<br />
Certes, la personnalité des enfants eux-mêmes peut aussi favoriser ce genre de problèmes. <a href="https://medium.com/@rzekameansriver/how-you-can-ensure-your-donor-conceived-children-are-happy-17b33ed43740">Personne ne peut s'assurer qu'une personne née par don sera heureuse</a> vis-à-vis de sa conception. On ne peut qu'augmenter la probabilité que ce sera le cas.<br />
<br />
Et les traits de personnalité qui favorisent ce genre de difficultés et d'accrochages peuvent aussi favoriser le genre de rébellion adolescente des enfants contre la façon dont ils sont élevés dans les familles dites <i>« normales »</i>, pour des raisons souvent légitimes : la rébellion peut être une attitude saine, qui permet de faire évoluer la famille en tant qu'institution. Cependant, pour ces familles-là, personne n'irait remettre en cause des droits fondamentaux, comme le droit au mariage, sous prétexte de désaccords avec la façon dont ces familles élèvent leurs enfants. Et c'est bien là qu'on voit le cœur du problème.<br />
<br />
Dans le pire des cas, les personnes qui haïssent leurs propres origines, cela existe dans tous les milieux et dans toutes les communautés, et seuls les « antis » verraient cela comme un argument valable contre l'existence de ces milieux et de ces communautés.<br />
<br />
Sur le plan de la santé mentale, à éventuellement une exception près, la plupart de ces témoins ne se débrouillent en réalité pas si mal que cela (leurs difficultés éventuelles existent aussi dans d'autres familles, pour d'autres raisons), et certains d'entre eux sont même de parfaits petits militants conservateurs.<br />
<br />
Tous ces témoignages précédents permettent aussi de mieux comprendre pourquoi les familles hétéroparentales infertiles tiennent tant au secret, cette pure manifestation de privilège hétérosexuel : par peur qu'en cas de difficultés dans la famille, l'ouverture du secret ne serve d'argument au rejet d'un des deux parents. Malheureusement pour eux, le secret est difficile à tenir à long terme. L'abandonner permettrait de marquer une forme de solidarité avec les familles homoparentales dans la façon de faire famille et de déstigmatiser une bonne fois pour toutes l'engendrement par don.<br />
<br />Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-63481481362760582012019-09-08T16:43:00.001+02:002019-09-18T12:42:39.475+02:00Accès aux origines : l'instrumentalisation conservatrice en Amérique du NordEn France, l'idée d'accès aux origines est en train de devenir largement consensuelle, et à part certaines personnes, <a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/08/acces-aux-origines-lopposition-de-gauche.html">notamment quelques beaufs hypocrites, dogmatiques et ignorants à droite et une poignée d'idéologues et de « lesbiennes radicales » à gauche</a>, la grande majorité ont compris que s'y opposer était politiquement peu défendable.<br />
<br />
Plus largement, dans la plupart des pays qui l'ont voté (<a href="http://pmanonyme.asso.fr/wp-content/uploads/2019/05/CARTE-MAJ-26_05_19-1.jpg">pour l'instant, mis à part le Portugal, ce surtout des pays de culture germanique/anglo-saxonne, protestante et/ou progressiste</a>), l'accès aux origines reste un sujet relativement consensuel. Là où il ne l'est pas, il est surtout controversé pour des raisons mercantiles et commerciales, dans des pays qui ne l'ont pas encore adopté, surtout des petits pays tels que le Danemark ou la Belgique (qui ont le double guichet), si l'on exclut l'Espagne. Récemment,<a href="https://www.petradesutter.be/dons_levee_anonymat"> c'est une eurodéputée transsexuelle verte belge qui a appelé à lever l'anonymat partout en Europe</a>. Et globalement, <a href="https://www.ifop.com/wp-content/uploads/2019/06/116-446_Rapport_Ifop_ADFH_2019.05.24Don.pdf">cette idée ne fait pas paraître de clivage gauche-droite clairement identifiable</a>.<br />
<br />
Mais est-ce le cas ailleurs qu'en Europe ?<br />
<br />
En Amérique du Nord, les choses semblent légèrement différentes.<br />
<br />
En effet, si l'on se renseigne un tant soit peu sur le sujet, il est facile de tomber sur des sites se faisant le relais d'une idéologie conservatrice, voire <i>très</i> conservatrice, et qui instrumentalisent la question en ce sens. L'une des principales figures du mouvement, Alana Stewart Newman, propage un discours à la limite de l'homophobie pure et simple, même si je dois lui reconnaître d'avoir soutenu Evan McMullin plutôt que l'actuel président, lors des dernières présidentielles. Mais cela reste sans commune mesure avec le discours ultra-réactionnaire d'une Katy Faust, par exemple.<br />
<br />
De fait, les quelques rares initiatives visant à réglementer l'industrie de la fertilité émanent plutôt d'hommes politiques républicains, les démocrates se montrant, à ma connaissance, encore plutôt frileux à ce sujet.<br />
<br />
Bien sûr, cela ne signifie pas que tous les enfants nés de dons (même uniquement ceux favorables à la levée de l'anonymat) penchent à droite : comme on pourrait s'y attendre, toutes les tendances politiques sont représentées. La principale association de mise en relation des demi-frères et sœurs génétiques, le <i><a href="https://www.donorsiblingregistry.com/">donor sibling registry</a></i>, est politiquement neutre (voire progressiste) et évite de stigmatiser les familles en fonction de leur constitution. Cela semble également être la position des principales associations nord-américaines en train d'émerger. Leurs revendications bénéficient également d'une couverture médiatique plutôt favorable dans les principaux journaux et médias de centre-gauche du pays.<br />
Mais il n'empêche que les personnalités les plus « bruyantes » sur le sujet ont encore un discours assez droitier.<br />
<br />
Qu'est-ce qui pourrait expliquer cette situation ?<br />
<br />
Je pense qu'il y a plusieurs éléments qui peuvent l'expliquer.<br />
<br />
D'une part, d'un point de vue général, les pays européens sont des pays de tradition interventionniste qui ont pris l'habitude de réglementer tout et n'importe quoi. <i>A contrario</i>, les États-Unis sont un pays de culture beaucoup plus libérale et individualiste. C'est ce qui explique que la PMA ait souvent été très sévèrement réglementée dans de nombreux pays européens, alors qu'elle ne l'a quasiment jamais été en Amérique du Nord.<br />
<br />
Mais il ne s'agit pas de la seule différence entre les deux continents en termes de culture politique. En effet, les États-Unis sont un pays extrêmement polarisé sur les questions de société[1], qui acquièrent souvent une importance qui serait difficile à imaginer en Europe, au point qu'on y parle souvent de <i>culture wars</i>.<br />
<br />
Tous ces éléments contribuent à expliquer la différence de contexte entre les deux continents.<br />
<br />
---<br />
<br />
[1]Pas seulement du côté conservateur ; en effet, certains arguments « libéraux » autour de l'avortement relèveraient quasiment du suicide politique s'ils étaient importés tels quels en Europe, comme Hillary Clinton qui déclare fièrement qu'elle soutient le droit à l'avortement jusqu'au neuvième mois de grossesse, par exemple. D'un point de vue européen, cette focalisation sur l'avortement en tant que droit de la femme a quelque chose d'assez paradoxal, lorsque l'on sait que l'IVG y est souvent très mal remboursée et peu accessible en pratique dans de nombreux États, en particulier pour les mineures (celles qui en auraient potentiellement le plus besoin, du fait des insuffisances de l'éducation sexuelle).Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-17055876355764691252019-08-23T12:16:00.001+02:002019-08-23T20:28:26.163+02:00« PMA sans père » : autopsie d'un sloganPour s'opposer au présent projet de loi bioéthique, l'un des arguments de <i>La Manif Pour Tous</i> consiste à agiter le spectre de la « <i>PMA sans père</i> ». De quoi s'agit-il exactement ? A quoi cela fait-il référence ?<br />
<br />
Si l'on se fie à ce slogan, ce n'est pas la PMA en tant que telle qui dérange véritablement LMPT*. Ce qu'il faut comprendre, c'est que tant qu'il y avait un père social qui pouvait se faire passer pour le géniteur de son enfant, la PMA était acceptable. Or, depuis que le secret ne peut plus tenir, celle-ci devient tout d'un coup problématique, et il faut s'y attaquer d'urgence.<br />
<br />
Un autre argument repose aussi sur la confusion, très fréquente à droite, selon laquelle la PMA serait ainsi détournée de son objectif premier « médical » et n'aurait donc pas à être remboursée par l'assurance maladie. La vérité est que la PMA n'a jamais été un traitement de l'infertilité (elle ne peut pas rendre fertile un homme stérile), même si on l'a souvent présenté ainsi. Puisque la PMA n'a jamais été un traitement médical et est pourtant remboursée par l'assurance-maladie, l'étendre à toutes les femmes ne devrait pas poser de problème de ce point de vue.<br />
D'ailleurs, avec la levée de l'anonymat, LMPT est implicitement en train d'admettre elle-même l'argument de la non-médicalité de la PMA, sans vouloir le reconnaître directement.<br />
<br />
Enfin et surtout, contrairement à ce que prétend LMPT,<a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2012/11/07/homoparentalite-aucune-etude-n-a-pu-demontrer-un-risque_1787295_3224.html"> l'immense majorité des études menées à ce sujet ne montrent pas de différences significatives de développement entre enfants élevés par des familles homoparentales et enfants élevés par des familles hétéroparentales</a>.<br />
<br />
Bref, c'est là que l'on s'aperçoit que, décidément, <i>La Manif Pour Tous</i> a bien grand peine à dissimuler son homophobie.<br />
<br />
---<br />
<br />
* En réalité, certains sympathisants LMPT hésiteraient carrément à s'opposer à toute forme de PMA avec tiers donneur, mais le pragmatisme politique leur fait préférer une forme de statu quo, <a href="http://www.lamanifpourtous.fr/wp-content/uploads/2016/09/RapportFamille.pdf">officiellement du moins</a>. Par mesure de cohérence, <i>La Manif Pour Tous</i> a renoncé à l'anonymat des donneurs depuis au moins 2016, mais cette position n'est pas universellement partagée à droite, notamment par les beaufs de Twitter et tous ceux qui confondent encore géniteur et père.Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-65972744636047641912019-08-21T19:41:00.018+02:002023-02-02T14:32:17.508+01:00Accès aux origines : l'opposition de « gauche »Tout d'abord, je tiens à remercier et à féliciter l'ensemble de la gauche et du centre français (update du 2 octobre 2019 : à l'exception du PCF et de Jean-Luc Mélenchon) pour s'être montrés beaucoup plus sensibles à la question de l'accès aux origines que je ne l'aurais espéré de leur part. Aujourd'hui, si l'on se fie aux communiqués et engagements de leurs organisations LGBTI respectives, la levée de l'anonymat des donneurs de gamètes est en passe d'être votée grâce aux voix de plusieurs grands partis de la gauche et du centre (et probablement même grâce à certaines voix de la gauche radicale et de la droite). Rétrospectivement, cependant, cela ne devrait avoir rien d'étonnant, pour plusieurs raisons au moins.<br />
<br />
Tout d'abord, parce que les individus de gauche montrent en général une meilleure capacité à intégrer des informations contradictoires que les individus de droite, <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Biology_and_political_orientation">si l'on se fie à certaines études américaines menées sur le sujet</a>. De fait, la gauche est passée championne dans l'art d'amalgamer des groupes dont on pourrait penser que les intérêts puissent parfois diverger, tels que les juifs, les musulmans, les personnes LGBT, les femmes, les défenseurs des animaux, etc... là où la droite a tendance à les opposer les uns aux autres sans réellement soutenir aucun d'entre eux.<br />
<br />
Ensuite, <a href="https://analysesynthese.wordpress.com/2015/09/07/lavortement-et-la-gauche/">comme d'autres l'ont déjà fait remarquer avant moi</a>, quelque soit la cohérence de leurs revendications avec son propre système de valeurs, la gauche aime bien les mouvements militants, en particulier ceux qui émanent directement des personnes concernées. C'est pourquoi elle restait très discrète voire muette sur le sujet tant que la première génération d'enfants nés de dons n'avait pas atteint l'âge adulte, mais depuis qu'on les entend parler de leurs expériences, les gens de gauche intelligents cherchent maintenant à ne pas se les aliéner.<br />
<br />
Enfin, je dirais qu'il y a tout simplement une grosse part de pragmatisme et une certaine volonté de « couper l'herbe sous le pied » de <i>La Manif Pour Tous</i> en la matière, de dénoncer l'hypocrisie et le misérabilisme de ses sympathisants, qui sont, dans le meilleur des cas, favorables au <i>statu quo</i>, et de partager la revendication d'accès aux origines pour mieux rejeter l'instrumentalisation absurde qui peut en être faite par le camp conservateur.<br />
<br />
Est-ce à dire que toute la gauche s'est convertie à la cause de l'accès aux origines ? Malheureusement, non.<br />
<br />
Avant d'aller plus loin, il me faut bien sûr préciser que la droite non plus ne s'y est pas entièrement convertie, et peut-être même dans des proportions moins fortes encore.<br />
<br />
J'aurais donc très bien pu écrire un article sur l'opposition de droite à l'accès aux origines, qui est numériquement plus importante il est vrai (en tout cas si l'on considère Twitter comme une source fiable). Mais, contrairement à l'opposition de gauche, celle-ci n'a même pas le mérite d'offrir un discours objectivement cohérent à critiquer. Une critique de l'opposition de droite se serait donc réduite à une critique générale de l'hypocrisie, de l'opportunisme et du cynisme de droite, chose que font déjà beaucoup d'autres auteurs avec bien plus de talent que moi. Puis, je considère que critiquer la gauche radicale, là où elle se fourvoie, est bien plus stimulant d'un point de vue intellectuel, ce que les intéressé-e-s devraient logiquement considérer comme un compliment, même si je ne reconnais que cela ne me fait pas plaisir d'un point moral, même si cela s'avère parfois nécessaire.<br />
<br />
Maintenant que les choses sont claires pour tout le monde, quelle est donc la nature de cette opposition ?<br />
<br />
Je pense qu'il existe tout au plus deux petits groupes de personnes qui font partie de cette opposition de gauche, et qui partagent par ailleurs de nombreuses convergences dans leur analyse de ce sujet[1][1bis].<br />
<br />
Le premier groupe est constitué de militants « pro-choix » radicaux, tels que Daniel Borrillo ou Morgane Merteuil.<br />
<br />
Le premier d'entre eux est un juriste et intellectuel argentin très engagé contre l'homophobie, et qui a accompli un travail remarquable sur les discriminations et la vulgarisation de la <a href="https://ineakis.blogspot.com/2012/10/bioethique-daniel-borrillo.html">bioéthique</a>. Malheureusement, ses analyses témoignent trop souvent d'un libertarisme suranné, <a href="http://ineakis.blogspot.com/2014/07/petit-bilan-de-mes-opinions-sur-le.html">ainsi que d'une certaine rancœur personnelle</a> <a href="https://ineakis.blogspot.com/2016/12/le-retour-de-la-revanche-de-daniel.html">contre ceux qu'il appelle les « conservateurs de gauche »</a>.<br />
Son dernier article pour Libération, intitulé <i><a href="https://www.liberation.fr/debats/2019/03/31/l-acces-aux-origines-ruse-de-la-raison-conservatrice_1718527">« L'accès aux origines, ruse de la raison conservatrice »</a></i>, est un pur concentré de désinformation, dans lequel les personnes déjà nées de dons sont totalement absentes de l'analyse. Ce faisant, Borrillo tombe paradoxalement dans les mêmes travers que <i>La Manif Pour Tous</i>, en confondant <i>géniteur</i> et <i>père</i>, <i>filiation</i> et <i>accès aux origines</i>, et autres confusions. De plus, Borrillo exagère (<a href="https://www.facebook.com/TheryIrene/posts/1097486293787479">de façon carrément malhonnête, si j'ai bien saisi</a>) l'importance de l' « expertise psychanalytique » dans cette revendication, alors même que d'une part cette « expertise » est, presque par définition, absente dans la plupart des autres pays, et que d'autre part la revendication émane avant tout des personnes concernées, le fait qu'en France celle-ci ait été récupérée par des psychanalystes étant secondaire au propos[2].<br />
<br />
M'est avis que si Borrillo laissait tomber ses rancœurs personnelles et son dogme libertarianisant, il ferait preuve de davantage d'empathie envers les personnes concernées. Sans doute ne s'est-il pas intéressé à la question, ce qui illustrerait un point qu'ont en commun tous les opposants de gauche à l'accès aux origines (mais j'y reviendrais peut-être ailleurs). Je dois lui reconnaître néanmoins d'avoir, semble-t-il, légèrement évolué sur la question de l'accès aux origines (et il a toujours soutenu la légalisation des tests ADN), ce qui n'est pas nécessairement le cas d'autres personnes.<br />
<br />
Notamment la seconde, Morgane Merteuil, qui est une activiste engagée pour les droits des travailleur-se-s du sexe, un combat tout à fait respectable, soit dit en passant. Cependant, elle s'oppose aussi à la levée de l'anonymat des donneurs de gamètes, même pour une simple question d'antécédents médicaux. Décryptons un peu ses arguments.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhdSml3mqAlRWZAeY_RIt1dpvxfCcfWjPtQzS3qHMAql2v7lhJc1uX6ApqbVtB2Ho0_SL9sgi6J1yY06HGbzhu1rviVghEPVNZ1f55acos-72JArF_iCAanomJrQpSkX875BTlqCaBt/s1600/morgane2.png" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1465" data-original-width="586" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhdSml3mqAlRWZAeY_RIt1dpvxfCcfWjPtQzS3qHMAql2v7lhJc1uX6ApqbVtB2Ho0_SL9sgi6J1yY06HGbzhu1rviVghEPVNZ1f55acos-72JArF_iCAanomJrQpSkX875BTlqCaBt/s640/morgane2.png" width="256" /></a></div>
<br />
<br />
D'une part, elle nous sort le classique <i>« tout le monde ne connait pas son père biologique, alors c'est pas grave de toute façon »</i> (c'est aussi ce qu'on appelle du nivellement par le bas ; <a href="https://www.dicocitations.com/citations/citation-99054.php">Laurence Parisot</a> ne renierait pas ce genre de rhétorique). Les situations qu'elle donne en exemples sont des conséquences de rencontres sexuelles avec possibilité, au moins théorique, de contester la filiation et d'interroger la mère à ce sujet, ce qui est très différent de situations provoquées délibérément et avec la complicité affichée de l'Etat.<br />
<br />
Ensuite, son second argument me paraît autrement plus pervers. Elle écrit : <i>« Mais utiliser l'argument du risque sanitaire pour légitimer toujours + le récit biologique me paraît être une mauvaise idée. » </i>Quand <i>« légitimer un récit »</i> devient plus dangereux qu'un risque sanitaire... On nage en plein délire ! D'autant plus que, pour « délégitimer » ce récit, Morgane Merteuil propose en fait la possibilité (voire l'obligation ?) d'imposer à certains enfants un contre-récit anti-biologique, alors même que l'importance à accorder au « récit biologique » appartient aux enfants, pas aux parents !<br />
<br />
C'est ainsi que paradoxalement, sur ce point-là précis, Morgane Merteuil incarne une gauche qui cesse de défendre les droits des personnes pour défendre des idéaux censés nous transcender. Mais où va le monde ?<br />
<br />
Elle a aussi défendu l'idée, répandue dans ce milieu, selon laquelle la recherche de ses origines biologiques aurait avant tout des « causes sociales ». Certes, je pense que les défenseurs de l'accès aux origines devraient éviter d'utiliser l'argument selon lequel rechercher ses origines biologiques serait un besoin naturel et inné de la nature humaine. Mais dans ses implications, le raisonnement ne tient pas. Car le désir de parentalité a aussi des causes sociales. Un point partout, la balle au centre ? On pourrait même dire que le fait de <i>ne pas</i> rechercher ses origines a <i>lui aussi</i> des causes sociales, notamment par « loyauté » envers le parent social. Pression contre pression, qui a raison ?<br />
<br />
<br />
<br />
Le deuxième groupe d'opposantes est constitué de personnalités émanant de la mouvance du lesbianisme radical, et qui préfèrent se terrer dans les tréfonds de Twitter (mais elles se trouvent en contact régulier et/ou en affinité idéologique profonde avec celleux précédemment cités). Elles doivent y être quelques dizaines au total, mais cela pourrait monter jusqu'à plus d'un millier de sympathisantes si l'on compte toutes celles qui se contentent de liker leurs posts, de les retweeter et/ou d'y répondre. Il faut bien comprendre que ce ne sont pas simplement des homosexuelles qui veulent juste vivre « normalement », y compris en se mariant et en ayant des enfants. Elles adhèrent à un projet « révolutionnaire » et utopique[3] qui vise à redéfinir toutes les notions communes de généalogie et de parenté, perçues comme intrinsèquement discriminantes, pour les affranchir totalement de leurs bases biologiques. Et cela passe par la volonté affichée de forcer leurs propres enfants à adhérer à ce schéma. Inutile de dire en quoi cette approche est contre-productive.<br />
<br />
Pardonnez-moi l'expression, mais beaucoup d'entre elles présentent des traits typiquement « <a href="http://menace-theoriste.fr/social-justice-warrior/">SJW</a> » presque caricaturaux. En effet, tout y passe : procès d'intention, offensement perpétuel, binarité de pensée, <i>ad hominems</i>, déshonneurs par association, absolutisme de la parole de l' « opprimé », relativisme culturel[4], et même appels à la violence. Je veux dire, quand on voit ce genre de message :<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5r5pfEpGxkVsujFLOsBgw38Luml8DXQtUhO1FM2jUEf0NAeDdBZ81J6oTWY-38dTYA2h4fynsz6SOaeFFEtf0kR5IESeQ1EnPxRLA4WBms8QdtOPfEdEtewcs1Ab8Eae5Sr7F8WDm/s1600/cecos.png" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="353" data-original-width="513" height="219" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5r5pfEpGxkVsujFLOsBgw38Luml8DXQtUhO1FM2jUEf0NAeDdBZ81J6oTWY-38dTYA2h4fynsz6SOaeFFEtf0kR5IESeQ1EnPxRLA4WBms8QdtOPfEdEtewcs1Ab8Eae5Sr7F8WDm/s320/cecos.png" width="320" /></a></div>
<br />
<br />
Cela ne devrait pas être trop pris à la légère.<br />
<br />
Néanmoins, il convient encore une fois de ne pas exagérer la « menace » que représenteraient ces milieux, celleux-ci, même au sein de la communauté LGBT, étant très minoritaires et quasiment inaudibles. Vu leur faible nombre, je pense qu'iels gagneraient davantage à rejoindre nos rangs pour pouvoir lutter ensemble contre <i>La Manif Pour Tous </i>(dont les sympathisants, même avec l'affaiblissement du mouvement, restent quand même autrement plus nombreux) plutôt que d'essayer de s'engager dans un combat perdu d'avance[5][6]. Je reste malgré tout confiant dans les possibilités de dialogue[7].<br />
<br />
<div style="border: none; line-height: 130%; padding: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><b>Update
du 15 septembre</b> : une brillante
démonstration de ce que je dénonçais dans cet article vient de
m'être fournie récemment. Tout a commencé avec ce tweet :</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjIeoVEMYiF7aY0ZGaHE0NjNd_iDfaZPQm4k3N-9Hls36WW5o8JKOh2mZuFoHiQbGjBbtgSQtiANiSnYfsOwy6FWSwXroVXyLzB9_r-nzj_jJjw_qUl0-NeOlpjKnbDT4NTzc-EHJxv/s1600/madinina2.png" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><span style="color: black; font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><img align="BOTTOM" border="0" height="162" name="images1" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjIeoVEMYiF7aY0ZGaHE0NjNd_iDfaZPQm4k3N-9Hls36WW5o8JKOh2mZuFoHiQbGjBbtgSQtiANiSnYfsOwy6FWSwXroVXyLzB9_r-nzj_jJjw_qUl0-NeOlpjKnbDT4NTzc-EHJxv/s400/madinina2.png" width="400" /></span></a></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: justify;">
<span style="color: black; font-family: "times" , "times new roman" , serif;"></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">S'en
sont suivies plusieurs réponses, pas toujours pour approuver ce post des deux mains, dont l'une d'entre elles a amené
la twittos d'origine a être en contact avec une autre twittos,
conçue par don, qui se décrit pourtant elle-même comme étant <i>«
très à gauche »</i> et rejetant explicitement tout amalgame
entre LGBT et refus de l'accès aux origines. S'en est suivie une
discussion houleuse, parfois agressive, à la limite de la négation
du ressenti et avec des tentatives claires de harcèlement, parfois juste parce que la seconde twittos a eu le malheur d'employer l'expression de <i>« père biologique »</i>[8], qui a abouti à ce que celle-ci ferme temporairement son
compte Twitter par frustration liée à un dialogue de sourd-e-s
(veuillez m'excuser l'emploi de cette expression validiste). A l'heure où je réalise mon update, ce <i>shitstorm</i> n'est d'ailleurs pas totalement terminé.</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Cela
m'a fait me rendre compte à quel point accuser l'adversaire d'être
<i>« -phobe »</i> est pratique</span></span><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"> d'un point de vue </span><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">rhétorique</span><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">, car cela permet de
clôturer tout débat et de ne pas avoir à écouter les arguments du
camp d'en face.</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">En
l'occurrence, la réfutation de l'idée selon laquelle l'accès aux
origines serait, par essence, une revendication lesbophobe est
simple, même si elle ne sera peut-être pas vue comme assez
convaincante pour mes adversaires.</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Tout
simplement, les partisans de l'accès aux origines y sont favorables
<i>aussi</i> pour les enfants de couples hétérosexuels. Mieux encore, ils
cherchent même à combattre cette formidable manifestation de
privilège hétérosexuel que constitue la possibilité du maintien
du secret autour de la conception de son enfant. Ils sont cohérents
avec leurs propres principes. D'autre part, des personnes trans
peuvent aussi donner leurs spermatozoïdes (bien que cela ne soit pas
le cas aujourd'hui en France, malheureusement).</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Que
l'accès aux origines ne devienne une préoccupation qu'à partir du
moment où l'on projette d'étendre la PMA à toutes les femmes, cela
devrait certes avoir quelque chose d'assez préoccupant et même
regrettable, mais la faute en revient en tout premier chef au
privilège hétérosexuel, pas à l'idée même d'accès aux
origines. C'est une manipulation idéologique que l'on voit aussi
poindre dans d'autres domaines.</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Par
exemple, dans le même genre de milieux, la laïcité et la liberté
d'expression sont régulièrement accusées (pas toujours à tort,
cependant) d'être utilisées comme armes contre les populations
d'origines musulmanes. De même, les droits des enfants et des
animaux font souvent l'objet de critiques du même ordre.</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Le
risque, avec cette confusion croissante entre progressisme et égalitarisme d'un côté
et permissivisme, relativisme et communautarisme de l'autre, c'est
non seulement de se retrouver avec un système de pensée qui
placerait la communauté et les « groupes minoritaires » <i>(TM)</i>
au-dessus de l'individu et des valeurs communes, mais aussi de se
retrouver avec un mouvement progressiste affaibli et incohérent, qui
est par ailleurs un des grands fantasmes de la droite.</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Au
nom du politiquement correct, va-t-on bientôt prétendre que
s'opposer aux mutilations des personnes intersexes est un combat
d'avant-garde tandis que s'opposer à la circoncision et à
l'excision est antisémite et raciste, alors que tous ces combats
devraient aller de pair ? Que s'opposer à la corrida est une cause
noble parce que ce sont des blancs qui la pratiquent, mais que
s'opposer à l'abattage rituel fait de nous des fascistes ?</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><span style="color: black;">Nul
doute qu'il existe des personnes qui se servent de l'accès aux
origines comme d'une véritable excuse pour déverser leur homophobie
et leur lesbophobie sur la toile, mais généralement ces personnes
vont beaucoup plus loin que simplement soutenir l'accès aux origines
: en effet, elles s'opposent généralement à toute forme d'homoparentalité,
et même parfois à la PMA en général. </span>
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Par
ailleurs, on reproche à ceux qui veulent connaître leurs origines
biologiques d'être une « minorité », de vouloir généraliser
leur « cas particulier » et de soutenir des propositions qui
pourraient avoir un impact sur beaucoup d'autres personnes ; mais
n'a-t-on pas non plus accusé les activistes LGBT, il y a si peu de
temps et encore aujourd'hui, d'être une « minorité » et que ce ne
sont pas tous les LGBT qui désiraient avoir le mariage, l'adoption
et la PMA ?</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Comment
pouvez-vous être si sûr-e-s qu'avec vous, la PMA, « ça se passera
bien » ? Si des personnes conçues par don vous donnent leur propre
ressenti, c'est parce qu'iels savent très bien que cela pourrait
arriver un jour avec vos propres enfants. Et si ceux-ci sont élevés
avec l'idée selon laquelle il n'existerait aucun intermédiaire
entre <i>La Manif Pour Tous</i> et les « lesbiennes radicales »,
cela risquerait fort d'être contre-productif, certains enfants ayant
élevés ainsi s'étant carrément mis à rejoindre des groupes
homophobes parce que ça fait « rebelle ». De plus, étrangement,
vous semblez adhérer au faux dilemme selon lequel si les enfants
n'appartiennent pas à leurs parents, <i>« ils appartiennent à
l'État »</i>. Devinez qui d'autre tient le même discours ?</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Vous
dénoncez (en partie à raison) l'importance qui est donnée à la
biologie et à la génétique dans notre société, mais le recours à
la PMA n'est-il pas un moyen de conserver une connexion génétique
vis-à-vis d'un des deux parents, ce qui serait mieux perçu que de
ne pas avoir de connexion du tout ? La ROPA (<i>Réception de
l'Ovocyte de la PArtenaire</i>), que vous soutenez et qui a
malheureusement été exclue du projet de loi, n'est-elle pas une
autre façon de favoriser cette connexion ?</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Plus
généralement, tout ce discours vise à ériger l'homosexualité,
qui ne devrait être qu'une simple histoire d'attirance, en
idéologie, voire en religion, ce que je trouve carrément dangereux,
en partie parce qu'il s'agit déjà d'un fantasme inoxydable de la
droite et des réactionnaires. De plus, il y a déjà d'énormes
difficultés à critiquer en public la pratique de la circoncision ou
de l'abattage rituel, parce qu'il s'agit là de commandements
religieux, multi-séculaires, dont l'importance est constamment
réaffirmée dans les divers textes des religions en question ; alors
pourquoi devrait-il y en avoir pour critiquer une pratique qui
n'existe que depuis à peine quelques décennies au mieux, et qui, à
ma connaissance, n'a jamais été mentionnée comme « commandement »
dans quelque texte religieux que ce soit ? Serait-ce parce que la
première twittos ne se montre même pas favorable au «
double-guichet », pourtant plus cohérent que son propre projet, en
termes de droits individuels ?</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Concernant
PMAnonyme, association qui compte plus de 250 membres aujourd'hui,
cela m'étonnerait très fortement que sur 250 personnes concernées,
absolument toutes soient strictement hétérosexuelles et cisgenres
(de fait, je <i>sais</i> que ce n'est pas le cas). Elle compte aussi
des enfants de familles homoparentales, et lutte activement contre
cette manifestation de privilège hétérosexuel que constitue la
possibilité de garder le secret autour du mode de conception de ses
enfants. C'est une association qui fait déjà beaucoup d'efforts pour dialoguer avec les militant-e-s LGBT, <a href="https://programmation.maifsocialclub.fr/programmation/le-mois-des-adopte-e-s/adoption-pma">y compris certaines assez radicales comme Amandine Gay et Alice Coffin</a>.</span></span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<div style="margin-bottom: 0cm; text-align: left;">
<span style="color: black;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Certes,
sa co-fondatrice est apparemment devenue sympathisante de LMPT, et il
est vrai que certains de ses membres adhèrent à un certain type de
discours « conservateur » </span></span><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">(je parle d'expérience)</span><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">, mais citer ces quelques exemples pour
tenter de jeter le discrédit sur le travail de l'association toute
entière relève, au mieux, du plus pur </span><i style="font-family: times, "times new roman", serif;">déshonneur par association</i><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">.</span></div>
<br />
<div style="margin-bottom: 0cm;">
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br />
</span></div>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">---</span><br />
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">[1] Notez que je ne parlerai pas ici de celleux dont les divergences ne concernent que le point très technique de la RCA, qui restent relativement nombreux/ses, dont le point de vue est légitime, et avec lesquels nous pourrons plus facilement nous allier, mais uniquement de celleux pour lesquels le désaccord est plus fondamental. </span><br />
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Il me faut toutefois préciser que nombre d'opposants à la RCA sont en réalité d'anciens partisans de l'anonymat ou du double guichet qui se sont reconvertis lorsqu'ils ont compris que ces revendications était politiquement peu défendables, et qu'ils continuent d'adhérer à un double discours en interne, voire de façon ouverte.</span><div><span style="font-family: times, times new roman, serif;"><br /></span></div><div>[1bis]Aujourd'hui, j'ajouterais volontiers un troisième groupe de personnes, qui est celui des gens de gauche "à l'ancienne" (en particulier le PCF et Jean-Luc Mélenchon). Ce ne sont ni des "intégristes" de la libre disposition de son corps, ni des personnes qui mettent particulièrement en avant les revendications LGBT dans leur argumentaire, mais simplement des personnes qui ont du mal à articuler la revendication d'accès aux origines avec leurs valeurs de gauche "traditionnelles", en particulier le caractère social et non biologique de la filiation. Bien que ce groupe de personnes soit beaucoup moins présent que les deux autres dans les médias et sur les réseaux sociaux, c'est celui qui a le plus d'influence au parlement.<span style="font-family: times, times new roman, serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">[2] Beaucoup de psychanalystes sont contre l'accès aux origines, Morgane Merteuil témoigne d'ailleurs d'une certaine sympathie envers ce courant.</span><br />
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">[3] On pourrait aussi dire « bolchévisant », à cause de cette obsession des avant-gardes qui imposent leur point de vue aux autres par la force.</span><br />
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">[4] Toutes proportions gardées, l'idée selon laquelle la revendication d'accès aux origines serait lesbophobe fait beaucoup penser à l'exemple, certainement caricatural, cité dans le texte de Thomas C. Durand, selon lequel critiquer l'excision serait critiquer la culture africaine. Bien sûr, vous n'êtes pas obligé d'adhérer à cette comparaison.</span><br />
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">[5] 75 % des français étant favorables à l'accès aux origines, <a href="https://www.ifop.com/wp-content/uploads/2019/06/116-446_Rapport_Ifop_ADFH_2019.05.24Don.pdf">d'après un récent sondage</a>, dont l<span style="font-family: inherit;">'analyse est intéressante à plus d'un titre. D'une part, les
différences sociologiques sont en général beaucoup moins
prononcées que sur d'autres sujets tels que l'ouverture de la PMA à toutes les femmes,
peuvent parfois même sembler étrangement aléatoires, et surtout ne
dessinent pas d'opposition « gauche-droite » identifiable et évidente. Néanmoins,
on note que parmi les catégories les plus sensibles aux
revendications d'accès aux origines se trouvent, entre autres, les jeunes, les
étudiants, les femmes, les homos, les catégories populaires et les sympathisants des partis de gauche, ce qui suggère au minimum que, d'un point de vue </span>strictement <span style="font-family: inherit;">sociologique, prétendre que l'accès aux origines serait une idée
conservatrice ne tient pas la route.</span></span><br />
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">[6] De plus, ce genre d'actions pourrait provoquer l'indignation légitime d'une frange non-négligeable de la communauté LGBT, qui se mettrait alors à entonner <i>#NotInMyName</i>.</span><br />
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">[7]A cause de l'instrumentalisation qui en est faite actuellement par <i>La Manif Pour Tous</i>,<i> </i>une petite frange de militants LGBT radicaux semble être devenue allergique à quasiment toute forme de rhétorique mettant en avant les droits de l'enfant. Assez paradoxalement, cette attitude participe précisément à valider les discours de LMPT selon lesquels les droits des enfants et ceux des personnes LGBT devraient nécessairement entrer en conflit, alors qu'ils sont censés se compléter harmonieusement.</span><br />
<br />
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">[8]A ce sujet-là, il faut reconnaître que la première twittos a le mérite de la cohérence puisqu'elle refuse d'écouter les concernés lorsque cela arrange son idéologie (et s'en vante ouvertement, surtout).</span><div><span style="font-family: times, times new roman, serif;"><br /></span></div><div><span style="font-family: times, times new roman, serif;"><b><i>Addendum du 26 janvier 2021</i> :</b> la posture de Morgane Merteuil, en la matière, se caractérise plutôt, en réalité, par une espèce de complaisance systématique à l'égard de tous les mouvements les plus relativistes et les plus communautaristes qu'on puisse trouver en France, quitte à ce qu'il n'y ait plus aucune forme de cohérence dans ses propres engagements. </span><span style="font-family: times, "times new roman", serif;">Ainsi, sur Twitter, e</span><span style="font-family: times, times new roman, serif;">lle s'est récemment confrontée à des militantes <i>« lesbiennes radicales »</i>, surtout d'origine juive, qui lui reprochaient notamment son soutien au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Indig%C3%A8nes_de_la_R%C3%A9publique">PIR</a> et à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Houria_Bouteldja">Houria Bouteldja</a>. Cependant, les <i>« lesbiennes radicales »</i> en question, sans le savoir, font exactement avec le féminisme et les droits LGBT ce que le PIR a lui-même fait avec l'antiracisme, et traitent les personnes conçues par don de la même façon que le PIR traite les juifs et les homosexuels. Comme quoi...<br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
</div></div>Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2786444011423465959.post-18858655141627096302019-08-15T17:06:00.001+02:002019-10-06T13:54:47.738+02:00Projet de loi Bioéthique : ce que j'en penseComme vous le savez peut-être, le gouvernement dans la future loi projette d'étendre l'accès à la PMA (procréation médicalement assistée) à toutes les femmes, qu'elles soient célibataires ou en couple, avec un homme ou avec une femme. Ce projet fait débat, pour au moins plusieurs raisons.<br />
<br />
Commençons par les aspects positifs, d'abord : l'ouverture de la PMA à toutes les femmes[1], y compris célibataires (<a href="http://ineakis.blogspot.com/2014/07/petit-bilan-de-mes-opinions-sur-le.html">j'ai changé d'avis sur la question depuis quelques années, pas à cause des gesticulations des militantes mais parce que j'ai moi-même fini par reconnaître que mes arguments ne tenaient pas la route</a>). Cette inégalité d'accès à la procréation méritait amplement d'être corrigé, d'autant plus depuis le vote de la loi sur le mariage pour tous en 2013 en France, où celui-ci faisait paraître.<br />
<br />
Mais le diable se cache dans les détails. En effet, établir de nouveaux modes de filiation pose apparemment problème d'un point de vue juridique, notamment du point de vue du titre VII du code civil, qu'il faudrait modifier en profondeur pour tenir compte des nouvelles formes de filiation. C'est pourquoi le législateur a, dans un premier temps, écarté l'idée d'étendre tout simplement le droit existant à toutes les personnes concernées.<br />
<br />
C'est une seconde option qui a ensuite été envisagée : celui de créer un mode de filiation spécifique pour la PMA avec tiers-donneur, la <b>déclaration anticipée de volonté</b> (DAV), aussi appelée <b>déclaration commune anticipée de filiation </b>(DCAF). Idéalement, celle-ci devrait permettre à l'enfant issu d'un don, et à lui-seul (la mention ne figurant que sur la copie intégrale de l'acte de naissance) de savoir que sa conception a supposé un engendrement avec tiers donneur. Cependant, il se peut que les couples hétérosexuels puissent très facilement contourner ce système (en omettant la DAV au moment de la naissance de l'enfant, par exemple), ce qui pourrait entraîner un certain nombre de complications juridiques si tel était le cas. Par ailleurs, se posent des questions relatives au « respect de l'intimité des couples », ainsi qu'au risque de « stigmatisation » qu'induirait cette solution.<br />
<br />
Finalement, le gouvernement a retenu une troisième option, à savoir conserver la DCAF, mais uniquement pour les couples de femmes ou les femmes seules. Je pense qu'il s'agit là du pire compromis possible. La solution est simple : soit on étend la DCAF à tous les couples, y compris hétérosexuels (c'est que je préférerais, à l'heure actuelle), soit on se contente d'étendre le droit existant, sinon on crée un système discriminatoire à deux vitesses qui ne satisfait personne, et surtout écarte les personnes qui en auraient le plus besoin (en l'occurrence ici, les enfants nés de couples hétérosexuels).<br />
<br />
D'un côté, je comprends quelle peut être la stratégie du gouvernement, à savoir « tâter le terrain » avec un projet encore relativement conservateur, pour mieux voir si d'autres députés, en particulier ceux des partis traditionnellement hostiles à la PMA, ne seraient pas prêts à accepter des propositions plus « progressistes » émanant de députés de tout bord, mais surtout à gauche, voulant infléchir le projet actuel. Je pense qu'il risque d'y avoir des surprises, à ce sujet : plusieurs députés de droite ont dores et déjà annoncé qu'ils voteraient <i>pour</i> le projet, tandis que d'autres ont déclaré que la droite en général ne voulait pas revivre le « match » de 2013.<br />
<br />
Ce n'est pas le seul aspect controversé du projet de réforme actuel ; on peut aussi citer la destruction des stocks de gamètes, que je considère comme un scandale majeur auquel il faudra bien remédier, en demandant par exemple aux anciens donneurs s'ils acceptent de passer aux nouvelles règles pour conserver leurs gamètes. A ce sujet, je vous invite fortement à signer, si ce n'est déjà fait, <a href="https://s-m-r.org/webform/projet-de-revision-de-la-loi-de-bioethique-2019">cette pétition des professionnels de l'AMP appelant à des aménagements au projet de loi actuel</a>.<br />
<br />
D'autre part, en me promenant sur Twitter, je réalise à quel point le projet de réforme souffre de nombreux malentendus.<br />
<br />
Le plus gros d'entre tous, certainement aggravé par l'option « conservatrice » finalement retenue par le gouvernement, et par la désinformation entretenue par des médias mal informés sur ce sujet-là, réside certainement dans la levée de l'anonymat des donneurs de gamètes. Ce malentendu touche aussi bien certains militants « radicaux » que certains conservateurs ; ils ont d'ailleurs beaucoup plus en commun qu'ils ne voudraient l'admettre : en effet, ce sont les plus sensibles à la désinformation médiatique autour de ce sujet, ils ont tendance à être dogmatiques, repliés sur eux-mêmes et peu ouverts à la conversation, ils
confondent père et géniteur, filiation et accès aux
origines, dénoncent l' « usine à gaz des bricolages » et relaient les mêmes arguments moisis sur la « baisse des dons ». Mais ce serait oublier que d'une part le donneur <i>n'est pas</i>, et <i>ne peut pas</i> <i>être</i> un père, d'un point de vue légal, et donc que les procès en paternité ne seront pas possibles (autrement dit, les familles resteront protégées), et que d'autre part, à long terme, la « baisse des dons » est un mythe.<br />
<span style="background-color: white; font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="background-color: white; font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Et aussi, il faut bien faire comprendre à tout le monde que l’anonymat, tel qu’il a été promis à tous il y a vingt-cinq ans, n’existe plus aujourd’hui</span><span style="background-color: white; font-family: "times" , "times new roman" , serif;">, avec la démocratisation des tests ADN en ligne. </span> Aller à l'étranger pour un don anonyme ne servira à rien, à part peut-être faire perdre davantage de temps et d'argent à tout le monde. <span style="background-color: white;"><span style="font-family: "times" , "times new roman" , serif;">Encore une fois, le droit de l'enfant à découvrir son géniteur est conçu comme un droit qui lui appartient en propre et à lui seul, en aucun cas la transparence n'est imposée. Les inquiétudes sur la supposée « délégitimation des familles » sont donc infondées. Derrière ce rejet se cache peut-être la peur de la liberté que pourraient avoir nos propres enfants dans leur façon d'envisager leur famille, mais si l'on est pas prêts à ce que nos enfants puissent avoir leurs propres opinions sur le sujet, alors il vaut mieux ne pas en avoir du tout (cela vaut aussi pour les réactionnaires et les homophobes, bien évidemment).</span></span><br />
<span style="background-color: white; font-family: "times" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
<span style="background-color: white; font-family: "times" , "times new roman" , serif;">En quelque sorte (je l'écris sans arrière-pensées), je pense que cela provient du paradoxe d'appartenir à une minorité opprimée et de vouloir fonder une famille « comme les autres », c'est-à-dire une structure qui, à sa manière, incarne l'ordre et l'autorité, mais qui pourtant ne pourra pas échapper à la dialectique de la rébellion et de la réconciliation.</span><br />
<br />
Je pense qu'il faut aussi se rassurer par rapport à la DCAF. Bien que je regrette la frilosité du gouvernement actuel à ce sujet, les familles homoparentales ne vont pas être davantage marginalisées ou stigmatisées à cause d'un détail très technique qui ne sera accessible que sur la copie intégrale des actes de naissance. Ce n'est pas ce qui rendra la Manif pour Tous plus ou moins tolérante envers les personnes LGBT et leurs familles. Elle s'en contrefiche. Que des homosexuels puissent élever des enfants ensemble, c'est déjà trop pour elle.<br />
<br />
Mais il n'empêche qu'il demeure une injustice dans le projet actuel, et qu'il conviendra tôt ou tard de la réparer. <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/07/30/bioethique-et-filiation-ne-montrons-pas-du-doigt-les-meres-lesbiennes_5494905_3232.html">Cette tribune du journal Le Monde</a> donne toutes les grandes raisons de s'y attaquer.<br />
<br />
En ce qui me concerne, j'aurais plutôt tendance à m'y reconnaître : en effet, loin des craintes de « stigmatisation », je pense que la DCAF étendue à tous pourrait permettre de « dé-stigmatiser » définitivement les personnes nées d'un don en faisant passer cette réalité dans le droit, et pourrait faire passer la France de retardataire à pionnière des droits des personnes nées d'un don, de nombreuses personnes dans d'autres pays réclamant, à tort ou à raison, des actes de naissance au plus près de la réalité biologique pour eux-mêmes et leurs enfants.<br />
<span style="font-size: medium;"><br /></span>
L'autre
raison qui fait que je soutiens la DCAF, c'est que parmi les
opposants à celle-ci, se trouvent beaucoup d'anciens opposants à la
levée de l'anonymat qui essayent de conserver tant qu'ils le
peuvent cet accrochement aux droits des parents (beaucoup d'entre eux, hormis une poignée d'irréductibles[2], ayant compris que lutter directement contre l'accès aux origines était devenu politiquement peu défendable), tandis que parmi les
soutiens de la DCAF se trouvent beaucoup de soutiens de longue date
de la levée de l'anonymat (<a href="http://pmanonyme.asso.fr/">PMAnonyme</a>, l'<a href="https://adfh.net/">ADFH</a>, <a href="https://www.facebook.com/TheryIrene">Irène Théry</a>, etc...) et donc des personnes globalement plus sensibles aux droits des enfants.<br />
<br />
---<br />
<br />
[1]si j'étais cynique, j'y verrai une très mauvaise nouvelle, car la surnatalité est l'un des principaux facteurs du réchauffement climatique. Un peu l'inverse de <a href="http://www.lefigaro.fr/politique/le-scan/jean-marie-le-pen-inattendu-soutien-de-la-pma-20190723">Jean-Marie Le Pen</a>, qui apparemment soutient la PMA pour toutes pour des motifs racistes. Mais je ne suis pas cynique, donc bon.<br />
<br />
[2]dont éventuellement le <a href="https://www.planning-familial.org/fr">Planning familial</a>, association dont le discours semble aujourd'hui devenir de plus en plus ambigu (<a href="https://ineakis.blogspot.com/2019/09/les-arguments-fallacieux-des-gouines.html">de par leur participation au meeting des GCN, par exemple</a>), voire <a href="http://marianne.net/politique/laicite-au-planning-familial-marlene-schiappa-demande-des-explications">communautariste</a>.<br />
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<br />Ornithorynque consternéhttp://www.blogger.com/profile/02656964216472588356noreply@blogger.com0